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[An Orc Story - Univers Seigneur des Anneaux] - Premier Sang pour l'enfant Orque

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[An Orc Story - Univers Seigneur des Anneaux] - Premier Sang pour l'enfant Orque Empty [An Orc Story - Univers Seigneur des Anneaux] - Premier Sang pour l'enfant Orque

Message par Karess Jeu 25 Avr - 15:22

[An Orc Story - Univers Seigneur des Anneaux] - Premier Sang pour l'enfant Orque Good_l14





I : Un fleuve de ciment


[An Orc Story - Univers Seigneur des Anneaux] - Premier Sang pour l'enfant Orque Charir13





L’enfant Orque s’est vu remettre une planche de bois cloutée en guise d’arme. Un casque de fer noir à visière fermée encage son visage ruisselant de sueur, ne laissant qu’une fine fente au niveau des yeux. Au-dessous, il est vêtu de ses coutumières loques rapiécées de cuir, de peau et de pièces métalliques et de maille. Enrôlé bon gré mal gré, arraché parmi des centaines de ses congénères à son usine il y a quelques semaines, l’enfant Orque marche dans le rang de la Cohorte. Marche sous le joug du fouet sur une route cernée de collines boisées qu’il connaîtra plus tard sous le nom d’Ithilien.
L’enfant Orque a été sommairement entraîné, comme tous les autres. S’est fait inculquer les rudiments de la discipline. Le fouet qui claque comme stimuli. Le pas cadencé. La cohésion d’unité. Et deux ou trois coups de base.
Aussi doué soit l’enfant Orque pour apprendre, il en a plus appris dans les grèves ouvrières de son usine à l’âge de cinq ans que durant le mois d’entraînement au sein de la cohorte disciplinaire. Il a alors huit ans*.

*:

Au-travers de la mince fenêtre de sa visière, c’est la première fois qu’il voit des arbres, qu’il traverse une forêt, même si la route que remonte la Cohorte est en général dégagée sur ses flancs, antiques souches d’arbres méthodiquement abattus dans des terrains escarpés à la végétation asséchée et éparse. Le manque de fantaisie du contexte présent, la fatigue de la marche forcée, les fouets qui claquent autour de lui, bannissent tout émerveillement.
Sans compter les drogues qu’on lui a mises dans sa gamelle, qui font pulser ses oreilles tel le martèlement d’une otite...
Les arbres, maladifs et ternes sous la domination de l’Ombre, défilent sur les flancs de sa visière tels deux masses de monstres hideux et difformes. L’enfant Orque s’attend à tout moment à les voir se mouvoir précipitamment sur eux, les enserrant de leurs branches pour les dévorer. L'air vivifiant de la forêt est saturé de la poussière soulevée par la marche des Cohortes, par la chaleur suffocante de son casque. Il n’a pas conscience de tout ce vert, toutes ces couleurs nouvelles qui se présentent à lui, ni de la quiétude des lieux, anéantie dans leur avancée piétinante et les fouets qui claquent, dans les aboiements des Wargs lancés au-devant de l'armée qui se répercutent à travers les collines et les bois, et dans le battement de mille tambours.   
Au-devant et fermant la marche de la cohorte, des tambours donnent le rythme.
Et un millier d’autres tambours répondent aux leurs, autres formes d'aboiements qui se répercutent eux aussi à travers toute la forêt. D’autres cohortes de snagas enrôlés, comme la sienne. Et les Légions. Dans le lointain derrière lui, venant des lignes des authentiques soldats hors de sa vue, des chants guerriers et martiaux s’élèvent en écho dans les collines. Le roulement de leurs milliers de pas suit la Cohorte Disciplinaire de l’enfant Orque toute sa marche durant.
Les coups de tambours de la Cohorte produisent une vibration sinistre dans ses entrailles.
Le martèlement de l’otite dans ses oreilles cogne en cadence comme le Maître des Tambours.

Parfois, la route est jonchée de dépouilles pourrissantes de corbeaux. Piétinés par l'enfant Orque qui ne les a vu qu'au dernier moment, leur ossature craque bruyamment sous son pied...

L’enfant Orque marche dans la même direction des jours et des nuits durant. Les arbres ont continué à défiler dans sa visière, d’une indifférence imprégnée d’hostilité quant à son sort. Les Inspections des colosses du Bras Disciplinaire pour seules "pauses". Le Maître de Discipline qui sillonne les rangs maintenus en l'état de marche, chacun à sa place. Le temps d'enfoncer le goulot d'une outre de pellucide dans la gorge des moins endurants, et la marche reprend à grands claquements de fouets et d'invectives.  
Pas d'arrêt pour dormir. Pas d'arrêt pour manger. Manger, ils le font rapidement pendant les pauses. Se soulager ? Ils font ça directement dans le rang. De beaux cadeaux pour les chausses des gars qui suivent... Pour ce qui est de dormir, on leur a appris le somnambulisme, la main sur l'épaule du camarade de devant qui est éveillé, tandis qu'ils somnolent à tour de rôle.
Un moustique audacieux est venu lui sucer le sang de l'avant-bras pendant l'une de ces Inspections.
Aucun lien social au sein de la Cohorte. Les Uruk-Haï du Bras Disciplinaire leur ont ordonné de marcher et de fermer leurs gueules, et les corrigent comme des clébards quand ils surprennent des discussions. Les grognements nerveux et naturels de leur engeance en marche sont les seuls sons qui sortent de leurs bouches et gueules.
Intérieurement, l'enfant Orque commence à caricaturer le Maître de Discipline et ses gros tocards, à se rire de la conviction avec laquelle ils prennent leur rôle au sérieux. Moins cependant qu'ils l'intimident, les réminiscences du passé. La grève matée à la dure, les snagas révoltés enfermés dans des cages collectives sur chariots alignés au bord d'un fleuve de lave. Les Maîtres de Disciplines et leurs soudards tirant au sort lesquels ils poussaient dans le torrent de feu et lesquels auraient la grâce de retourner crever gentiment à leurs postes dans leur usine...
Après plusieurs jours de progression, la route qu'ils suivent croise une autre route en un vaste carrefour, sur lequel les Uruk-Haï font obliquer la Cohorte. La route qu’ils empruntent, vestiges occasionnels de voie pavée dont les pierres se sont pour la plupart fait la malle, cédant la place à des crevasses terreuses multiples, longe un fleuve que l’enfant Orque peut apercevoir à un demi-horizon de distance, par les fenêtres dégagées que ménagent les arbres à ses regards las et évasifs portés sur sa gauche, tandis qu’il marche en flanc de Cohorte.
Une rivière d’eau et pas de lave !
Mais quand le terrain entre route et fleuve est clairement dégagé d'arbres et que le paysage s’offre pleinement à sa vue au-travers de sa visière, qu'il ose braver la peur du fouet et ôter son casque le temps de voir, l’eau grisâtre dans le lointain lui évoque un coulis de ciment et ne fait que provoquer en lui des remontées gastriques. L’enfant Orque ne jette plus de regards sur les flancs et focalise droit devant lui, sur le dos du gars de devant. Celui-ci peste en enjambant une dépouille d’Orque mort. L’enfant Orque réalise alors qu’on le pousse au-travers d’un champ de cadavres de ses congénères.

Des flèches qui meurtrissent les dépouilles et le terrain.
La terre est salie, boueuse de sang et d’entrailles éparpillées.
Un véritable abattoir...
Des postures grotesques parmi les  morts, qui sont tels des pantins de chair désarticulés laissés à l’abandon.
Au-dessus d'eux, le ciel grouille de corbeaux...

Ils étaient malades. Quelque chose qui s'insinuait en eux et leur liquéfiait la cervelle. Certains commencèrent à pleuvoir du ciel, s'écrasant déjà raides et pourrissant pour les uns, d'autres mourant au sol, les ailes et les pattes battant nerveusement.


Les tambours cognent, accélèrent d’un cheveu le rythme, tambourinent avec plus de vigueur.
Comme son cœur dans sa poitrine.
Comme son otite...

Leurs rangs désordonnés par le terrain macabre, lui et les siens s’efforcent d’enjamber les défunts en réprimant des accès de nausées. La tension qui monte de plusieurs crans. Un moment, l’enfant Orque trébuche en se prenant un pied dans une jambe. L’un des sinistres colosses casqués et anonymes du Bras Disciplinaire fait claquer le fouet à son attention, le blâmant d’une injure qu’il a oublié.
Les tambours qui cognent avec insistance, qui les poussent à presser le pas. A se sortir de là.

Tout compte fait, l’enfant Orque préfèrerait qu’on lui permette d’aller faire trempette dans le coulis de ciment.

Au lieu de quoi, la Cohorte enjambe des cadavres, jusqu’à arriver en vue du Champ-de-Décombres.


Dernière édition par Karess le Sam 15 Juin - 13:15, édité 26 fois
Karess
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[An Orc Story - Univers Seigneur des Anneaux] - Premier Sang pour l'enfant Orque Empty Re: [An Orc Story - Univers Seigneur des Anneaux] - Premier Sang pour l'enfant Orque

Message par Karess Mar 30 Avr - 13:22

HRP:

II : Chair à piques




Le ciel crépusculaire grouillait de corbeaux. Nuée noire frénétique et chaotique qui saturait le ciel.


Comme une carotte promise en motivation parallèle aux coups de fouets et de bâtons, les Cohortes se sont vues promettre temps de repos et rations lorsqu’elles parviendraient aux abords du Champ-de-Décombre.  
Au lieu de quoi, trois d’entre elles sont à peine descendues de la pente sur laquelle s’écoule la route délabrée et sont encore en train de s’aligner aux abords du large terrain vague marquant la séparation entre les collines aux arbres et le Champ-de-Décombres, quand le Patron déboule sur leur flanc gauche et donne l’ordre de lancer l’assaut sur-le-champ. S’ils veulent manger ce soir, ils mangeront les carcasses de l’Ennemi vaincu, dit le Patron.
Tous ses congénères autour de lui murmurent de peur et de docilité "la Tour", le titre du Patron à la tête de l’invasion. L’enfant Orque se dresse sur la pointe des pieds, se faufilant parmi les siens pour bien le voir et… Il ne vit qu’un Homme. Un simple Homme, cadavérique et méprisable, juché avec un manque d’équilibre criant sur le dos d’une bête maladive et assoiffée au poil noir-de-néant. Les atours de l’Homme de ce même noir lui donnant un simulacre d’autorité aux yeux de l’Enfant-Orque, qui ne verrait aucune raison de ne pas le tuer de sa planche cloutée si la question dépendait de lui. Frapper d’un bon coup dans sa dentition pourrie à découvert sous ce heaume d’acier poli qui évoque davantage à l’enfant Orque un tabouret que l’Homme aurait mis sur sa tête pour faire des pitreries à l’attention de ses copains à l’usine, plutôt que la Tour Noire du Seigneur des Ténèbres qu’il est censé représenter.
Voir les Maîtres de Discipline tenter d’objecter avec une timidité hésitante qu’il ne leur connaissait pas jusqu’ici, choque l’enfant Orque autant que cela attise son mépris pour les figures d’autorité.
« Vous avez vos ordres, vous obéissez ! » Tonne avec une autorité rauque (ou en proie  à une toux qu’il s’efforce de contrôler le temps de finir sa phrase) l’Homme à cheval en se détournant dans un mouvement de cape théâtral, repartant au galop vers l’arrière.  
Les Maître de Discipline restent figés sur place plusieurs secondes...

Est-ce qu’ils tremblent de peur ?

Chacun d’eux finit soudain par se reprendre et vient reporter son attention sur sa Cohorte respective. "Son" Maître de Discipline revient en adressant un hochement de tête à l’attention de ses Uruk-Haï.


Plus tôt, alors qu’ils arrivaient aux confins des collines boisées, des cors se sont mis à retentir sans plus s’arrêter, formant une mélopée funeste et terrible. Comme une entente entre ceux des Cohortes, qui font vibrer les entrailles de l’enfant-Orque, et ceux de "l’Ennemi" dans le lointain, qui font cogner son cœur et claquer nerveusement ses crocs.
Qui lui tonnent à répétition qu’il va mourir.
Sa planche cloutée bat contre sa jambe. Il sent dans ses tripes une sale sensation qui le chauffe, qui le fait trembler. La Cohorte n’est pas venue se ranger dans les premières lignes. Elle est la première ligne. Flanquée sur sa droite de deux autres Cohortes d’heureux gagnants qui sont sûrs de mourir aussi dés le premier sang, se dit l’enfant Orque dans une muée de cynisme, la Cohorte fait sonner bien fort son cor, ponctuant l’ordre d’avancer (et d’aller se faire tuer, ça va de soi).
Tandis qu’ils avancent d’un pas ferme et uni, (les fouets qui claquent veillant à cette fermeté et à cet unisson), son casque raisonne de l’intérieur de ses grognements haletants. A plusieurs reprises, un Uruk vient le réprimander parce qu’il enfouit craintivement la tête.
Comme si l’issue de la guerre dépendait que l’enfant-Orque voit distinctement  l’ennemi retranché. "L’Ennemi"… Des Hommes comme le ponte du Haut-Commandement, qui à cette distance se réduisent à de vagues hauts de silhouettes d’argent, qui leur font face par-dessus les créneaux d’un antique rempart zébré  de crevasses et parcouru de cratères, pour les veinards qui s’y trouvent. Ce rempart déchu en de nombreux points, la plupart des silhouettes d’argent, sont tapies derrière des barricades dignes de celles d’une grève de snagas, faites de débris d’habitations et de décombres de pierre empilés.
Mais tandis que la Cohorte accélère le pas, pour amorcer la ruée vers le combat et la cité, l’enfant-Orque aperçoit des silhouettes d’argent qui sortent en nombre du Champ-de-Décombres, montées sur des bêtes dont il perçoit la vigueur et la force, l’inverse de celle de son "Maître".
Il comprend alors qu’il va avoir l’occasion de voir "l’Ennemi" de beaucoup plus près d'ici quelques battements dans ses oreilles…

***


[An Orc Story - Univers Seigneur des Anneaux] - Premier Sang pour l'enfant Orque Capita11


Le Sergent-chef "Crocs-Blancs" Skulaï, colosse vert et tatoué de la dix-huitième Légion d’Udûn, renâcle à la vue du bordel sans nom qui se dévoile à ses yeux canins. Comme l’a fait tout légionnaire  sorti du bois avant lui, comme tout légionnaire sortant du bois va le faire après lui.
« Mais qu’est-ce qu’ils nous ont foutu ? » Maugrée Yashnarz, le vénérable Lieutenant Uruk de la Compagnie de Choc, en venant se tenir à son côté sur le saillant rocheux de la colline que descendent prudemment les soldats du bataillon par un semblant de chemin de terre tortueux, d’autres bravant un flanc de colline incliné et broussailleux parsemé d’arbres, s’appuyant aux troncs grisâtres et souvent les uns aux autres, une main sur l’épaule du copain. Les genoux sont fléchis, arqués au possible, et les pieds bottés se retrouvent souvent à glisser au-travers de la pente. Pour un peu, les terrifiants et féroces Uruk-Haï du Mordor qui ne vivent que pour la guerre sembleraient tels une bande de gamins se livrant à un concours de glissades…

Mais ce n’est pas sur les pitreries de leurs congénères que renâclent Skulaï et Yashnarz.

Sur le no man’s land d’Osgiliath, les Cohortes Disciplinaires, assortiments de crapules en réhabilitation, d’Uruk-Haï et de soldats Orques punis pour des comportements indisciplinés/ indignes de l’engeance, et pour la majeure partie de pauvres snagas conscrits quasi pas entraînés, le tout mené par les pires Maîtres de Discipline dans tous les sens du terme et par des officiers pour la plupart infirmes et réformés du service conventionnel, n’ont pas attendu les Légions, l’organisation, les catapultes, les Trolls en armures pour monter à l’assaut. Et maintenant elles sont empêtrées dans un corps à corps meurtrier dans un seul sens, leurs rangs au centre disloqués, enfoncés par la cavalerie lourde du Gondor, débordés comme tout le reste de la ligne par les tortues offensives de l’infanterie de métal blanc, qui sort en nombre d’Osgiliath.
« Regardez-moi ça les gars… » Montre le vieux Lieutenant à Togreh, Wolgu et Kronnen, qui viennent renâcler dans son sillage. Chacun des guerriers le surpassent en poids et en taille. Yashnarz est un Uruk à la carrure osseuse, un cuir sombre et vert semblable à de l'écorce, comme la couleur de ses cheveux en tresses rattachés en queue de cheval derrière sa nuque. Un long nez en pointe de carreau aplati, des yeux bleu de glace. Une barbiche blanche à son menton effilé, attachée en queue, qui descend au-devant de son maigre cou.
« Ils se sont même pas attendus eux-mêmes pour charger, ils ont continué à avancer en colonne à travers la plaine, comme des neuneus…
— Putains de Maîtres de Discipline ! Crache Kronnen.
— Putain de Haut-Commandement, oui ! » Grogne Togreh.
Puis la bande de vétérans prend conscience de la présence du Commandement de la Légion dans leur dos. Le Général. La moitié de leurs Commandants. Dont Quguug, le Maître de Discipline en chef. Kronnen, l’un des charpentés chevelus-barbus de la troupe, trouve soudain ses chausses de fer fort inconfortables, dansant sur la pointe de ses pieds en se faisant tout petit.
« Euh j’parlais pas de vous bien sûr mon Général… Commence à marmonner Togreh…
«Repos. » La coupe le général Ruayyh en se joignant à eux pour venir observer la bataille en contrebas. Renâcler. Le Commandant du Bras Disciplinaire (et du bataillon de Skulaï depuis vie d’Orques) longe Kronnen dans un silence et une indifférence impériale, venant au côté du général. De gabarit et de pilosités supérieures encore à Kronnen, il passerait pour un frère aîné mieux nourri du fantassin, si leurs teints respectifs n’étaient pas à l’opposé. Kronnen a le cuir d’un bleu-noir de nuit et sa chevelure et sa barbe sont d’une blancheur de chair. Quguug a un teint gris comme de la cendre et une chevelure grisâtre comme de la pierre...      
« Quel bordel…» Lâche Ruayyh, la mine sombre.
— Ca pour sûr, une tête va tomber ! » Se moque Quguug.
— Mais laquelle ? » Le reprend sèchement Ruayyh…

Durant ces dernières décennies, si le Haut-Commandement humain de la Tour a acquis une renommée au-delà des frontières parmi le genre Uruk, c’est pour sa capacité à ne pas assumer ses échecs et à toujours rejeter la responsabilité sur ses exécutants. Exécutions de masses pour inaptitude sur des snagas et parfois des Légionnaires qui ont pourtant obéi aux ordres (de mauvais ordres). Exécutions pour inaptitude au commandement de généraux et de commandants de Légions qui ont appliqué les ordres du haut-commandement à la lettre (de mauvais ordres)… Exécution de prisonniers ennemis, ces ennemis qui étaient trop combattifs, trop hardis à la bataille,  même ceux qui ont été capturés avant ladite bataille... Non, assurément, l’échec n’est jamais de la faute et de la responsabilité du Haut-Commandement humain… Quelques instants plus tôt, la Tour venait trouver "le chef de meute de cette horde" pour le réprimander. Vos forces sont à la traîne, Général Ruayyh, lui avait reproché pompeusement la Tour. Motivez les enjambées par le fouet s’il le faut, mais hâtez-vous de rejoindre le champ de Bataille... Ruayyh ne prend que maintenant l’ampleur du désastre tactique que la Tour cherche à lui mettre sur le dos…

«Quguug, prends les gars de Merrysh, Eggha, et de notre frère Yashnarz, mène-les au coeur de cette pagaille et remets-y de l'ordre, ordonne Ruayyh. Je ne vais pas laisser un cinquième de l’armée se faire tailler en pièces sous mes yeux parce qu’un pistonné plus haut gradé n’a aucune idée de comment on utilise les Cohortes Disciplinaires. Les autres, préparez-vous à vous battre.»
L’œil droit de Ruayyh lui a été prélevé il y a des années de cela en Ithilien, et le vieux peau-verte borgne ne verra en aucun cas le massacre des Cohortes avoir lieu sous ses yeux au pluriel, mais aucun de ses subalternes ne se permet de relever.
Certainement pas Crocs Blancs Skulaï à son côté, qui se conditionne mentalement pour le combat en gardant le silence, se concentrant sur le ressenti physique dans sa poitrine et ses membres, comme Yashnarz le lui a appris.
« Sergent ? » l’appelle le Général à son côté, alors que tous sont en train de se retirer du saillant rocheux pour réintégrer le rang et la descente de la colline.
Sans même se détourner du champ de bataille, le colosse à peau verte tend sa hache de bataille vers une partie précise de la mêlée.

« Dol Amroth… » Identifie le Général. Parmi les bannières noires à l’arbre blanc des armées régulières du Gondor, celles atypiques du cygne sur fond bleu leur indiquent la présence d’un adversaire coriace et renommé parmi ses ennemis, de naissance toute particulièrement noble... Le genre de gibier que Skulaï est réputé pour traquer lorsque laissé pour mort sur un champ de bataille, il n’en répond plus qu’à son instinct de guerrier…
« Je pourrais tenter de te tempérer et de te dire « Gardez la tête froide Sergent, nous avons besoin de vous en tête de cortège. Mais je te connais et je sais que tu n’en ferais qu’à ta tête. Je te souhaite donc bonne chasse…
— Je n’ai pas l’intention de vous désobéir, mon Général.
— Oh non… Tu feras juste ce que tu as à faire.»


Le temps que le premier bataillon descende au complet de la colline et se mette en ordre de bataille, la situation continue de se pourrir pour les Cohortes sur la plaine. D’autres Cohortes ont continué d’affluer de la route, et de ses abords, ralliant à eux les masses snagas en débandade de la première vague, mais pour mieux les renvoyer se faire piétiner avec eux. Impactés par les chevaux et les lances, ils se débandent et battent en retraite, pourchassés, la dignité d’une bande de voleurs pris sur le fait. Quant aux cortèges de têtes, ils sont encerclés, pris entre les murs de boucliers des tortues et la chevalerie du Gondor, ils se font tailler en pièces méthodiquement, comme du bétail, à portée d'arcs du rempart...

Rappliquant au trot et en dévalant habilement au bas de la colline, les Compagnies d’Uruk-Haï en armures des Capitaines Eggha et Merrysh s’empressent de venir se tasser en rangs compacts aux côtés de la Compagnie du Lieutenant Yashnarz, les mains enserrant et tapotant les épaules de leurs compagnons de devant en signe d’unité et de cohésion de groupe.
Les heaumes couvrent les têtes. Les visières rabattues sur les faciès. Les grognements dans les casques produisent des sons vibrants et métalliques.
Cinq cents Uruk-Haï faisant bloc sous les ordres de Quguug, la dix-huitième Légion sort des bois dans un chant rauque et martial. Ses étendards ocre rouges brandis hauts. Ses Trolls en armure en têtes de cortège. Les trois compagnies chargent vers l’encerclement des cortèges de têtes et le massacre au cœur de la plaine, en battant frénétiquement des tambours. Mugissant et hurlant à pleins poumons. Les bandes de snagas en déroute se ralliant à eux et revenant à la charge à leurs côtés.

Des cors puissants retentissent d’Osgiliath. Face à leur charge, infanterie et cavalerie du Gondor interrompent immédiatement leur massacre de troupiers Orques, prenant la fuite. Déguerpissant du cœur de la plaine assez rapidement, du fait que rien de ce qui s’y trouve n’est en mesure de les bloquer. Mais pour la nasse, le repli des Hommes se fait rapidement plus chaotique, le bétail snaga qu’ils abattaient se transformant soudain en un noyau d’Orques qui entrave la manœuvre de repli.
La ligne exposée de la nasse est percutée de plein fouet et enfoncée par la déferlante Uruk dans des cris bestiaux. Arrachés littéralement aux bras de leurs camarades impuissants à les ramener avec eux, c'est maintenant à leur tour d'être saignés tels des gorets entre les griffes des Orques.





Au coeur du no man's land, son casque vibre de l’écho rauque et métallique de son souffle lourd de bête. Crocs Blancs Skulaï suit le mouvement de la Meute, faisant corps avec elle, et le bataillon de choc jeté au combat par Quguug ne va pas laisser les Hommes reculer et retourner à leur cité sans leur faire payer le tribut de leur sortie. Autour d’eux, des snagas et des Maîtres de Discipline, malmenés et mis à terre comme des sales chiens par la cavalerie des Hommes, peuvent enfin se relever et reprendre la bataille. Ou la commencer véritablement.  

Face à eux, les Hommes qui refluent reforment à la hâte les rangs, reculant dans un ordre ferme, un pas à la fois.
Même au cœur du vacarme des combats, Skulaï perçoit le claquement sec d'une arbalète. A son côté, un frère casqué stoppé en pleine course, frappé d'un carreau en plein poitrail... Skulaï tourne le regard vers le son et... Il grogne tout son mépris, empreint de frustration. Même ennemis jurés, les chevaliers de Dol Amroth ont la réputation d'être des adversaires braves et dignes. Le Prince à cheval encadré de bannières est une silhouette émaciée et hautaine qui pointe avec dédain une arbalète sur l’avancée Uruk. Se gardant du combat mano-à-mano derrière les rangs de ses hommes.  

Derrière eux, d’autres contingents lourds et moins lourds émergent à leur tour du bois, leur emboitant le pas dans le no man’s land pour venir batailler.  
Skulaï et les cinq cents Uruk-Haï rugissent comme un seul être tandis que les Compagnies des Légions chargent en rangs compacts le rempart de boucliers. Ils les brutalisent. Essayant de tourner la retraite ennemie en débâcle. Au-devant de l’assaut, les Trolls martèlent les fantassins stoïques du Gondor, qui les tiennent en respect tant bien que mal de profusions de piques et de volées de flèches harassantes.
Les volées de flèches.

Une pluie  de flèches et de carreaux de balistes Gondoriennes s’abat sur les assauts des contingents Uruk-Haï. Rappliquant à grands pas, des corps d’archers se déploient face aux défenses et commencent à en arroser de flèches les occupants. Le no man’s land tourne rapidement à la boucherie à ciel ouvert.

Sur le champ de bataille, des corbeaux morts qui pleuvaient du ciel…

En première ligne de ce foutoir, engoncé dans son armure aux arêtes arachnéennes caractéristique des Uruk-Haï des Légions, sa targe levée et brandie farouchement, Crocs Blancs Skulaï martyrise les hommes du rempart de boucliers de sa force de Troll, renversant les hommes du rang qu’il enfonce du bouclier, abattant sa hache dans les crânes de ceux qui tentent de secourir leurs camarades, si profondément que leurs têtes casquées sont littéralement déchirées et broyées jusqu’à la gorge et qu’il lui faut alors piétiner avec insistance leur cadavre pour prendre appui et déloger sa hache. La brandissant à nouveau, maculée de sang. Les hommes face à lui sont livides. Autant de piques sont amenées face à lui qu’on en déploie pour tenir en respect un Troll. A ses côtés, Wolgu, Nenag, Kronnen et Togreh rugissent et hurlent les cris de guerre de la Légion alors qu’ils frappent, enfoncent les lignes, tentent de saisir les boucliers, et les Hommes qui se retranchent derrière. Ceux qu’ils attrapent, qu'ils renversent, ils les jettent à ceux de derrière, qui les taillent en charpie de leur panoplie d'armes en tout genre, aux lames dentées de crochets cruels.
Alors qu’il pousse de tout son poids sur son bouclier, fléchi sous les coups de piques des siens, Wolgu reçoit une éclaboussure de sang noir au visage. A son côté, Togreh hurle et jure, le milieu de son visage lacéré profondément sur toute la largeur, le tronc du nez laminé. Un gars vert et casqué, Garuf, la dégage pour prendre sa place. Les crocs serrés, Wolgu la perd de vue dans la poussée. Il voudrait aider son amie dont les « Putains ! » plaintifs lui parviennent au-dessus des rangs, mais il a à faire dans la poussée.  

L’air que respire Skulaï, saturé de poussière et d’une brume écarlate mêlée de noir, empeste la fumée et le sang. Dans la cacophonie des vociférations des Sergents et des cris de guerre, les hurlements des blessés et des mourants...

Poussant à leurs côtés et marchant dans leur sillage, des fantassins Orques de l’Oeil Rouge, engeance moindre mais pouvant se montrer étonnamment imaginative, jette des projectiles incendiaires faits maison par-dessus leurs têtes, mettant le feu à des boucliers et des Hommes, qui hurlent. Certains projectiles sont attrapés et sont renvoyés sur les Uruk-Haï, qui poussent des hurlements de bêtes.
La bande du Vieux Yetch, des petits malins sous les ordres de cette mascotte increvable de la première compagnie de l’Oeil Rouge de la 18ème Légion, et de la 18ème Légion elle-même, balancent des cocons de mouches de Morgai dans la mêlée et derrière les barricades ennemies, tourmentant les Hommes de nuées de frelons de la taille d’un poing.
Des flèches pleuvent des décombres, des rangs refluant de l’ennemi sur leur poussée.
Dans leur dos, les Orques de l’Oeil Rouge se courbent parfois craintivement sous les volées et doivent être exhortés par les Uruk-Haï du Bras Disciplinaires qui les côtoient. Mais dans l’ensemble, ils serrent les dents et ripostent par des volées de flèches et de javelots.

Ce bordel bestial à base de démence collective évolue comme un spectacle de saltimbanques le long des murs d’Osgiliath à la vue de ses défenseurs retranchés qui voient les uns après les autres des détachements d’Orques sauter au-travers du fossé et entreprendre de gravir les décombres pour s’en prendre aux barricades.
Puis la poussée parvient aux abords des portes de la cité déchue.

Ce qui est bête, quand on fait une sortie, c’est que des fois, on ne parvient pas à refermer la porte.
Chaque Uruk redouble de vigueur en cet instant.
« Et la porte elle est à qui ?! demande à pleine voix une femelle Orque dans les rangs.
— Elle est à nous !!! » Scandent en cœur l’armée Orque en poussant.
Ils peuvent le faire ! Ils peuvent réussir à rentrer avant que les portes ne se referment ! Les Hommes rompent les rangs, fuient le combat la queue entre les jambes, craignant d’être laissés en arrière, que les portes se referment derrière eux. Mais non ! Ces lâches de l’armée ennemie empêchent les portes de se manœuvrer, ils les gardent bien ouvertes pour les guerriers Uruk-Haï !
Skulaï et les siens tentent de jouer des coudes pour être les premiers à s’engouffrer dans les portes, mais Merrysh et ses gars s’engouffrent les premiers, belliqueux.  

Le peloton de balistes et l’armada d’archers qui les attend de l’autre côté transforme leur assaut en bain de sang. Suivis d’une poignée des siens qui s’écroulent après quelques secondes d’agonie chancelante, Merrysh reparaît à l’extérieur prostré sur le bas-ventre, un javelot de baliste qui le traverse. Ses crocs serrés vomissent des filets de sang noir. Des murs, un archer ennemi décoche une flèche enflammée aux abords de la porte qui met le feu à une tranchée de poix cachée, sabre ardent de titan qui pourfend dans une élévation de flammes la tête de cortège, et qui transforme l’entrée d’Osgiliath en rôtissoire d’Uruk-Haï mourants.
Derrière le brasier, les portes leur se referment lourdement.




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Message par Karess Jeu 2 Mai - 23:49

III : Les Uruk-Haï




On leur avait fait injonction de se vider la vessie avant d'aller au combat. Qu'ils ne décrédibilisent pas leur camp en se souillant devant l'Ennemi. Dans son cas, c'est loupé. Il s'est pissé dessus, même s'il a un millier d'autres choses en tête. Alors qu’il rampe, s’efforce de se remettre sur ses pieds en battant l'air de sa planche, malmené par les mouvements de masse, les poussées ennemies, une flèche enflammée a embrasé les fourrures d'un Maître de Discipline à son côté, comme une jarre de poix. Comme si ce fumier cherchait à l’emporter avec lui ; il s’est jeté sur lui en partageant son feu, hurlant et l’agrippant de ses gros bras. Le temps que l’enfant Orque le dégage à coups de planche, le feu a eu une emprise partielle sur ses loques pour le dévorer de ses dents crépitantes et brûlantes. En frappant, sa planche cloutée s’est transformée en torche.
Ironiquement, c’est brûler vif qui lui a sauvé la vie au milieu de cet abattoir.
Autour de lui, des essaims de piques de cavaliers, d’épées de peaux-roses encagés dans du métal, qui embrochent les gars de sa Cohorte, sonnés, paumés à terre. Les clouant sur le sol.
Comme des pavés pour cette putain de route en forêt. Ses camarades n’opposent aucune véritable résistance.
Lui, alors qu'il se retrouve isolé, que le feu qui lui embrase l’épaule et l’arme tient en respect les Hommes face à lui, l’enfant Orque est face à deux options. La première, c’est d’abandonner et de mourir comme tous les autres. La seconde, alors qu’on l’attaque, c’est de frapper, de fracasser, de trancher, de mordre, et de tout faire pour se tirer de ce mauvais, mais vraiment très. Très. Mauvais. Pas. Il se jette contre des boucliers, fouette l'air de son arme face à un assaillant qu'il fait reculer, puis un autre. Des armes reviennent le frapper à bouts de bras, et dans le dos, des coups malhabiles qui lui heurtent le cuir et les flancs. Les poings gantés des hommes qu'il assaille de sa rage de vivre le cognent et le repoussent, le jettent au sol en le déséquilibrant. Il virevolte alors vers un autre adversaire. Sans en démordre. Sa planche cogne et pète des dentitions, des pommettes sur les visages. Ses clous se fichent dans des joues tendres, que le feu cloaque.
Il a l’impression qu’une vie entière s’écoule à danser avec le feu et à se faire frapper sans s'arrêter de rendre les coups.
Puis les colosses en armures des Légions surviennent, brisant la nuée d’ennemis en argent autour de lui. Le faisant lui-même tomber à la renverse aux côtés de ses ennemis.


L’un des Légionnaires Uruk-Haï, un vieux gars à la calvitie terne et au cuir sombre qui couvre son visage jusqu’au nez sous une écharpe, rapplique au-dessus près de lui :
«Roule-toi au sol, triple con ! Lui aboie-t-il au travers de son écharpe. Roule-toi au sol ! Ou préfères-tu rôtir ?»
L’enfant Orque s’exécute frénétiquement, le feu sur lui s’atténuant tandis qu’il roule, le vétéran l’aidant à se débarrasser de ce qui est propice à brûler sur lui.
C'est-à-dire pratiquement tout ce qu’il portait sur le haut. Même son putain de casque brûle sur un côté. Le vétéran lui cisaille la sangle pour l'aider à lui en libérer la tête.
Ce qui lui donne pleine vue, odorat de la guerre. Goût de sang aussi. Et audition, ponctuée du martèlement vigoureux de l'otite dans ses oreilles.
« Aller p’tit gars ! Relève-toi ! » L’enjoint-il en lui tendant l’épée d’un ennemi.
Serrant les dents, la douleur cuisante dans les chairs, l’enfant Orque troque sa planche calcinée pour empoigner l’épée et se remet debout, emboîtant le pas du gars qu’il connaîtra plus tard sous le nom de Yazho « Gueule-de-Mort », un surnom que celui-ci ignore qu’il est sur le point d'acquérir.
« Aller, viens avec nous, mon p’tit gars ! On va les avoir !» L’encourage le vétéran en partant soutenir la poussée.
L’enfant Orque plonge à sa suite dans cette fureur collective, ces Cohorte de grands Orques lourdement armés qui déboulent de toutes parts, qui poussent en rugissant à pleins poumons, les armes brandies au-dessus des têtes, battant le vent.

Ça martèle dans ses oreilles avec une puissance égale à celle des tambours des Légions, se calquant sur leur cadence lourde.

L’enfant Orque colle le vétéran tant bien que mal, marchant dans ses pas parmi des guerriers dont il n’arrive pas aux torses d’acier. Les imitant dans leur manière de brandir son arme haute et dans leurs cris de guerre époumonés. Au milieu d'un tel foutoir, l'enfant Orque perd rapidement le vétéran dans la poussée de la horde, et des membres d'acier le bousculent, le compressent de toutes parts.
Une volée de projectiles démesurés empale les guerriers qui l’entourent, le ceinturant de cadavres qui viennent s’effondrer contre lui. Soudain, alors qu’il tombe à la renverse sous le poids des corps, les Uruk-Haï autour de lui refluent brutalement.
Eux, aucun Maître de Discipline demeuré ne va venir les contraindre à rester se battre jusqu'à la mort.
L’enfant Orque se cabre parmi les corps, priant de ne pas se faire piétiner par les colosses en armures de plates qui fuient en masse et à grandes enjambées les volées meurtrières. Tandis qu’il parvient à se relever parmi les derniers en fuite, il voit le brasier au loin qui a brisé l’assaut. L'enfant Orque suit le mouvement en geignant, s’efforçant de ne pas être renversé à nouveau et laissé en pâture aux archers…

***

L’assaut des Uruk-Haï reflue sur le terrain vague dans des cris, jurons et vagissements. Ils n’ont pas pris la porte et les barricades assaillies font s’ébouler des fantassins morts et blessés sur leurs pentes de débris. Atterrissant  dans les fossés, ils demeurent à l’état de masses inertes, comme endormis. Face aux murs, les corps d’archers Orques font feu de tous leurs arcs, couvrant la vague en repli qui se déverse entre leurs mantelets.
Admettant l’échec de cette tentative dans des grondements ruminants, Skulaï et les siens suivent le mouvement, regagnant le cœur de la plaine devenu le point de ralliement. Là, parmi les catapultes qui sont amenées, mises en ligne au cœur du terrain vague pour préparer le bombardement d’Osgiliath, les blessés sont rapatriés aux médecins, qui se regroupent en une infirmerie improvisée dont le but premier est de réhabiliter les blessés légers le plus rapidement possible pour leur permettre de reprendre le combat, quitte à les droguer. Les cas les plus graves sont mis de côté et triés entre ceux qui peuvent être sauvés et ceux que l’on peut d’ores et déjà oublier.

Alors que Wolgu et Nenag s'attardent parmi les blessés à la recherche de Togreh, Skulaï la trouve en train de se faire suturer le faciès à l'arrache par Unriirt, un autre Uruk de la section, un guerrier svelte et athlétique à la peau d'un marron roussi striée de peintures de guerre écarlates, la mâchoire comme une enclume, et une tignasse noire derrière ses grandes oreilles pointues. Aussi habile pour les sutures que pour le maniement des armes de jets.
La grande Orque noire souffle entre ses crocs serrés en réprimant ses geignements.
« J'endure, Sergent-chef ! » Lui adresse Togreh dans un souffle éprouvé. J'peux endurer... Gn... J'vais pas vous lâcher...»
Skulaï hoche la tête d'assentiment. Il n'en doute pas, quand bien même il s'en souciait vraiment... Mentalement, tout son être ne se préoccupe que de deux choses : percer les défenses. En tuer les défenseurs...

***

Deux autres mouvements de masses échouent à perforer la cuirasse du Champ-de-Décombres pour en pénétrer les entrailles urbaines. Chacune des vagues d’assaut se précède d’un bombardement en quantité de boules de feu par les catapultes manœuvrées par des servants Orques et Trolls.
Des boules qui frappent les remparts et tout proche des barricades, qui passent au-dessus des défenses pour s’abattre dans le Champ-de-Décombres…
D’épaisses fumées s’élèvent ça et là au-dessus des défenses. Quand ils montent à l’assaut en s’époumonant, des volées de flèches enflammées volent dans le ciel noir de la nuit au-dessus de sa tête. L’enfant Orque a la sensation de faire partie d’une vague de feu, de viande et de fer qui s’abat sur un rempart de pierre, puis reflue, pour revenir s’y rabattre de plus belle. Entre les lignes des siens et le Champ-de-Décombres, le terrain vague est parcouru de cris et de geignements de blessés, qui lui parviennent distinctement, en dépit des vociférations des chefs Uruk-Haï et des soldats qui les couvrent.
A chaque fois, l’enfant-Orque charge dans le sillage du contingent d’Uruk-Haï du vétéran qui l’a sauvé du feu, qu’il a aperçu et rejoins alors que celui-ci reculait pour se rallier à sa Compagnie. Le vétéran n’a pas tout de suite réalisé quel animal de compagnie il s’est fait, le suit où qu’il aille, dévêtu de ses loques à moitié carbonisées, dévoilant les chairs cloquées de son omoplate et de son cou alors qu’il va maintenant torse nu…...
« On dirait que tu t’es fais un animal de compagnie, Yazho… » Lui fait remarquer une épaisse guerrière aux teints, yeux et cheveux pâles, entre deux assauts. Le ton moqueur. Sans comprendre tout de suite, Yazho se retourne et regarde vers ses jambes, voyant alors le marmot brunâtre qui lui colle les arrières…
« Schrak ! T’es encore là toi ? Et toujours en vie en plus ! Trouve-toi un bouclier et reste près de nous, si tu veux que ça continue. Eh les gars, vous avez un truc pour apaiser ses brûlures ? Le p’tit gars doit souffrir le martyre... »
L’enfant Orque marmonne timidement qu’il va bien, mais sa voix est couverte par l’intervenant suivant :
«Des clous ! Grogne un gros Uruk au cuir rose tanné et au pif rond, d'une voix geignarde. Un p’tit rat de snaga, ça n’a rien à foutre parmi nous ! Renvoie-le à la plus proche Cohorte !
— Il a survécu à la mêlée de l’encerclement ; il se battait férocement, le corps en feu tel le Balrog ! Plaide Yazho…
— Content pour lui. Ça reste un p’tit rat de snaga qui n’a rien à foutre avec nous...
— Ouais ! Qu’un ssnaga ! » Fait écho un grand Uruk à peau orange derrière Pif rond, que l’enfant Orque identifie immédiatement comme un suiveur…
«J’te savais pas aussi lèche-cul du Bras Disciplinaire, Sergent…» Le pique sarcastiquement la guerrière.
— Va te faire foutre, Baeshra ! Lui crache Pif rond sans rire… Le Bras Disciplinaire, j'lui pisse dessus ! Ça c'est une question de respect pour l'engeance...»

Pif rond alpague un colosse au teint de cendres et à la chevelure de pierre qui passe d'un pas lourd.
«Mon Commandant ! Ce snaga, là, il colle à notre section, il gêne les manœuvres ! Vous voulez pas faire rappliquer un Maître de Discipline, qu’il nous le ramène dans sa Cohorte ? »
L’enfant Orque tente de bafouiller que sa Cohorte est décimée et qu'il fera tout ce qu'ils lui diront de faire, mais la manière dont le Commandant a pris la peine de se retourner a renfoncé les mots au plus profond de son ventre. Son visage est amputé de lèvres, exhibant ses rangées de crocs serrées, le rendant terrifiant. Le Commandant écrase Pif-rond d’un regard blâme :
« Qu’est-ce que j’en ai à foutre de votre snaga, Sergent Thurgix ? Crache-t-il entre ses dents. Le monde entier n’en a rien à foutre de votre snaga ! On dénombre mille cinq cents pertes dans ce putain de champs, mon bataillon pas loin de deux cents, et n’est pas foutu de percer de stupides barricades ! Vous avez fini de rallier vos gars ? Alors remettez-vous en rangs derrière le cul du plus proche Troll, et rentrez dans cette putain de cité !»
Sur ce, il plante Pif rond là où il est, retournant à ses considérations de Commandant…
« Schrak, peste Thurgix… Eh bien, vous autres ! Vous avez entendu l’Patron ? Restez pas plantés là, on s’remue ! Allez ! Oh Seigneur, Vargach, tu gaspilles vraiment de ta graisse pour soigner un snaga ? On marche sur le cul… »
« Te mets pas dans mes pattes ! Sinon j’te tue moi-même ! » Lui adresse dans un souffle le suiveur orange en passant à côté de lui, suivant Pif rond.
« Quand il est grognon comme ça mon p’tit gars, ça veut dire qu’il t’aime bien, lui confie Yazho. Entre nous, on l’appelle le Mignon… Pour son pif, tu vois. L’autre, c’est Ourykh. Lui, il t’aime pas, mais le prend pas personnellement : il aime personne.»
A quelques pas de leur troupe, l’enfant Orque repère un Maître de Discipline, trop affairé à brutaliser les Hommes captifs pour se soucier de lui.    
« Tu baisse les yeux, toi ! Ta mère a p’têtre pas fait ton éducation, mais nous on va la faire ! » Grogne-t-il en pointant un brûleur devant un visage rose...


Dernière édition par Karess le Ven 14 Juin - 21:28, édité 14 fois
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Message par Karess Dim 5 Mai - 20:43

BO:


IV : Des pentes de corps morts

Quand ils s’apprêtent à monter à l’assaut, alors qu’ils se déversent tout autour d’eux, les contingents de fantassins, Uruk-Haï, Orques de l’Oeil Rouge, battent de leurs poings les flancs cuirassés des Trolls, les flancs de bois des catapultes... C’est un rite silencieux et solennel dans lequel les humbles piétons signifient leur confiance, leurs espoirs de survie dans la force des monstres et dans le soutien rocailleux et embrasé des machines qui font front à leurs côtés. Parfois, il arrive qu’un Capitaine, un Champion de l’armée Orque, voit les poings battre de manière similaire sur son armure. Un grand Colosse vert respecte ce rite, s’imprégnant du roulement cacophonique et métallique.  
A un contingent de là, un enfant Orque imite ses cousins Uruk-Haï. Calque le martèlement de ses poings sur celui de son otite.





Telle une vague de feu, de viande et de fer qui s’abat sur la face du Champs-de-Décombres. Dans la noirceur de la nuit, les innombrables silhouettes sombres des fantassins Orques s’élancent au-delà des mantelets, trop nombreux pour les flèches qui fauchent leur dû dans leur charge. Des silhouettes qui sautent au bas du fossé, qui le traversent à rudes enjambées, ou recourbées pour certaines, piétinant les monticules de cadavres de leurs camarades et prédécesseurs. S’aidant de leurs mains, ils gravissent tant bien que mal ces pentes de débris, de braises incandescentes et de corps morts qui mènent aux barricades.
Talonnant Yazho et sa bande, l’enfant Orque traverse le fossé et vient se blottir à leurs côtés contre le vestige de rempart opposé. Jouant les héros au devant des troupes en ascension de la pente, il voit un archer suicidaire au visage peint de noir-néant et d’écarlate gravir la pente en solo, au pas de charge, grognant, encocher, bander, décocher une flèche, avant de se faire clouer le torse de trois traits, qui le raidissent et le font retomber en dégringolant la pente, s’écrasant dans le fossé où les Uruk-Haï le piétinent.
De l’autre côté du fossé, parmi les Uruk-Haï à l’assaut, l’enfant Orque voit un fantassin Orque qui se tient droit, les bras en croix, des crânes d’Orques et de boucs pendant à des ficelles entre ses mains, subjugué par une transe…
« Kaareeeeesssssss ! Le Grand Karess Règne ! » Éructe-t-il, jubilant…

Et ils me connaîtront…  

Prenant une grande inspiration, son bras armé battant la poussière, l’enfant Orque s’élance dans le sillage de la bande de Yazho, à l’assaut de la barricade !
S’appuyant à maintes reprises à la pente pour ne pas se vautrer dans son ascension, sa main prend parfois appui sur des prises organiques. Tâte la dépouille emplumée et tiède d’un corbeau mort.
Par un triste coup du sort, il se retrouve à épauler Pif rond, celui que Yazho a appelé "le Mignon". Que le colosse aux lèvres amputées a appelé "le Sergent Thurgix". Derrière lui, le Suiveur s'efforce de suivre le mouvement. L’enfant Orque sauve ce dernier malgré lui d’une volée de trois flèches qui allait le faucher de flanc et que son mouvement de bouclier a bloquées en vol, mais Ourykh est trop obnubilé pour le noter.
Arrivés au-devant de la barricade, les guerriers Uruk-Haï, présentant leurs boucliers à l'Ennemi, élèvent des javelots de leurs autres mains, qu'ils jettent sur les Hommes avant de déguerpir pour céder la place aux suivants. Certains, jettent des bombes incendiaires au lieu des javelots. L'enfant Orque tremble tandis que de tels projectiles lui passent par-dessus la tête. Tous n'attendent pas d'arriver en haut et devant pour jeter leur projectile et tirer la lame.
En haut, le vétéran Yazho élève son javelot qu'il s'apprête à jeter.
Un projectile similaire lui est renvoyé de plein fouet dans le visage.
L'enfant Orque se tétanise de voir le vétéran se retourner sous l'impact, plié de douleur. Chanceler en arrière. Les siens qui accourent pour le soutenir. Son écharpe arrachée de son faciès, il aperçoit la partie inférieure de la mâchoire du guerrier, arrachée. Les gars qui le font redescendre par le côté, appuyé contre le rempart, alors que l'inconscience le gagne à grands pas...
« Bouge-toi, limace ! » Grogne Ourykh dans son dos, le secouant, le poussant à aller de l'avant.

L'enfant Orque s'efforce de gravir mécaniquement la pente. Au côté de Pif rond, l’enfant Orque parvient face à la barricade. Se couvre vivement du trop large bouclier d’Uruk qu’il a trouvé, jette le javelot qu’on lui a donné sur un Homme retranché derrière son bouclier. Se heurte sans résultat à sa défense. Mais celui d'à côté, sur la même défensive, parvient lui malgré tout à se manger le javelot de Pif rond en pleine tête, embroché au niveau des yeux. Tombe à la renverse. L'enfant Orque n'a qu'entraperçu la scène, commencé à déguerpir, cédant la place au Suiveur qui arrivait en le poussant hors de son chemin, quand il réalise que Pif rond a tiré la masse et attaque frontalement la barricade.
« Kaareeeeeessssss !!! » Braille Thurgix en assaillant la barricade.
« Schrak ! Thurgix y est allé ! » Grogne la femelle pâle en faisant revenir la moitié de la bande de Yazho. Ceux-ci tirent leurs lames et reviennent à l'assaut.

L’enfant Orque ne les a pas attendus, revenant batailler par-dessus les défenses ennemies. Porter des coups frénétiquement sur le bouclier du salopard le plus proche.
A son côté, Ourykh s'est tassé à genoux contre la barricade en jurant, tirant son épée, se préparant à passer à l'assaut. Il donne un peu l'impression de vouloir se planquer pour se garder de se suicider comme un imbécile en première ligne, ce qui est la conduite la plus autonome et peut-être la plus intelligente qu'il ait manifesté jusqu'ici.
Dans leur dos, des gars leur hurlent d’arrêter de faire les cons, de n’pas bloquer la manœuvre.
D'autres au contraire jubilent et s'empressent de se débarrasser de leurs javelots dans un jet à l'aveugle pour tirer leurs propres lames. L'enfant Orque, il tente de faire comme Pif rond et de se hisser sur la barricade pour en martyriser les défenseurs retranchés de toute sa hauteur.
Ce qui aurait été moins impressionnant avec lui qu’avec le gros Sergent Uruk dans tous les cas.
Des javelots sont jetés de derrière eux, leur volent autour pour meurtrir et cogner sur les rangs d'Hommes en argent. Dans un dédain manifeste, l'un d'eux vient tenter de le repousser. L’enfant Orque résiste, pointe son épée et pique, la lui plantant en pleine tête. Horrifiés, ses semblables redoublent de hargne pour dégager l’enfant Orque, qui perd prise sur le pommeau de son arme plantée dans la tête ennemie. A son côté, le déluge de coups qui frappent sur l’armure de Pif rond le font lui aussi basculer en arrière.
Tous deux dégringolent la pente parmi la troupe, faisant retomber plusieurs gars en bas dans des grognements rageurs. Ou simplement de surprise hébétée.
«Mais merde ! A quoi vous pensiez, Sergent ? » Demandent plusieurs Uruk-Haï casqués à Pif rond,  qui se secoue pour reprendre ses esprits et se remettre sur ses genoux... Alors que la tête leur tourne encore, retentit alors du sommet de la pente adjacente le grondement tonitruant de ce même cri de guerre : « Karess !!! ».
« Crocs Blancs est entré ! S’écrie un porteur de bannière. Il a pris la barricade à lui tout seul ! Avec lui les gars ! »
Thurgix observe les yeux noirs de jalousie. Il n'a même pas conscience de la terre qui tremble, des pas du Troll qui émerge des ténèbres derrière lui, chargé de faire le boulot dans sa brèche…


***


A dire vrai, tout le mérite ne revient pas à Crocs Blancs Skulaï, mais comme dans toutes armées, la part du lion des honneurs revient aux champions et aux troupes d’élite qui combattent en premières lignes. Derrière la barricade, le goulot défensif s’apparente à une antichambre de l’enfer. Des boules de feu de catapultes qui ont bien frappé et qui embrasent le goulot. Des cadavres broyés et calcinés qui jonchent leur sillage. De toutes parts, des boucliers embrasés par les jets de projectiles incendiaires, dont les porteurs hurlent et paniquent. Des Hommes eux-mêmes qui prennent feu. Leurs cuirasses en feu. Leurs pantalons…
Sans compter les javelots qui ont frappé et frappé et meurtri les boucliers sur toute la rue, les rendant encombrant et alourdis. Et les mouches de Morgai jetées par les Orques de l’Oeil Rouge qui saturent l’air, tourmentant les Hommes...
Ceux qui s’efforcent de tenir des rangs compacts s’incendient mutuellement. Bon nombre de soldats sont des jeunes en pleurs au milieu de l’enfer, découvrant le vrai visage de la guerre…

Crocs Blancs Skulaï  hurle le nom de l’illustre Berserker de la 18ème Légion en franchissant la barricade et son cri est tel le rugissement de Balrog aux oreilles des Hommes du Gondor. Targe en avant, il charge droit sur l’Homme le plus proche au bouclier embrasé et le choc produit une gerbe de flamme infernale. L’Homme roule à terre aux pieds de ses camarades qui trébuchent face à lui.
Plusieurs battements de coeur, il est seul face à six putains d’Hommes en carré défensif, et c’est à peine s’ils osent pointer épées et lances sur lui ou s’ils daignent aider leur camarade à se relever.
Dans son sillage, les gars franchissent la barricade en rugissant et la Cohorte d’Uruk-Haï en armures joint ses boucliers au sien. Ils avancent en grognant et entrechoquent leurs boucliers à ceux des Hommes du Gondor en chantant triomphalement, les faisant reculer et mourir dans les larmes et les incendies. Leur poussée soutenue par des camarades qui poussent et frappent de leurs lances dans leurs dos par-dessus leurs épaules. Sous leurs boucliers. Les vociférations des Sergents et les cris rauques du vieux Yashnarz qui couvrent occasionnellement le chant. L’ombre de la bannière de Section ornée des crânes de leurs défunts, brandie dans leur sillage.  
« Nos ancêtres nous regardent et sont fiers ! » Jubile Togreh, la guerrière poussant sur son bouclier…
En première ligne, leurs propres boucliers se heurtent à des boucliers embrasés et le feu se propage à leurs protections. Ils ricanent et hurlent comme des loups et élèvent à l’unisson les boucliers plus haut, cognant les casques des soldats ennemis de cet incendie qu’ils brandissent de l’avant.
L’Ennemi tente de rompre l’engagement, mais chaque fois les Uruk-Haï les assaillent sans leur laisser le moindre répit, les poussant encore et encore. Dans leur sillage, les arrière continuent de jeter des javelots et des cocktails incendiaires.
Face à Skulaï, l’Homme qui lui tient tête est toujours le jeune qu’il a jeté à terre au début de l’engagement. Alors qu’il lui tient désespérément tête bouclier contre bouclier, reculant par à-coups sous la pression de Crocs Blancs, le camarade de derrière le jeune au bouclier en feu lui cogne contre lui et lui embrase les cheveux derrière. Le jeune hurle et s’effondre tandis que sa tête commence à griller. Skulaï le piétine sur sa cuirasse encore hurlant et gigotant, sans rompre la Cohorte, imité des gars qui suivent.    
Dans leur sillage, ils coupent des paumés ennemis de leur camp. Des Hommes trop hébétés, trop terrorisés pour se battre et qui sont prostrés au milieu des brasiers en suppliant en larmes pour leur vie. Dans leur sillage, les frères de la Cohorte les égorgent sans pitié.
Quelque part devant, un cor ennemi sonne le repli et les soldats ennemis, malmenés et tourmentés, ne se font pas prier de rompre les rangs, pourchassés par les Uruk-Haï de la Cohorte qui hurlent de jubilation.
Soudain, deux balistes ennemies qui claquent. Au côté de Skulaï, l’Uruk Pippinsh voit son ventre traversé d’un javelot dans une giclure de sang.
Derrière lui, les javelots ont frappé la Cohorte à travers le goulot et semé la mort dans des giclées de sang noir et une cacophonie de râles d’agonie.
Et les sergents hurlent à la volée. Braillent de lever les boucliers. Face à eux dominant les hauteurs de la place, les archers ennemis leur lâchent des volées, les obligeant à interrompre la chasse aux fuyards pour reformer les rangs. Exposé au-devant de la Cohorte, Pippinsh est tétanisé sur son ventre béant, tombant à genoux…
« Comme je t’envie, Pippinsh ! Clame Togreh au côté de Skulaï. Ton nom sera synonyme de la Chute d’Osgiliath ! »
Ayant récupéré arcs et javelots sur les défenseurs morts de la brèche en bons charognards, la bande de tirailleurs d'Unriirt prend pour cibles les servants des balistes et les archers, leur rendant la monnaie de leur pièce.
Alors que Pippinsh s’évanouit, la Cohorte repart à l’assaut frontal. De l'arrière, les gars font remonter l’alerte de l'ascension du Troll de la Compagnie. Le temps que la bête géante vienne se tasser sur la barricade et s'élance à grands dans le goulot d'étranglement, Skulaï et les siens ont déjà percé et creusent un sillon sanglant au cœur de la place, qu'ils ouvrent à l'arrivée en masse de leurs congénères, Autour d'eux, de plus en plus de soldats ennemis se font hésitants.
Deux. Puis trois, cèdent à la peur.
Contagieuse. Sous les invectives vaines de leurs meneurs les plus braves, les Hommes rompent les rangs et s'enfuient, pris en chasse par le Troll, et par le front du torrent d'Uruk-Haï en armures et de fantassins Orques qui s'élancent pour prendre la place.
Laissant leurs braves meneurs face au colosse vert.
Des hauteurs des ruines, les archers et servants de balistes encore en vie s'empressent de quitter les étages pour pouvoir fuir. Unriirt et ses gars s'élancent au-travers de la place, gravissent le niveau surélevé en bavant de rage, sprintent vers les escaliers pour venir à leur rencontre...
Deux Hommes parviennent à leur filer vivement entre les doigts et à courir avec une performance de Wargs lancés à la charge. Les autres reculent craintivement dans leurs ruines face à Unriirt et ses gars. Se voient décrire dans les détails les plus sordides ce que les Uruk-Haï comptent leur faire tandis qu'ils gravissent les escaliers, les pentes de décombres, pour venir les prendre...
 
Contre le mur d'un hall ténébreux d'une ruine étriquée, Skulaï embroche le Capitaine ennemi, qu'il regarde mourir les yeux dans les yeux. L'Homme était brave et combatif. D'une capacité martiale passable, mais Skulaï le respecte sincèrement pour ne pas avoir tourné les talons. Aussi l'a-t-il entraîné à l'écart pour se ménager un duel. Il Rugit sur l’entrée en trombe Togreh, qui rentrait en trombe dans la ruine, lui interdisant de venir trucider l’Homme de manière déloyale.
« Paix, Crocs Blancs ! Tu peux le manger tout entier, j'te le laisse !» La guerrière balafrée quitte les lieux. Skulaï ne la regarde déjà plus. Dans l'ombre de la ruine, se tient sereinement l'un des chamans aux crânes de boucs fanatiques du Grand Karess...
« I'a, Karess....» Salue-t-il avec amusement et douceur cynique. Skulaï lui retourne un hochement de tête convenu. Déclouant le Capitaine du mur en retirant de ses entrailles l'épée de son propre peuple, celui-ci s'affaisse en rendant son dernier soupir. Skulaï ressort de la ruine et rallie les siens, flanquant le flot d'Orques du lieutenant Yashnarz qui se déverse dans les rues d'Osgiliath la Souillée...


***


Ils n'ont pas pris la barricade par la force mais parce que ses défenseurs l'ont cédé d'eux-mêmes, contraints de battre en retraite suite à la percée de Skulaï sur leur flanc. Cette perspective met Thurgix en rogne, qui charge la retraite ordonnée des Hommes aux côtés de son Capitaine Eggha, un gros lard jaunâtre venu combattre en première ligne.
Le rocher qui vole dans leur dos à travers les airs broie et renverse autant d’Orques que d’Hommes du Gondor, manquant de peu l'officier de la compagnie et Thurgix avec. Rompant momentanément le combat dans le goulot d'étranglement...
Continuant à cogner les Hommes secoués par le lancer de roc aux côtés de Pif rond, l’enfant Orque se fait agripper par le gros Sergent grincheux, qui le rabat avec lui sur le côté.  
Frénétiques et paniqués, les archers ennemis abattent une pluie de flèches de toutes parts sur le Troll en approche. Des piqûres d’insectes. Ricochent sur ses épaisses protections.
Puis les machineries claquent et les projectiles viennent perforer l’armure et les chairs du Trolls de toutes parts, faisant vomir du sang au monstre.
Puisant dans ses dernières forces, le Troll parvient à grandes enjambées au milieu de la piétaille humaine,  qui se débande à son approche. Il balaie férocement le sol de son marteau d’acier colossal, éparpillant les Hommes qui volent à l'état de sacs de viande broyés, qui s'écrasent contre les façades déchues des ruines environnantes. Expirant lourdement, le Troll s’écroule face contre terre.
« Tu t'soucies de lui maintenant ? » Relève Ourykh en rappliquant accroupi derrière eux, surpris de voir Pif rond sauver un marmot.
« Il peut faire d'un bon bouclier de rechange ! » Ironise Thurgix en lâchant l'enfant Orque. Leur trio s'immerge dans le flot d'Uruk-Haï, remontant à la charge.
Un corps à corps acharné éclate entre les deux camps autour de sa carcasse sur la place… Des Uruk-Haï, des fantassins de l'Oeil Rouge, et même une Cohorte Disciplinaire, qui s'est reformée dans leur dos, poussée par un Maître de Discipline et ses aides Uruk-Haï, combattent mélangés...
Émergeant d'une artère sur le flanc de la rue que tiennent les Hommes, une vague d'Uruk-Haï de la percée de Skulaï déboule en rugissant, venant les aider à dégager les lieux. Thurgix l'a définitivement mauvaise contre son rival...
Les contingents de réserves de l'Ennemi qui arrivent dans l'espoir futile de contenir la percée le consolent pour partie : il va pouvoir se défouler en sur bien des crânes et des côtes...
Deux minutes de lutte qui suivent autour de la carcasse du Troll, de gorges tranchées appartenant à des camarades familiers plus ou moins appréciés de Thurgix, dont celles du Lieutenant ainsi que du Capitaine Eggha, les Hommes refluent dans les sons de cors. Derrière lui, le p'tit Adjudant Lerüg hurle aux toubibs en s'efforçant d'appliquer lui-même les premiers soins au Capitaine contre la carcasse du Troll.
Ralliant ses gars, Thurgix se désintéresse du carnage pour mener les troupes de sa Cohorte de l'avant.


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Message par Karess Mar 7 Mai - 21:48

V : Optimisation tactique



Le plan d’invasion à la suite de la percée des défenses d’Osgiliath est d'une simplicité rudimentaire : avancer tout droit, le plus rapidement possible, pousser jusqu'au pont afin d'en couper la retraite à ses défenseurs. Partout à leurs côtés et derrière eux, les contingents d'Uruk-Haï avancent en rangs au pas de course, remontant les allées déchues d'Osgiliath, évoluant à pas lourds parmi ses bâtisses aux façades éventrées, les Trolls élargissant encore les passages en enfonçant les murs de leur masse corporelle en armure et en y balançant belliqueusement leurs marteaux, faisant pleuvoir la poussières et des débris sur les petits bonhommes en armures qui progressent dans leur sillage. Face à eux, les contingents ennemis s'efforcent de reformer des rangs pour leurs positions de repli, tenir tête à leur avancée, leur faire payer le tribut de sang de leur avancée. Quand leurs capitaines sont tués, le tribut n'est pas bien cher.

Dans cet enfer rampant de confusion et de feu, il lui semble percevoir le claquement distant d’une arbalète…
Des boules de feu pleuvent de toutes parts autour d'eux. Sur leurs flancs pour la plupart, mais certaines passent au-dessus d'eux pour partir détonner au-devant de leur avancée. Une armée Orque ne cesse de pilonner et pilonner encore une cité, même quand ses troupes y progressent. Elle ajuste simplement ses tirs, visant de plus en plus loin, rectifiant ou revenant à plus courtes portées sur instructions rapportées par des messagers du front.
Les tirs fraternels sont monnaie fréquente, mais Skulaï et les siens savourent cette ambiance de destruction, ces brasiers ardents qui flanquent et précèdent leur avancée tels des contingents de feu. Si les Légions sont une institution du Mordor valorisant la Discipline et le professionnalisme, les Orques qui les composent n’en conservent pas moins leur affinité naturelle au Chaos. L'avatar du Grand Karess au sein de la 18ème en est un bel exemple.
Face à eux, les Hommes cèdent toujours plus de terrain, d’allées et d’antiques demeures de leurs ancêtres, dans de vaines tentatives de se reformer, de remettre de l’ordre dans le Chaos qui s’abat sur eux de plein fouet. Des engagements brutaux, brefs et bestiaux aux termes desquels ils cèdent à la confusion et à la peur, en dépit de toutes leurs réserves.

En tout cas, c’est ce que croit Skulaï toute sa percée en longueur de la cité.
Jusqu'au Charnier...

***


[An Orc Story - Univers Seigneur des Anneaux] - Premier Sang pour l'enfant Orque Lieute11


« Formation, Halte !!! Aboie Pif rond. Halte en tête, Halte en queue !»

La section d'Uruk-Haï et de militaires Orques des Légions, et à leur côté les rangs de la Cohorte, s'arrêtent sans comprendre. Figé sur place entre les groupes alors qu'il empoigne encore l'enfant Orque, le Maître de Discipline à la tête de la Cohorte tourne un regard de surprise et d'incrédulité à Thurgix, du moins tel doit être son regard sous son heaume fermé. A son côté, l'enfant Orque tape vainement du pied contre sa jambière, tire en arrière dans sa poigne ferme en tentant de se dégager de l'emprise du Maître.
L'enfant Orque est toujours en vie, même après avoir combattu en première ligne d'une mêlée aux côtés de Pif rond. L'adrénaline le fait vibrer, mais pas de peur. C'est une douce saveur martiale de maîtrise de sa peur qui pulse dans ses veines, une peur qu'il convertit en une transe brûlante et guerrière qui lui permet de se jeter dans le combat en adulant l'idée qu'une lame va peut-être le traverser et lui faire quitter la vie en guerrier, au lieu de l'intimider comme un avorton snaga.
L'enfant Orque savourait cette sensation, cette confiance qui le faisait marcher d'un pas ferme aux côtés des puissants Uruk-Haï.
Accessoirement, elle lui permettait d’oublier la douleur cuisante dans sa chair sur son dos et son cou cloqués.
Quand les grosses paluches d'un Uruk du Bras Disciplinaire sont venues le ceinturer et le sortir du rang de ses nouveaux camarades. L'enfant-Orque ne veut pas retourner dans la Cohorte. Il n'est plus un snaga ! Il n'est plus un snaga ! Hurle-t-il en sentant les larmes lui venir. Il a tenté de frapper l'Uruk de son épée, mais le Maître de Discipline lui-même est intervenu en renfort de son suivant pour la lui faire perdre des mains et le tirer vers la Cohorte...
« Qu'est-ce que vous faites, espèces d'abrutis ? Grogne le Maître de Discipline aux Légionnaires. Une voix étrangement suave sous son casque, même aigrie… Il nous faut avancer avec vitesse pour couper la retraite aux forces de l'Ennemi !
— J'y travaille, justement, assure Pif rond avec une hostilité ouverte en se dirigeant vers lui. J'optimise mon détachement pour une meilleure efficacité.»

Dans la mêlée, le Capitaine de la Compagnie de Choc, Eggha, a été frappé d'une larme qui lui a causé une estafilade en plein gosier, ce qui le cloue assis par terre dans le goulot d'étranglement de la brèche, où des toubibs s'efforcent de lui éviter de se noyer dans son sang. Le Lieutenant est clamsé, l'Adjudant Lerüg est resté aux côtés du Capitaine où ses compétences d'infirmier se sont avérées salvatrices pour son supérieur.
Ce qui fait actuellement du Sergent Thurgix « le Mignon » l'officier supérieur du détachement. Un contingent régulier aurait déjà vu son Maître de Discipline attitré prendre le commandement, mais un contingent d'Uruk-Haï des Troupes de Choc n'est pas animal aussi docile, et tout particulièrement celui du Sergent Thurgix, qui compte bien envoyer valdinguer dans la poussière l'épée de Damoclès qui pèse au-dessus de sa tête avec toute sa subtilité non-règlementaire...

« Y a un truc que j'voudrais clarifier, Maître : C'est quoi vos attributions ?
— Je... J'encadre cette Cohorte ; je me charge de les mener au combat et de punir les lâches qui se débandent et qui refusent d’avancer, répond-il hagard. Mais je ne comprends pas à quoi rime...  
Le Sergent bondit vers le Maître de Discipline, lui flanquant son gros poing de métal en pleine tête. La silhouette noire s'effondre à la renverse par terre, perdant son emprise sur le poignet de l'enfant-Orque. Celui-ci vient immédiatement se blottir derrière Pif rond en grimaçant...
— Voyez-vous, y a un truc qui me chiffonne, reprend Pif rond avec une tranquillité feintée : tout à l'heure dans la brèche, puis dans la mêlée, j'ai vu une bonne partie de vos p'tits gars se jeter à corps perdus au combat, sans se défiler. Vous en revanche, où vous étiez ? Vous étiez en arrière. Et vos suivants, pour la plupart, c'était pareil... Y avait pas de lâches à réprimer ; vous étiez juste derrière à vous toucher. Alors maintenant, debout. Dîtes à vos suivants de mener ces p'tits gars en tête de cortège, et pas en cul. Quant à vous mon ami, mettez vous à mon côté en avant. Et n'oubliez pas : Si je me montre incompétent, lâche ou incapable, vous avez le droit d'avoir ma peau et de prendre le commandement. En attendant, c'est Moi le plus haut gradé régulier ici, ce qui fait de vous et de vos suivants mes clébards. Si vous touchez encore une fois à l'un des gamins sans raison valable, je vous étrangle avec votre propre fouet.»

Sous son casque fermé, le Maître de Discipline hoquette et tousse écarlate. S'efforce de se relever en chancelant pour se redresser en dégainant hargneusement son épée, se redressant de toute sa hauteur face à Pif rond, qui élève sa masse à hauteur égale de l'arme de son interlocuteur, tandis qu'ils se dévisagent pendant de longues secondes glaciales. Au-dessus de la colonne une salve de boules de feux passe dans les airs, partant s'abattre dans les probables positions ennemies vers lesquelles ils marchent.

«On ferait mieux de se remettre en marche, Sergent, on a des positions ennemies à prendre et la Tour n'aime pas que les choses traînent, argue le Maître de Discipline en se soumettant, marchant à grands pas pour monter à l'avant.
Sur l'injonction renfrognée de Pif rond, les troupes se remettent en progression à travers le Champ-de-Décombres. Pif rond ramasse l'épée Gondorienne de l'enfant Orque, qu'il lui rend. L'enfant Orque la reprend vivement en lui rendant un vif hochement de tête.

Quelques pas plus loin, parmi les brasiers des tirs de catapulte et les brouillards de guerre, les rangs d'argent de l'Ennemi se sont reformés et les attendent de pieds fermes.



Une espèce de routine brutale et meurtrière s’installe sur l’avancée de leur contingent au-travers du Champ de Décombres :
-Ils avancent.
-L’Ennemi les attend plus loin, reformant ses rangs.
- Charge, mêlée bestiale.
- Repli / Débandade de l’Ennemi et massacre en règle doublé de capture des Hommes qui ne parviennent pas à fuir avec assez de vivacité.
- Rugir triomphalement et aboyer force jurons aux couards ennemis en fuite.
- Reformer le bataillon, se remettre à avancer.
-Tomber  sur les rangs à nouveau reformés de l’ennemi, toujours un peu plus loin.

Sous l’œil juge d’un Corbeau qui volait d’un vestige de hauteur de pierre à l’autre au-devant de l’avancée Orque, se posant là où il avait vue sur les affrontements…

Rapidement, cette routine voit s’ajouter une nouvelle étape : Tortue face aux volées de flèches des Capes vertes, des soldats légers de l’Ennemi qui se mettent à les tirailler sur toute leur avancée, avant de décamper pour ne pas assumer les conséquences de leur défiance. Dans ces moments-là, tout le monde grogne, serre et claque les crocs nerveusement, en avançant un pas à la fois derrière les boucliers, qui ne s’ouvrent que le temps aux gars du Bras Disciplinaire armés d’arcs de riposter.

L’enfant Orque bataille chaque fois en avant, dans le sillon sanglant et grognant de Pif Rond, Ourykh le suiveur orange à la voix rauque dont l’épée tranche au moins une gorge humaine à chaque engagement, Baeshra la femelle pâle dont la grande hache fracasse les armures et les côtes de leurs adversaires, ainsi que Vargach, le vieux jaunâtre qui l’a soigné.
Et d'autres dont les noms lui sont encore inconnus, parfois même les faciès, retranchés derrière leurs casques. Leurs vrais visages.
Tous sont un peu comme ses héros...
Plusieurs Uruk-Haï du Maîtres de Discipline ont péri dans les engagements, aussi ceux qui sont encore en vie se mêlent aux rangs des Troupes de Choc de Thurgix, laissant la Cohorte les flanquer, menée par ses propres têtes qui se distinguent naturellement.  
Aux côtés de Pif Rond, le Maître de Discipline n’a toujours pas tenté de lui planter l’épée dans le dos ni de remettre en cause son commandement, combattant en avant aux côtés des Uruk-Haï. A plusieurs reprises, lui et des guerriers se sauvent mutuellement la peau.

***

Le Gondor n'a pas basé sa défense sur un seul rempart ébranlé de tout son haut en plusieurs points et sur un fossé imbibé ça et là de poix brûlante.
Alors que le gros des contingents lourds des Orques pénètre en force le périmètre ébréché d'Osgiliath, pourchassant des défenseurs qui cèdent le terrain au compte-goutte, reformant encore et encore les rangs au-travers des rues pour freiner l'avancée Uruk tandis que le gros de leurs troupes se replient plus en profondeur, tel un poing qui se contracte pour frapper fort, une discrète flotte peinte en noir pour se fondre dans la nuit accoste sur les flancs nord et sud du "Champ-de-Décombres" , déversant deux légions de la soldatesque d'argent et de Dol Amroth au complet.
Ruayyh, Général Orque aguerri de la 18ème Légion du Mordor, a prédis une telle manœuvre à un Maître qui a dénigré son conseil en arguant qu'il n'a pas de leçons de stratégie à recevoir d'un porcin écervelé. Tandis que les contingents de cavalerie bleue aux cygnes et ceux de l'infanterie aux arbres blancs sur fond noir surgissent sur les flancs du no man’s land, chargeant droit vers les catapultes et les lignes arrière de l'armée aux abords des brèches du rempart, que la Tour se réfugie au triple galop sur son destrier noir dans l'enceinte de la cité même qu'il est en train d'assiéger en hoquetant d'effroi, suivi de sa suite d’Hommes et de Maîtres de Disciplines en livrées noires qui se font en partie intercepter et trucider, Ruayyh rend hommage à l'entité quelle qu'elle soit, le Seigneur des Ténèbres ou le Grand Karess adulé des siens, qui a soufflé à son esprit l'intuition de ne pas se plier aveuglément aux ordres de son supérieur et de garder dissimulés en forêt plusieurs contingents de lances, de piques, d’arcs et le gros des Wargs en réserves.

Il a tout au plus mille-cinq-cents fantassins légers, des compagnies régulières de l’Oeil Rouge pour la plupart, dont un certain nombre de blessés rapatriés en états de venir combattre, son contingent du Bras Disciplinaire qui se reconvertit en Troupes de Choc dans la formation, la poignée de servants Trolls des catapultes qui rapatrient hâtivement ces dernières, et les quelques uns caparaçonnés de sa suite personnelle, quand arrivant en étau vers ses lignes, deux fois plus de forces ennemies, de la cavalerie et de l’infanterie lourdes, chargent droit sur lui. Les statistiques jouent clairement en sa défaveur.
Mais Ruayyh sait que la guerre ne se joue pas seulement dans les statistiques.
Le vieil Uruk borgne a réclamé sa pique et posé pied à terre de son warg, venant gagner les lignes de ses humbles vétérans Orques de l'Oeil Rouge, rendant le salut à ses troupiers et au Vieux Lieutenant Yetch.
Bon nombre de Légions du Mordor et d’Uruk-Haï considèrent l’institution des "Orques de l’Oeil Rouge" comme une espèce de réserve permanente de snagas. Ruayyh fait partie de ceux qui les traitent avec autant de respect qu’il lui est possible de leur en accorder, affectant parfois même les plus valeureux aux contingents lourds des Uruk-Haï. Si le Vieux Yetch était né Uruk, son sens de la discipline et son esprit diligent l’auraient hissé sans problème jusqu’à un rang de Commandant à l’heure actuelle. Les lois de castes raciales en vigueur au Mordor le bloquent à jamais à son plus haut rang accessible, celui d’humble Lieutenant…
Le roulement de sabots des cavaleries ennemies se fait de plus en plus sonore et vibrant, faisant trembler les abords de la forêt où sont établies leurs lignes. L’étau leur arrive dessus à toute vitesse, prêt à assaillir le bois pour tailler en pièces la vermine de Orque, s’emparer de leurs catapultes pour les retourner contre leurs propres légions…

Ce qui est bien quand vos ennemis vous prennent pour un stupide porcin, c’est qu’ils en viennent à vous sous-estimer et à se laisser aller eux-mêmes à une bêtise confondante… Par exemple en l’occurrence, les chevaliers chargent au triple galop droit sur la "vermine Orque", sans soupçonner un seul instant que celle-ci ait pu creuser des tranchées ait pu creuser des tranchées. Ruayyh a fait creuser à ses réserves deux longues lignes circulaires de tranchées qu’il a fait garnir de pieux à l’orée du bois.
Aux yeux de ces Hommes fanatiques qui les assaillent à pleine lancée sur leurs chevaux, les ténèbres sous les arbres sont opaques, insondables.
Leurs yeux d’Orques cavernicoles et nocturnes voient tout. Ils voient les chevaliers en tête de charge se jeter sur les pieux de défense en y empalant leurs montures qui hennissent, dégringoler en s’empalant à leurs tours sur les pieux, d’autres faire des vols planés et atterrir au milieu de la piétaille Orque, qui les achève avec vigueur sans qu’ils comprennent ce qui leur arrive.
Ils voient leurs adversaires piétiner dans les fossés en aveugle parmi les pieux, coincer leurs chevaux confus dans les pieux et les carcasses hippiques, sans comprendre ce qui se passe. Les contingents de la vermine Orque passent à la contre attaque et fondent autour de leurs destriers, tel un ras de marais de spectres malfaisants aux ricanements inhumains et moqueurs.
Des silhouettes noires fondues dans la pénombre.
Les fantassins d’argent qui arrivent au pas de course cadencé pour épauler les cavaliers se retrouvent rapidement tout aussi perdus que leurs seigneurs, se retrouvant bloqués face à des obstacles non identifiés. Des masses de Trolls les frappent et les font valser hors de ces ténèbres. Des poignes géantes s’emparent de malheureux en les broyant, faisant pleuvoir sur leurs compagnons des giclures organiques. Des nuées de lames assaillent leurs rangs, cognent, grattent et agrippent leurs remparts de boucliers sans qu'ils parviennent à voir le bout de leurs nez, ripostant en aveugles. Des flèches jaillissent du néant pour pleuvoir sur les visages hagards dans le noir.
Ils gênent plus les Cavaliers en leur interdisant la retraite qu’ils ne les soutiennent vraiment. Partout, des mains griffues et rêches enserrent et manipulent les têtes de ceux qui tombent à terre pour exposer les gorges, qui sont ouvertes par des lames rouillées, ou en les traînant dans la masse de silhouettes grimaçantes où ils disparaissent à la vue de leurs compagnons, en se faisant arracher leurs armes.

Brisés et en proie à une terreur qui les marquera à vie, les Hommes de la charge s’extirpent désespérément du bois de cauchemar, détalant à toutes jambes et débandés à travers la plaine sous une pluie de flèches, cherchant à rejoindre les compagnies qui pour leurs parts s’affairaient loin à reprendre les portes latérales d’Osgiliath. Des compagnies qui entreprennent de remonter les flancs intérieurs de la cité, expédiant des détachements sur toute leur longueur pour efflanquer l’offensive Orque dont la majeure partie des cortèges de choc Uruk-Haï se sont acharnés à creuser un sillon sanglant au centre sans prendre le temps d’avancer avec coordination sur leurs flancs, selon le plan de la Tour. Très vite, le Champ-de-Décombres d’Osgiliath devient un champ-de-bataille confus où des groupes des deux camps se retrouvent les uns au milieu des autres, des groupes qui se piègent, qui s’isolent dans leur progression et se retrouvent encerclés, d’autres qui manœuvrent sur l’initiative de sous-officiers et d’humbles Sergents, voir de leaders improvisés, pour venir au secours de leurs compagnons ou pour tenir leurs objectifs, coûte que coûte... …  
Sur le carnage, les Corbeaux morts pleuvaient…
Au milieu de ce foutoir, les catapultes Orques continuent à faire pleuvoir le feu et la pierre après avoir été convoyées en ville par les réserves de Ruayyh.

***

« Les Hommes reprennent librement les districts sur les côtés et prennent en tenaille toutes vos forces d'incompétents, Commandant ! Siffle de colère la Tour de sa voix spectrale. D'aucun aurait pu y percevoir une lueur d'affolement... Où sont vos Uruk-Haï, Commandant Guqaq ? Où sont mes Légions ?!
— C'est "Quguug", Monseigneur… » Se permet de rectifier Quguug avec une humilité craintive, la tête basse.

L’armure du colosse barbu de la 18ème Légion est éclaboussée du sang écarlate séché provenant de diverses origines. Défenseurs d’une brèche du rempart fortifiée sommairement d’une barricade, groupes ennemis qui reforment les rangs pour tenir tête à l’avancée de son bataillon. Un groupe de Rangers ennemis qui ont tenté de le prendre lui et sa suite de vétérans par surprise.
Les gars de son pair Biggs Cassork maintenant présent à son côté, l’ont alerté de la manœuvre et lui ont sauvé les miches d’une volée de flèches assassine.
Les fers maculés de ses haches de bataille goûtent du sang de ces mêmes combats. Des combats brutaux dans lesquels il s’est jeté à corps perdu sans la moindre hésitation et en envoyant chier la Peur, sachant que la mort pouvait le faucher à tout moment comme n’importe lequel de ses troufions, se présentant sous la forme d’une flèche ou d’une lame qu’il n’aurait guère vu filer vers lui avant qu’elle traverse sa large et grosse tête.

Pourtant, face au Maître, Maître dont il a pris la mauvaise habitude de se gausser ouvertement et de le conspuer, Quguug tremble et trempe dans ses sueurs froides, comme tous les siens à ses côtés.

Le spectre de néant perché sur son destrier noir fait remonter au-travers de son aura sa Peur, ses phobies les plus intimes dans son esprit, lui inculquant un respect qu’il avait pensé mort et enterré.  
« "Vos" Légions ont avancé dans leur totalité en profondeur droit devant elles, selon vos nobles instructions…» Il a mis tout le mielleux qu'il lui était possible de mettre dans sa conclusion...

Et pourtant, en dépit de toute cette terreur infantile, il s'efforce à conserver une pointe de cynisme défiant…

« Mes Généraux n'ont pas respecté mes nobles instructions ! Tempête la Tour. Quand je gravis le sommet d'un demeurant de rempart de cette cité maudite, je dénombre plus de mes fantassins restés en retrait dans le champ près des catapultes, qu'il n'y en a qui prennent part à l'assaut dans ces rues ! Le Grand Oeil aura les têtes de vos Généraux pour cet affront !
« Si telle est la Volonté du Grand Oeil, qu'il en soit ainsi ! Admet docilement Quguug, en mode lèche-cul, comme le lui a conseillé Ruayyh lorsqu'il a à faire une engeance supérieure en provenance directe de Barad-Dûr. D'ici là Monseigneur, je vous enjoins de gagner le cœur de la formation où votre sécurité sera la priorité de nos meilleurs bataillons, vous gardant de tout danger...
« Me garder de tout danger ?!  Gronde la Tour de sa voix terrible et acérée. Croyez-vous que je sois un lâche doublé d'un imbécile ? Je commence à penser que vous avez pour but véritable de m'attirer dans un guet-apens afin de vous débarrasser de moi en toute quiétude et préserver vos affectueux chefs de la justice martiale du Grand Oeil ! Il n'en sera rien. Sauron voit par mes yeux au-travers de ses méditations. Il saura, il verra ! Si vous tentez de me nuire. Sachez-le ! »
« Loin de moi cette idée ! Se défend Quguug d'un ton plaintif, la tête basse. Mais à ses côtés, ses pairs peuvent le voir réprimer tant bien que mal un rictus de mépris...

Si Sauron peut vraiment voir à travers tes yeux au-travers de ses méditations, on va le voir comater des années durant et se réveiller amnésique à la vue de tant d'incompétence et d’auto-sabotage au Commandement, misérable charogne incontinente, pense très fort Quguug...

« Je remonte vers le front, là où seraient censés être "vos meilleurs bataillons" !  Vous devriez songer à ce que je vous dis là, Commandant Quguug, si vous escomptez devenir Général un jour plutôt que de perdre prématurément votre tête ! »
— Oui, Seigneur Tour ! Merci de vos conseils, Seigneur Tour ! Je ne manquerai pas de prendre en compte vos sages considérations...»

L'Homme et sa suite de Numénoréens Noirs et de Maîtres de Disciplines humains, soit plusieurs centaines d’hommes en livrées noires dont la propreté témoigne que jusqu’ici  ils se sont gardés de tout combat, cavalent et marchent à pas cadencés dans les rues remontant vers le nord, disparaissant dans les allées enfumées par les feux...

« Avec un peu de chance, un brave archer Gondorien nous débarrassera de ce fumier hautain d'une bonne flèche bien placée, extériorise Biggs Cassork à son côté. Ils ont des rangers qui rôdent un peu partout, qui se glissent au-travers de notre progression... Mes gars ont de bons yeux, mais des fois, ils manquent certaines choses...»



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[An Orc Story - Univers Seigneur des Anneaux] - Premier Sang pour l'enfant Orque Empty Re: [An Orc Story - Univers Seigneur des Anneaux] - Premier Sang pour l'enfant Orque

Message par Karess Mer 8 Mai - 10:30



Mais pour l'heure, ils avancent féroces et inéluctables. Leurs souffles rauques et métalliques au-travers de leurs casques alors qu'ils remontent les veines du Champ-de-Décombres, ses dédales de rues quadrillées de ruines en pierres grisâtres, tout bonnement dévastées. Ils avancent en cohorte, s'engorgent au-travers des allées au pas de course, roulement sonore lourd et métallique. Au-devant de leur progression, les Hommes battent en retraite, toujours.
Le sol tremble, vibre des pas du Troll caparaçonné de la compagnie.
Skulaï ne saurait dire quel fut le rôle d’origine de ce quartier où les Hommes reforment les rangs, aux rues étriquées et labyrinthiques, ces ruines aux façades resserrées  sur leur avancée, parsemées de portes et de fenêtres voutées.


Les blessés ennemis ralentissent la retraite ennemie. Ils ne peuvent se résoudre à les abandonner. Skulaï le respecte profondément. N'en désabuse plus d'un Homme, la fraternité entre les guerriers est une valeur forte au sein des Légions d'Orques du Mordor. Pour un Uruk, sa Légion constitue bien souvent sa vie et sa seule famille.
Mais sous bien des angles, ce lien entre les soldats devient une faiblesse. C'est pourquoi Crocs Blancs Skulaï préfère limiter ses attaches émotionnelles. Et sauf tout le respect qu’il a pour la vaillance de ses ennemis, celui-ci n’altèrera pas sa vigueur à les massacrer.

Face à eux, les rangs reformés de l'Ennemi ne se sont pas réorganisés de manière à les bloquer stratégiquement, mais s’efforcent plutôt désespérément de les ralentir pour faire gagner une longueur d'avance à leurs camarades blessés, qui sont rapatriés à l'abri des remparts de boucliers et de lances. La profusion de soldats en argents qui tiennent la longue avenue qui se présente à eux a tout de même de quoi leur opposer une belle résistance, et les silhouettes aux couleurs forestières qu'ils perçoivent dans les ombres des dédales de rues étriquées qui flanquent cette avenue montrent que l'Ennemi leur interdit toute manœuvre d'évitement du combat.
Comme si c'était leur genre...
Sur des mouvements de katana fermes et secs ponctués d'ordres rauques, le Lieutenant Yashnarz oriente ses pairs d'engeance inférieure, Orques de l'Oeil Rouge, à aller s'empêtrer dans les combats de rue des coupe-gorges déchus, ne réquisitionnant que les deux dizaines de fantassins légers des Sergents Krekch et Thiamarch à leurs côtés pour jouer du nombre.
Avec Charir le Troll aux peintures écarlates en tête de charge, sa lame, et la hache de Crocs Blancs Skulaï, ce ne sera qu'une affaire de quelques battements de coeur.

Ils se déversent tel un torrent de métal hurlant dans la largeur de la longue avenue, beuglant,  rugissant et s'époumonant. Dans le sillage de Crocs Blancs, le trio charge. Les têtes courbées. Les yeux rivés droit devant. La volée de flèches ennemies s'abat sur la cuirasse de Charir le Troll écarlate, projection de flèches qui s'éparpillent en ricoché.
Son marteau ébranle les rangs ennemis dans un impact sonore et les hurlements de leurs adversaires malmenés.
De leur côté, Skulaï leur fait une nouvelle fois démonstration de force en ouvrant le mur de lances ennemies, creusant la brèche.
Les longues et lourdes massues de Nenag et de Wolgu sont là pour la maintenir ouverte dans son dos. Sublime éclair d'organisation. Avant que le torrent d'Uruk-Haï n'enfonce bestialement les lignes humaines.

Il est fou de croire que dans une telle mêlée, chacun va s'offrir son petit combat chorégraphié avec un adversaire, faisant l'étalage de toute sa technique, sa force ou quoique ce soit d'individuel. Non. L’authentique mêlée dans l’avenue est un choc de masses entre les deux forces en présence, qui se rentrent dans le lard jusqu’à ce que l’une des deux cède. Il n’y a aucune place pour l’honneur, l’équité, la stratégie ou la compassion au milieu d’une telle fureur.

A quelques pas d'eux dans la Cohorte, le Lieutenant Yashnarz, vénérable guerrier à l'honneur martial notoire, saigne à terre des fantassins sonnés, aidé de camarades qui les maintiennent par terre.

Suivant Skulaï, Nenag s’acharne. Frappe férocement de son gourdin barbelé et clouté. A répétition. Domine les Hommes de sa hauteur. La défense ennemie malmenée.
Nenag se fait devancer par la vague de guerriers en armures. Se rabat sur la tâche barbare de mettre à mort les Hommes sonnés à terre tombés dans les pattes de la charge. Prend part aux lynchages des plus proches qui ont survécu au piétinement du choc frontal.
Wolgu flanque Togreh. A l’instar de Nenag, elle cloue un Homme par terre au niveau du poitrail. Rugit. Puis un autre. Autour d'eux, les rangs de l'arrière s'attellent à cette même tâche d'achever leurs ennemis aussi perdus que du bétail.
Dans ce bordel, l'un des salopards parvient à se remettre sur un pied. Frappe vers Togreh.
C'est pour prendre garde à ce genre d'ultime fourberie d'avant-trépas que Wolgu monte la garde aux côtés de sa compagne. S'efforce de couvrir ses arrières au milieu de tout ce bordel. S'élance en armant un coup sans se gêner de percuter un camarade en avancée. Wolgu fauche brutalement l'Homme dans son élan.
Avec Garuf et un autre gars casqué anonyme, ils s'acharnent de concert à le trucider.
Les rares Hommes à avoir tenu la ligne encore en vie tentent de prendre la fuite. Pourchassés. Fauchés par des lancers de javelots. Capturés, pour certains.

Wolgu appelle Nenag à revenir les coller, lui et Togreh.
Question de cohésion d’unité de la Meute au sein de la section, que Wolgu et ses deux camarades s'efforcent de maintenir.
Crocs Blancs n’est pas du genre à en tenir compte, et les autres partent déjà assaillir les dédales par les côtés. Le trio d'Uruk-Haï s'élance dans les venelles suffocantes sous les vociférations de leurs sergents. Ils arrivent alors que la retraite des défenseurs du dédale s'est déjà heurtée au flot d'Uruk-Haï.
Vendant chèrement leurs peaux, leurs ennemis assaillis de toutes parts dans les rues se retranchent où ils peuvent, dans les intérieurs des ruines, pris au piège comme du gibier acculé dans leur terrier.

Ils investissent une bâtisse archée sur deux étages qui constitue un noyau de résistance. L’endroit est gagné par les combats, les prises à parties entre les bidasses des deux camps, et règne en son coeur une mêlée confuse. Wolgu se hisse à l’intérieur par un cadre voûté, couvrant ses deux camarades de Meute qui font de même. Ses ennemis plaquent ses cousins plus chétifs de la première vague à terre dans les décombres des intérieurs pour les mettre à mort.   

Ils portaient des coups brutaux sur leurs assaillants. Délaissaient leurs boucliers pour manier leurs armes à deux mains de manière barbare. Meuglaient comme des Uruk-Haï. Leurs yeux étaient injectés de sang.

Le trio charge. Nenag charge le flanc d'un Homme aux prises avec Krekch, le sergent Orque de l'Oeil Rouge. Le plaque à terre. L'Homme et lui partent rouler l'un sur l'autre, lutter dans les fragments de pierre, les cendres et la suie, le Sergent plongeant à leur suite.
Aux côtés de Togreh, Wolgu produit son propre meuglement en réponse à ceux des Hommes. Lui et la guerrière percutent de tous leur poids des adversaires. Ils ont voulu les enfoncer, mais ces Hommes sont costauds et n'en démordent pas, en proie à une fureur enfiévrée. Des vrais guerriers... Wolgu distingue leurs armures singulières dans l’obscurité crasseuse de la ruine, les ornements des cygnes de Dol Amroth. Des Chevaliers, des hommes d’armes princiers qui combattent dans un coupe-gorge…

L'Homme qu'il a percuté et qui a perdu son arme, revient à la charge et empoigne Wolgu. L’entraîne avec lui en le jetant contre un mur, le désarmant également. En dépit de la carrure corpulente de l'Uruk. L'espace d'une seconde, Wolgu voit l'Homme ouvrir grand la bouche, comme s'apprêtant à le mordre à pleines dents dans la jugulaire. L'Uruk jurerait percevoir des crocs d'Orque dans sa bouche.
L'un de ses cousins de l'Oeil Rouge vient embrocher le mollet de l'Homme par derrière à l'aide de son épieu.
Wolgu s'empare de sa dague de secours et la plante dans la cervelle de son adversaire au-travers d’un oeil.
A bout de souffle, il n'a pas le temps de remercier son petit sauveur anonyme d'un hochement de tête que ce dernier a déjà virevolté en quête d'un autre adversaire. Autour de lui, les Orques achèvent de nettoyer le hall et gravissent l'étage pour assaillir ses défenseurs retranchés. Sur leur côté, Togreh est appuyée dans un angle. Comme paumée, hagarde. Clignant des yeux sur place. En proie à un malaise. La ruine est obscure et emplie d'un nuage de poussière. Elle n'arrive même plus à voir.
Wolgu tente de venir la prendre avec lui pour la guider au dehors.
« Ça va, j'vais bien ! » Grogne la guerrière en se dégageant de ses pattes. Elle se tient chancelante, secoue la tête, s'efforçant de débrouiller ses yeux.

« Je dois juste... » Souffle-t-elle péniblement...  
Au-dessus d'eux, les Orques redescendent en trombe. La ruine est nettoyée. A la suivante.

Il n'y a pas de suivante.

Dehors, quelques unes de ces crapules des forêts qui se font appeler "Rangers" sont en train de se faire aligner par terre et rouer de coups à volonté par les Gobelins comme les Uruk-Haï. Tous les captifs ne vivront pas assez longtemps pour acquérir le statut de "prisonnier".
A travers le dédale, les Sergents, le Maître de Discipline de compagnie, rappellent les troupes à sortir de ce trou à rat pour reformer les rangs et reprendre leur avancée.

« Schrak ! Mais foutez-nous un peu la paix, pas un instant de répit pour nous ce soir ! » Ironise Nenag en redescendant de l'étage avec un détachement feinté, passant un coup de torchon sur le bout de son gourdin, maculé de matière organique rouge... Il remarque l'état de Togreh et le rictus léger sur sa large bouche se teinte de sollicitude.
« Ça va, tu tiens le coup, Togreh ?
— Wolgu est un gros lourdaud qui meugle comme un bœuf châtré, et toi la serpillière verte que tu appelles "ton uniforme" m’évoque la couleur de mon vomi. Oui, je vais bien, les gars !» Sur sa tirade rauque, elle passe entre eux pour quitter la ruine. Mais Wolgu adresse à son compagnon élancé une moue soucieuse. Togreh a toujours été une dure à cuire, mais d'ordinaire elle a un sens aigu de la discipline. Là, elle est telle la marmaille qui refuse de se plier à la manœuvre du combat en Relai par envie puérile de prouver sa valeur individuelle…

Il n'y a pas de suivante.

Dehors, quelques unes de ces crapules des forêts qui se font appeler "Rangers" se sont fait piégées dans le dédale. Leur retraite coupée, les allées, les ruines grouillantes d'Orques. Ils font tailler en pièce sans la moindre pitié.
Les Orques du Mordor peuvent respecter un vaillant soldat du rang et lui accorder un traitement relativement décent en temps que prisonnier.
Mais les Rangers, aux yeux des Orques, ne sont ni plus ni moins que des criminels, des brigands des bois.
A travers le dédale, les Sergents, le Maître de Discipline de compagnie, rappellent les troupes à sortir de ce trou à rat pour reformer les rangs et reprendre leur avancée.

« Schrak ! Mais foutez-nous un peu la paix, pas un instant de répit pour nous ce soir ! » Ironise Nenag en redescendant de l'étage avec un détachement feinté, le bout clouté de son long gourdin maculé de matière organique rouge... Il remarque l'état de Togreh et le rictus léger sur sa large bouche se teinte de sollicitude.
« Ça va, tu tiens le coup, Togreh ?
— Wolgu est un gros lourdaud qui meugle comme un bœuf châtré, et toi la serpillière verte que tu appelles "ton uniforme" m'évoques la couleur de mon vomi. Oui, je vais bien, les gars !» Sur sa tirade rauque, elle passe entre eux pour quitter la ruine. Mais Wolgu adresse à son compagnon élancé une moue soucieuse. Togreh a toujours été une dure à cuire, mais d'ordinaire elle a un sens aigu de la discipline. Là, elle est telle la marmaille qui refuse de se plier à la manœuvre du combat en Relai par envie puérile de prouver sa valeur individuelle…

***

Ils reprennent la marche sous les arches brisées d’un antique mémorial à la mémoire d’un roi pouilleux quelconque et oubliable, mort depuis belle lurette mais qui a droit à sa statue parce qu’il a fait des trucs et des machins qui l’ont rendu mémorable aux yeux de ce peuple en déchéance... Thurgix s’est senti obligé d’y marquer une halte le temps de décréter une pause-chiottes générale aux pieds des autels.
« Tu pisses sur une statue d’Elendil, est venu lui glisser le Maître de Discipline en anecdote.
— J’connais pas. C’est qui c’connard ?
— Juste le père du Gondor.»
L'Uruk claque de la langue dans sa bouche. Rumine sombrement sur son gain culturel et sur la meilleure manière de le mettre en pratique...
« Garz ! Kraka ! » Appelle-t-il.
Deux robustes guerriers dotés de heaumes similaires ouverts sur leurs mâchoires et dotés de fentes en visières assez larges pour percevoir les traits de leurs porteurs, rappliquent au pas de course et viennent se tenir côte à côte. Leurs armures, et même leurs haches aux fers bardés d'un crochet sont identiques. Leur teint cependant divergent tout à l'opposé l'un de l'autre, d'un blanc laiteux pour Garz, brunâtre-mauve pour Kraka.
« Pulvérisez moi la statue d'Elendil. » Ordonne Thurgix. Ébahissant les deux guerriers.
— Mais Chef, on n'a pas d'outil ! S'exclame Kraka, révélant son sexe féminin au Maître de Discipline par sa voix de femme, aussi rauque et gutturale soit-elle. Comment qu'on s'y prend ? »
« Qu'est-ce que j'en ai à foutre ? Foutez-lui des coups de pied au cul jusqu'à ce qu'il bascule, crachez dessus pour l'user jusqu'à ce qu'elle se désagrège ! Vous avez des haches non ? Bon, alors au boulot...
— Et quand nos armes seront bonnes à jeter, comment on fera pour se battre ? Objecte Garz. Thurgix le regarde comme si ce qu'il venait de dire était la preuve irréfutable que c'est un demeuré.
— Vous vous trouverez d'autres armes ! Les presse-t-il de se mettre à l'oeuvre. C'est pas ça qui manque ici ! Vous allez pas me faire croire que vous en avez pas d'autres sur vous ? Moi-même, j'en ai trois rien que dans mon froc ! Bordel, c'que vous êtes pas dégourdi, est-ce que j'dois vous torcher aussi ? »

Les deux Uruk-Haï se mettent à l'oeuvre en renâclant las. Puis très vite, la perspective de casser la statue d'un souverain mythique des Hommes ravive leur enthousiasme.

« Garz ! Kraka ! Rappelle Thurgix moins d’une minute plus tard alors que la troupe se regroupe, les tripes communément soulagées dans l’antique mémorial… Laissez tomber ! Ça va vous prendre des plombes, on a des Hommes à tuer... »
S'interrompant avec une profonde déception, les deux guerriers délaissent les chevilles ébréchées de la statue pour rejoindre le cortège qui se remet en marche.


Alors qu’ils avancent à travers le temple en ruine, le Maître de Discipline marche au côté de Thurgix. Ouvrant la sangle de la mentonnière de son heaume, le Maître retire son casque, dévoilant son visage.
Derrière et à leurs côtés, l’enfant Orque et tous les gars à portée ont un hoquet de surprise. Le Maître de Discipline est un Homme, un jeune homme à la barbe taillée.
«Je me dois de vous le dire, amorce-t-il après s’être essuyé la sueur du front et des tempes. Merci, Sergent.
— Comprends pas, lui retourne négligemment Thurgix, fixant droit devant de lui tandis qu'ils émergent du temple et regagnent la rue au pas de marche. D'autres cortèges les ont devancés. Les combats leur parviennent en échos distants.
— Pendant longtemps, je me suis défilé de ma peur en la canalisant dans une répression abusive, gratuite et aveugle de ceux qui servent sous mes ordres. Les choses en sont ainsi chez bien des Maîtres de Discipline. Nous ne sommes pas des guerriers courageux. Nous sommes emplis de peur, et nous reportons cette peur de manière tyrannique sur les Cohortes que nous sommes censés mener. Mais ce soir, maintenant que vous me mettez face à mes responsabilités de meneur, face à ma peur, je réalise que je peux triompher d’elle.
— Content pour toi, gars. C’est toujours un plaisir de foutre mon poing dans la gueule d’un couillon disciplinaire.
— Dorénavant, je mènerai mes Cohortes de l’avant par l’exemple et je ferai de mes snagas d’authentiques guerriers, comme cet avorton que vous gardez à vos côtés.
— J’le garde pas à mes côtés, c’est lui qui me colle sous la godasse. Il peut faire d’un bon bouclier de rechange si ma targe se fend cela dit…
L’Homme pouffe devant la façade cynique que lui joue le Sergent :
— Oui, bien sûr...»
Il ôte le gant de sa main droite, qu'il tend à l'Uruk.
— Martivyr. Et vous c’est Thurgix, c’est cela ?
Thurgix tourne un regard contrarié vers le Maître, ignorant la main qui lui est présentée.
— Gars, refous ton heaume sur ta face de porc toute rose et arrête ça ! T’es bizarre, vraiment… Veux-tu que mes gars me nomment "Thurgix le Xénophile" ?»


Dernière édition par Karess le Ven 7 Juin - 5:25, édité 8 fois
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[An Orc Story - Univers Seigneur des Anneaux] - Premier Sang pour l'enfant Orque Empty Re: [An Orc Story - Univers Seigneur des Anneaux] - Premier Sang pour l'enfant Orque

Message par Karess Sam 11 Mai - 18:08

Note - BO:


VI : Le Charnier


Leur fièvre était contagieuse pour le genre humain et une centaine d’hommes de la garnison en étaient morts. Les autres furent enclins à de noires et cyniques pensées, et à la vue des morts en armures, ceux qui avaient en charge la défense de la cité déchue furent inspirés d’une fantaisie macabre et démente pour la guerre...

Ils ont percé à travers les trois quarts de la rive orientale.
Face à eux, le véritable noyau de résistance de l’Ennemi. Sa seconde ligne de défense. Là, de l’autre côté d’une longue et large rue perpendiculaire à leur ascension que les Orques surnomment "l’Orgie rouge", l’Ennemi leur fait face en nombre et en force, retranché dans la ligne de hautes bâtisses en ruines, derrière un réseau de barricades et courtes palissades sommaires, jonchées dans des amoncellements de gravats.
Ancienne artère commerçante rayonnante de vie, de lumières et de musiques, elle n’est plus qu’un sinistre sillon de pierre froide, une voie aux pavés meurtris qui s’élance au-travers de la cité. Ses hautes maisons de pierres anthracite, fantômes, sont de véritables remparts crénelés et des meurtrières pour les archers, d’un côté comme de l’autre… Entre les deux, l'artère est un long no man's land.

Sur ordre du Bras Disciplinaire, la troupe de Yashnarz se résignent à stopper leur inéluctable avancée aux abords de la longue avenue, attendant les leurs pour une bataille rangée.

En tête, Skulaï se conditionne en silence. A ses côtés, la respiration pénible et lourde de Togreh, qui souffre de la balafre qui lui zèbre le visage à la diagonale, fait planer une certaine tension sur le silence relatif, ponctué des coups de tambours sporadiques, des ordres aboyés, des douces mélopées des Chamans… La guerrière s’efforce de rester devant, focalisée sur le lointain, droite, mais sa souffrance et son épuisement transparaissent.
Wolgu manifeste intimement son inquiétude pour elle. Se fait envoyer chier par celle-ci. Yashnarz, observant la scène, lui demande sarcastiquement si elle compte se faire tuer, et lui ordonne purement et simplement de se mettre en queue de cortège, parmi ceux qui continuent de combattre malgré des doigts coupés. Des oreilles. Des yeux crevés pour certains. Tous dans la troupe, même Skulaï, ont des balafres, des entailles superficielles. Quand elles sont plus sordides, comme pour Togreh, les guerriers sont disposés sur les arrières du cortège, traités, soulagés et souvent drogués en urgence lors d’arrêts comme celui-ci.
Au devant, les harangues et exhortations à tenir bon de quelques chefs ennemis. Des voix qui ne sont que des échos, qui se meurent dans un silence lourd. Un silence dans lequel toujours plus de cohortes d’Orques arrivent à leurs côtés, dans leur dos. Viennent se ranger en ordre de bataille. Parmi eux, silhouettes fantomatiques qui errent de leur allure lente ou qui scrutent l’opposé avec fascination, indifférent que leur vue soit obstruée par des édifices, les Chamans chantonnent une mélopée douce et funeste… Quelques Cohortes Disciplinaires, vestiges de compagnies mises en lambeaux que les Maîtres de Discipline regroupent, se joignent les unes aux autres en une nouvelle unité de combat singulière, se font mener au fouet et aux vociférations en avant de la formation, mêlées à des pelotons de fantassins légers de l’Oeil Rouge.

Des snagas avec un titre honorifique aux yeux de Skulaï, ces derniers…

Précédant deux gros contingents supplémentaires, qui se déploient activement, Quguug et Cassork eux-mêmes reviennent à grands pas de l’arrière, accompagnés de leur suite respective de vétérans, venant prendre la tête de l’assaut. A la vue du sang écarlate éclaboussé sur sa cuirasse, plusieurs guerriers de la 18ème s’apprêtent à lancer des piques amicales au Commandant du Bras Disciplinaire de leur légion. Mais ils voient l’expression dure de son faciès, ses yeux soucieux, la sueur qui le trempe, comme chacun de ses vétérans, et ils se ravisent.
« La Tour est juste derrière nous… Entend Skulaï souffler Quguug à Yashnarz en se rangeant à leur côté…  
— La fièvre l’emporte, mais on pourrait avoir grand besoin de ses Hommes, là maintenant, objecte Yashnarz avec un optimisme à demi-convaincu…  
— Dans quelle armée as-tu passé tes longues décennies de vie, Yashnarz ? Quand la Tour dit qu’il monte en premières lignes, ça veut dire que Nous, la Première Ligne, on va l’avoir dans le cul et qu’on ne peut plus reculer...
Le Lieutenant hoche tristement la tête. Avant de voir le bon côté des choses :
— De toute manière, on a l’intention d’avancer, n’est-ce-pas ? »
Au côté gauche du contingent, Charir l'Olog-Haï produit un lourd bâillement, se couvrant sa large bouche de sa grosse paluche…

***

« Un de tes rivaux, Sergent Thurgix ? Demande Martivyr, une pointe taquine dans la voix.
— J’t’ai dis d’arrêter ça, geint Thurgix, détournant à peine ses yeux rivés sur le colosse vert parmi le contingent qu’ils flanquent. Nan, c’lui là, c’est que dalle ! « Crocs Blancs » Skulaï, j’peux l’écraser quand j’veux !»
Il continue de le lorgner au-travers de la cohorte sur toute son avancée, appelant de son être que le colosse tourne son regard canin vers lui, une première confrontation visuelle…
Il ne le regarde même pas… Il reste à scruter droit devant lui. Travailler son souffle lourd qui soulève son torse à intervalles. Se conditionner pour la bataille imminente contre l’Ennemi.
Le Troll le cache à sa vue. Le gros vert n’a peut-être même pas conscience de leur inimitié ! Mais non, c’est impossible… Il sait ! C’est réciproque ! C’est juste qu’il l’ignore, pour l’irriter…
« Raclure arrogante !  Grogne Thurgix…
-- J’le tuerais deux fois, moi ! Surenchérit Ourykh.
-- Tu tuerais que dalle, Ourykh, se moque Baeshra. T’as jamais juste entraperçu Skulaï en train de se battre ? C’est une Bête. Un Dieu de la guerre et de la fosse de combat. Un Avatar du Grand Karess… »

Sur le flanc du contingent, un troupier trapu et jaune remonte la formation en accourant vers la tête, porteur d’une bannière ocre rouge  peinte d’un motif écarlate… Vulgaire, et grossier, à l’attention de l’Ennemi. Une bannière d’un humour injurieux et fantasque, typique des Orques du Mordor…
« Adjudant Lerüg, se renfrogne Thurgix… T’en as loupé les trois quarts.
Le Gobelin rapporte les nouvelles de l’arrière. Une voix jeune, le timbre proche de celle d’un enfant. Eggha le Capitaine de la Compagnie de Choc va s’en tirer. Sa voix va un peu grincer à l’avenir... Par contre le Lieutenant, c’est une autre histoire… Il veut bien lui suturer la tête au cou, mais il y croit moyen… Bon débarras, dit Thurgix. C’était une raclure qui se foutait de son surpoids quand il était en caserne.  
Lerüg veut-il lui prendre le commandement de la troupe maintenant qu’il est là ?
« Ouh la ! S’horrifie Lerüg, les yeux écarquillés et bondissant d’effroi à cette perspective : ‘Puis quoi encore ? C’est l’Capitaine et le Lieutenant qui font ça d’habitude, et ça m’va très bien ! T’as géré jusqu’à présent, alors j’prends ce Maître de Discipline à ton côté comme témoin : je te confie le Commandement ! »
Thurgix hoche la tête, satisfait. Comme si les Uruk-Haï auraient suivi une engeance inférieure comme lui, de toute façon... Sympa la bannière, au fait…
« Et Yazho ? Demande Ourykh à Lerüg. Tu sais s’il va s’en tirer lui ?

Derrière eux, l’enfant Orque est surpris. Depuis qu’il marche avec les Uruk-Haï, c’est la première fois qu’Ourykh montre une autre émotion, en l’occurrence du souci sincère pour un camarade, que son aigreur renfrognée et meurtrière.
« Yazho ? Le gars qui s’est fait arrache’ la mâchoire dans la brèche ? Aucune idée. J’espère que non pour lui…
— Va t’faire foutre Lerüg !
— Quoi va t’faire foutre ? Va t’faire foutre toi-même ! T’aimerais toi, t’en tirer en vie si tu n’pouvais plus bouffer que de la soupe par une paille pour le restant de tes jours, sans plus pouvoir prononcer une seule connerie ?»  
Trottinant dans leur sillage pour suivre l’allure de marche des guerriers Uruk-Haï, l’enfant Orque est fasciné par les huit grands Trolls, géants de cuir écailleux et de plaques d’acier noir de leurs armures, qui flanquent les contingents de guerriers qui font le tiers de leur taille.
Certains des monstres ont mis leurs marteaux de géants à la « ceinture » et portent en mains des machineries de l’Ennemi qu’ils sont parvenus à prendre. Celles qui font pleuvoir les javelots et qui ont transformé à plusieurs reprises les assauts en boucherie.

Deux Maîtres de Discipline noirs, casqués et anonymes, hèlent Pif Rond dans l’avancée du contingent, les mains levées, le saluant de la main autant qu’ils viennent à sa rencontre.
« Sergent, salue le premier. Voix mélodieuse, fluette. Un Homme. Où est votre Officier en charge ?
— En train d’se faire recoudre la gorge. Et le Lieutenant, oubliez le. »
Hochement de tête.
« J’ai perdu l’Troll aussi…
— Amante a perdu sa section. C’est adéquat. »  
 Le Maître de Discipline jette un regard sur l’arrière de Pif rond, sur ses troupes...
« Vous avez des snagas et des légers dans vos lignes, relève le Maître de Discipline.
— Et ? Sourcille Thurgix.
— On va vous en débarrasser. »
Thurgix a une humeur mauvaise. Il tente de discuter la décision des Maîtres de Discipline, mais le Bras Disciplinaire est sans appel. Pas une question d’ils sont bons ou pas. Question de professionnalisme, et de carrure musculaire raciale. Mêlés aux têtes de Cortèges, leur amateurisme mettrait les Uruk-Haï autant en danger qu’eux-mêmes.
En fait, exactement ce que Pif rond plaidait quelques heures plus tôt auprès du grand Uruk de cendre pour faire dégager l’enfant Orque, réalise ce petit…
Si Pif rond y tient, ils ne seront pas dans la première ligne "écran", mais dans les renforts sur l’arrière.
Martivyr concilie le Sergent en lui disant qu’il prend la tête des légers et qu’il les fera suivre. Recule en détachant la troupe.
Quand les Maîtres de Disciplines partent vaquer à d’autres occupations, l’enfant Orque se décolle du jupon de Pif rond derrière lequel il s’est caché à leurs instructions. Levant ses yeux ronds vers son protecteur. Des yeux innocents et fatigués, mais déterminés. Pif rond lui retourne un regard défiant. Lui lâche un petit rire étouffé, complice…
Dans un pas qui fait trembler le sol, Amante le Troll vient les recouvrir de son ombre.
La Bête a une machinerie en mains dont l’enfant Orque ignore le nom exact : une baliste à répétition…



De petits groupes d’Orques de l’Oeil Rouge, silhouettes viles et trapues, partent se tenir en bordure de la rue, des abris des murs effondrés des édifices déchus côté Orque. Prenant inspiration, ils sortent prudemment à découvert d’un bras en déployant des balistes à répétitions gondoriennes et des scorpions mordoriens. Ils opèrent à quatre pattes, accroupis pour installer, charger, enflammer les pointes enduites de poix. Pendant ce temps, les archers Orques et Uruk-Haï se déploient dans les édifices, prenant position dans les hauteurs des ruines. Quand les cors alignés retentissent derrière eux, que les tambours se mettent à battre frénétiquement, tous font feu de concert sur toute la ligne à travers "l’Orgie Rouge".
Une volée de quatre boules de feux traverse les airs au-dessus de l’artère et s’abat de plein fouet sur le réseau de défenses ennemies en longueur.
Près d’une centaine de fantassins légers émergent des ruines et chargent à travers la rue en largeur. Certains se freinent pour lancer des javelots dans leur course.
Alors qu’ils partent se jeter à l’assaut des lignes ennemies sonnées par le bombardement des catapultes, qui ne rendent que timidement la volée, le torrent de légionnaires Uruk-Haï se déverse à son tour des ruines. La terre tremble de la charge des Trolls qui flanquent leurs contingents.
Certains d’entre eux pointent les fameuses balistes à répétition calées contre l’épaule ou la hanche, faisant pleuvoir le contenu de leurs chargeurs sur leurs propriétaires légitimes.

Sous le poids de ces blocs compacts d’acier, de ces tonnes de chair et d’acier Troll, le sol de la rue de l’Orgie Rouge se dérobe sous leurs pieds, et le monde s’effondre autour de deux Compagnies de Choc, deux trous béants de cinquante mètres de long sur trente mètres de large chacun...

***

Le monde s’effondre autour de lui. Crocs Blancs Skulaï et toute sa Compagnie tombent parmi la pluie de pavés et de terre rance qui composaient le sol pavé de la rue. Ils ont à peine le temps de réaliser  qu’ils tombent qu’ils atterrissent au sol, bon nombre d’entre eux se cassant les pattes, d’autres se heurtant face contre terre et mourant sur le coup sans comprendre ce qui leur est arrivé. Le Troll écrabouille une poignée d’Uruk-Haï dans sa chute, hagard. Des gars produisent de subliminales plaintes étouffées en s’empalant sur les lames, les piques de leurs compagnons…
Deux gars cuirassés lui tombent successivement sur le dos, lui faisant mordre la poussière. Skulaï s’efforce de reprendre ses esprits, son souffle entre ses crocs serrés, de comprendre. De se relever, rampant. Prenant douloureusement appui sur ses avant-bras et ses chevilles.

Tout son corps est meurtri, douloureux du choc. Une substance huileuse et collante, noire, sur tout l’avant et les flancs de sa cuirasse et de son heaume, sur ses avant-bras, ses jambes, ses bottes... Lui et le tiers avant de la compagnie ont fait une chute d’un bon étage de hauteur. Se sont cassés la gueule sur un saillant crasseux et terreux des égouts. Les deux-tiers de l’arrière ont eu droit à du rab et sont tombés un niveau au-dessous, en plein dedans, dans une venelle étroite des canalisations. Toute la Compagnie rampe au sol dans la fange, sonnée. La moitié, surtout ceux dans la canalisation. Se tordent de douleur dans la crasse du sol. Geignent à l’unisson. Les plus robustes comme lui, comme le vieux Lieutenant Yashnarz et le Commandant Quguug, s’efforcent de se dresser, au moins sur leurs genoux…

Une vingtaine de silhouettes continuent de tomber à leur suite, de pleuvoir sur la canalisation en poussant des plaintes de canidés. La tête de cortège de fantassins Orques qui chargeait dans leur suite…

Quelle est cette farce ?

Skulaï contemple ses membres, cette substance noire et huileuse qui le macule, avec horreur…
«De la poix, s’horrifie Garuf d’une voix étranglée à quelques pas… C’est de la poix !»
Le coeur de Crocs Blancs commence à cogner…

***

La troupe de choc de Thurgix est en proie à la confusion et la stupéfaction. La moitié d’entre eux tournent sur eux-mêmes en jetant des regards éberlués, comme ne sachant plus où ils sont.
Seuls les snagas de la première ligne en lambeaux, lancée en écran pour les tirs devant eux, assaillent activement l’Ennemi, trop occupés à défendre leur misérable existence pour s’horrifier du spectacle derrière eux…  
« Avancez ! Leur grogne Pif rond en se freinant et virevoltant au pied de l’édifice ennemi. A l’attaque ! »
Sur leurs flancs, la rue s’est dérobée en deux trous béants. Derrière eux, ils viennent littéralement de traverser un pont. Un pont de rue pavée, absurde incohérence dans un décor de dévastation folle.

« Attaquez, j’vous dis ! Grince Thurgix comme une scie à bois.  
Des flèches pleuvent sur le gros de la troupe d’Uruk-Haï, hagarde, même sous la volée qui les blesse et les fauche  de dos dans leur immobilisme empoté…
Thurgix revient à grands pas sur eux en distribuant injures furieuses et coups de pieds aux culs…
«Qu’est-ce que… », « L’… Le sol », articulent des casqués en élevant leurs gros doigts gantés…
« Je sais bien c’qui est arrivé au sol ! Fulmine Pif rond en poussant ses gars brutalement… Vous comptez faire quoi ? Le reboucher ? Attaquez, ou on va tous crever ! Attaquez, sinon j’vous tue moi-même !»  

Un à un, les guerriers de sa section se reprennent et finissent par se remettre en mouvement, mais leur esprit combattif n’est clairement pas au rendez-vous. Il repère des archers ennemis au sommet de la tour, qui visent avec des flèches enflammées les gouffres. Comprend quel sort est réservé à ses frères de Légion. Il s’élance vers celui de droite –là où sont tombés Quguug, Yashnarz et son rival Crocs Blancs Skulaï, que lui seul a le droit de tuer un jour prochain- et bondit en brandissant à bout de bras sa targe, stoppant deux des flèches enflammées. Réalise que cette même confusion qui a frappé sa cohorte a rendu craintive la seconde ligne, qui fait du surplace au milieu de la rue.
Et un peu partout dans l’Orgie Rouge, sur toute sa longueur, c’est la même confusion et paralysie hagarde. Sur une charge de près d’un millier d’Orques du Mordor, ils ne sont que quelques poignets comme lui, tout au plus quarante, à serrer les crocs en continuant d’attaquer, faire n’importe quoi, le premier truc qui leur vient en tête pour rester actif et conjurer de leur esprit ce qui vient de se passer.

Pif rond exulte au bord d’un des gouffres béants de la rue, en hurlant sur les arrières :
« Bordel, est-ce qu’il faut que je secoue tout le putain de Mordor à moi tout seul ? Lancez cette putain d’attaque ! Les Maîtres de Discipline, réveillez-vous et lancez cette putain d’attaque ! »

***

Les morts en armes des Hommes les cernaient. Victimes pourrissantes de la fièvre, leurs camarades leur avaient trouvé un rôle pour qu’ils fassent leur devoir même dans la mort. Fixés aux murs des égouts pour tenir debout, mis en armes, leurs lances et leurs épées rivées à leurs mains gantées, leurs bras maintenus par des artifices artisanaux en des postures d’exécuteurs, leurs visages en décomposition jetaient aux Uruk-Haï tombés dans le piège des regards juges…

Skulaï contemple cette mise en scène macabre et sent la terreur, cette sensation de sueurs froides qu'il méprise de tout son être en temps qu'engeance des Légions, le gagner... Quelle est cette farce digne de… D’un Orque, en fait… Ca n’est même pas la poix qui le couvre en soi, ça c’est de bonne guerre, mais les morts alignés en mise en scène contre les parois ?
Qu’est-ce qui est passé par la tête des Hommes du Gondor pour mettre en oeuvre un piège aussi barbare ?
« De la poix ! Panique un gars en s’étranglant. Ils vont nous crâmer ! Il faut sortir !» Sa panique est contagieuse. Des gars commencent à perdre le contrôle d’eux-mêmes, à s’affoler comme un animal qui aurait vu le couteau du boucher…
Skulaï lui-même n’aurait pas honte d’admettre qu’il est mort de trouille, seul un gars avec une sérieuse case en moins n’aurait pas peur de mourir brûlé vif.

Comme ce Chaman qui saute de son plein gré parmi eux, sereinement.

Mais là, s’ils ne se démènent pas pour faire des trucs utiles, tout le monde va mourir. Au-dessus d’eux, Thurgix le Mignon se démène comme un diable pour couvrir ce qu’il peut de la fosse (c'est-à-dire pratiquement rien, c’est un miracle qu’il parvienne à arrêter deux flèches enflammées). Les premières à tomber parmi eux se sont plantées miraculeusement dans des zones saines de poix. Le sol sur les deux niveaux, les parois sont couvertes dans leur intégralité de dégoulinements noirs. Ce n’est qu’une question de secondes avant qu’une putain de salve ou une torche ne les fasse rôtir.

Le vieux Yashnarz est le premier à se reprendre. Poussant les plus proches gars de lui à se bouger et à faire des courtes échelles pour se hisser hors de la fosse. Le Commandant et Skulaï l’imitent, secouant leurs gars avec urgence.
D’autres au contraire, comme Wolgu et Nenag, descendent eux-mêmes dans la canalisation jonchée de blessés, pour prêter assistance aux autres blessés. Le vieux Yashnarz n’hésite pas une seule seconde à faire de même.
Skulaï serre les crocs et descend à sa suite, suivi du Commandant, qui finit par descendre après de précieuses secondes d’hésitation, voyant que les gars de leur plateforme se sont tirés de leur torpeur et s’organisent pour se tirer de là, d’autres pour tendre la paluche à leurs compagnons au-dessous quand ils seront sur leurs pieds.  S'ils ne crament pas dans les prochaines secondes...

***

Les défenseurs ennemis l’ont évidemment repéré comme un meneur et le prennent pour cible. Thurgix leur rive un regard vindicatif et élève haut sa targe pour se couvrir.
Et plus haut encore le signe injurieux qu’il leur retourne de la main droite.
Au milieu du pont, parmi les ultimes paumés, il repère l’enfant Orque, qui est tétanisé sur place, tremblant de tous ses membres. Sans cesser de se couvrir de son bouclier, les flèches le heurtant avec fracas, Pif rond marche à grands pas sur lui…

L’enfant Orque regarde les Chamans à têtes de boucs, qui se tiennent au milieu de ce désastre avec indifférence. Son otite s’était atténuée. Elle vient de remonter en puissance, martelant puissamment dans ses oreilles.
Comme pour acclamer le spectacle d’horreur.

Tout cela en Mon Nom !

L’un d’entre eux vient se laisser choir de son plein gré dans la fosse, descendant avec une insouciance enfantine...
« Aller toi ! T’as pas envie de me décevoir ? » Vient le secouer Pif rond sans ménagement.
 
L’enfant Orque croise son regard.
Il s’efforce de se reprendre. La peur lui tenaille les tripes. Il n’arrive pas à en faire cette détermination brûlante qui lui a chauffé les tripes sur toute leur traversée du Champ-de-Décombre.
Ils courent le peu de distance qui les sépare de la ligne ennemie et partent trouver refuge contre une des façades gris sombre d’une large ruine ennemie où sont postés ses archers. Au-dessous, même Amante est apeurée. Le Troll est collé contre un mur, comme un hominidé qui chercherait à se cacher pour se défiler de la bataille. Thurgix l’appelle, lui colle une baffe sur le bras en la sommant d’avancer comme un snaga d’une Cohorte Disciplinaire… Toute l’attaque est bordélique et confuse. Plusieurs gars sont collés comme eux à couvert et reprennent leur souffle, leurs esprits, s’efforcent de comprendre ce qui leur est tombé sur la gueule. D’autres, une poignée, sont en train d’assaillir la barricade ennemie, bataillant contre des haies de lances qui frappent de toute leur longueur pour les repousser, quelques archers ennemis sur le plancher des vaches sur les flancs de l’obstacle qui les abattent comme du bétail à courte portée…

« Les gars, vous êtes des Uruk-Haï ! Sermonne Thurgix à ses guerriers, sur la section de renforts qui s’engage à toutes jambes sur le pont. S'efforçant de clarifier ses propos. On vous entraîne depuis votre enfance pour faire face à ce genre de merdier ! On vous a appris à serrer les crocs, alors reprenez-vous ! Ceux  que je prends encore à bailler aux corneilles, je les balance moi-même dans ces putains de trous !»

Sur ce, Pif rond cogne quatre fois du poing en longueur sur le mur de ruine à l’attention d’Amante. Le Troll délaisse à terre la baliste qu’on lui a remise pour saisir son marteau, et martèle la façade. L’éventrant morceau par morceau, ouvrant une brèche pour la troupe, dont Thurgix jette les guerriers au combat à travers les trous. Derrière, les Hommes ont tout un peloton qui se tenait paré à cette éventualité, mais qui ont pris une boule de feu de plein fouet et qui rampent maintenant dans les décombres. Thurgix secoue l’enfant Orque et ses plus proches congénères pour qu’ils l’aident à hisser la baliste du Troll et tire coup sur coup sur les défenseurs malmenés. Alors que le Troll opère, martelant en longueur le mur, Thurgix ne peut s’empêcher d’avoir une pointe de mépris pour le manque d’esprit militaire des Hommes du Gondor. En l’état, les murs intacts de leurs ruines sont des obstacles à double sens. Thurgix y aurait aménagé de longues meurtrières garnies d’arcs, de balistes et de piques pour les défendre, les transformant en forteresse imprenable.
Au lieu de quoi, deux pauvres dizaines de ses guerriers vont en tailler en pièces les occupants.

L’Uruk rappelle le Troll et s’élance hors de l’abri du mur, venant assaillir la barricade. L’enfant Orque court dans son sillage. S’agglutine parmi ses congénères snagas et fantassins légers du côté gauche des "portes" de la palissade ennemie, s’efforçant de focaliser et de se préparer, l’épée parée à frapper d’estoc, le bouclier en avant… Pif rond est véhément, mais il n’a pas vraiment de plan. Il vient juste se camper face à la porte, déchaîne plusieurs coups de pieds chaussés de fer et de masse d’arme dans l’obstacle.
Une pluie de flèches frappe spécialement pour lui, tout autour de lui.
Sur lui.
Ricochant et se fichant dans sa cuirasse et ses épaulières hérissées de piquants.
Il se colle dos assis à la porte gauche pour se mettre à l’abri, la bouche crispée sur un rictus de rage et de douleur contenue...
« Oh, ça, mes p’tits chéris, vous allez l’regretter, promet-il par-dessus… Amante ! Fais quelque chose de sale ! »
L’enfant Orque observe avec fascination. Grimaçant de hargne, le Troll élève sa machinerie par-dessus la palissade en tirant coup sur coup avec le mécanisme.  De l’autre côté des piquets de bois, lui parviennent cris d’horreurs, et impacts organiques.
« C’est bien ! Félicite Pif rond. Maintenant, défonce-moi cette blague qu’ils appellent des défenses ! »
Amante rejette la baliste par-dessus le rempart, la troquant pour sa masse, avec laquelle elle déblaie la palissade et envoie les portes brisées glisser aux pieds des troupiers d’argent, qui font face en reculant d’un pas uni en tortue défensive…

Enfin joints en force par les fantassins de la seconde ligne, la troupe secouée de Thurgix charge en hurlant à pleins poumons.
Foncent en plein dans un goulot d’étranglement, cernés de tireurs sur les hauteurs. Amante en tête de charge, se jetant sur la haie de lances et au mépris des flèches. Abattant le marteau de la Vengeance sur la tête de la formation ennemie…
L’enfant Orque lui, s’est fondu comme d'autres de l’autre côté de la palissade, dont il meurtrit au sol les défenseurs encore sonnés par le massacre à la baliste. Frappant de son épée sur leurs casques, éructant de les voir ramper devant lui...

***

« Charir ! Appelle Yashnarz à l’autre bout du goulot étroit de la canalisation. Sa voix rauque couvrant les geignements plaintifs de ses blessés. Charir, on a besoin de toi ici ! »
Charir le Troll dépose tels des jouets les trois Uruk-Haï blessés qu’il avait empoignés sur la plateforme  supérieure, et remonte à pas prudents le goulot, parmi les blessés et les petites choses sonnées qui se traînent prostrées, hors de son sillage.
Le vieil Uruk a rapidement repéré une grille rouillée, cadenassée, comme toutes les issues. De l’autre côté, les cris et geignements d’une autre compagnie piégée lui font savoir que ça ne mènerait à rien, mais de ce côté, ils ont une issue pour se sortir du traquenard.      
« Vite ! » Grogne Skulaï. Charir le Troll rejoint Yashnarz, qui tapote sur la grille du poing avant de se camper vivement sur le côté dans l’angle.

Le Troll expédie deux grands coups de marteau géant dans la grille qui lui arrive à peine au niveau du pagne. Le premier l’a arrachée de ses gonds et la fait chanceler dans l’encadrement. Le deuxième coup la projette à travers la bouche béante de l’issue, produisant des cris d’alerte humains et une bousculade d’Hommes en armures qui se reculent.
Ils sont là. Ces bâtards ont prévu le coup… Dans les ténèbres de l’étroit tunnel, ils peuvent voir les reflets des fers de lances. Poussé par son Lieutenant, Skulaï s'élance au travers de l'issue pour en dégager le passage.
« C'est bien Charir, remercie Yashnarz dans un souffle. Fais pareil de l'autre côté pour sortir les autres, et sors-toi de là ! »

***

Au-dessus des troupes à l’assaut de Pif rond, des torches sont jetées des hauteurs des ruines dans les fosses béantes de la rue. Faisant s’élever des fournaises au cœur de l’Orgie Rouge, et les hurlements atroces et sans fin de deux cents âmes qui meurent à l’unisson, deux-cents Orques brûlés vifs… Des hurlements qui marquent au fer rouge l’esprit de l’enfant Orque…

***

Dans son dos à l’embouchure du tunnel, les voix de Togreh, de Wolgu, de Quguug et d’autres, mêlées, enjoignent vivement les gars à passer dans le tunnel. Skulaï lui, a chargé le plus loin possible pour venir à la rencontre de ces salauds d’Hommes, d’infâmes piquiers vêtus de capes bleues, qui pointent leurs armes au niveau du ventre, lui interdisant l’étroit passage. Les salopards tentent de le bloquer au niveau de la grille que Charir le Troll a projeté au-travers du tunnel. Crocs Blancs, les Hommes ; chacun des deux partis s’intimide d’un côté de la grille. Se défie d’être le premier à avancer, à se prendre les pieds entre les barreaux. Galgril, un Uruk casqué remonte en courant le tunnel et vient se camper au côté de Skulaï. Ils ne peuvent pas être plus de deux en largeur de couloir. Et pour porter des attaques librement, ils doivent y aller en solo...
Derrière lui au-travers du couloir, les lueurs orangées. Et l'écho cacophonique de dizaines de hurlements atroces qui s’élèvent, qui remontent dans le tunnel ténébreux. Les beuglements sans fins de Charir le Troll qui n’est guère parvenu à se sortir de la fosse. La quarantaine d’Uruk-Haï rescapés se rameutent et s’agglutinent dans l’étroitesse dégagée du couloir. A pas de course pour certains, à pas boiteux pour la plupart… Fuyant le brasier qui s'allume. S'apprêtant à combattre. Derrière les visières de leurs casques, leurs yeux semblant d’ordinaire si durs, larmoient aux hurlements sans fins de leurs camarades qui brûlent. Tout comme Skulaï. Ils pleurent, et ils bavent de rage…

***

Il a embroché son premier défenseur de la barricade alors que celui-ci se traînait à terre sans rendre les coups, cherchant à se remettre sur ses genoux. Le deuxième est tout aussi perdu que le premier, indifférent du martèlement à répétition que lui fait subir l’enfant Orque, qui le frappe à répétition sur sa nuque casquée.
Le Troll domine le cœur de ce goulot d’étranglement. Dans son sillage, la troupe progresse en se faisant prendre à parti de toutes parts par les renforts ennemis qui sortent des bâtiments pour contenir leur assaut.
L’Homme que l’enfant Orque maltraite est comme absent. Lui et son groupe assailli vivement par les snagas couinants n’ont qu’une seule idée en tête : s’enfuir au-travers de la brèche dans le mur qui débouche à la ruine qu’Amante a ouverte à l’assaut.
Les combats et la confusion qui y règnent font bloquer les Hommes à l’entrée, et celui-ci le plus derrière attend littéralement son tour, sous les coups de l’enfant Orque.

Un Uruk rescapé de la fosse à feu finit par remonter dans son dos et par bourrer l'ouverture, jetant un soldat ennemi à l'intérieur pour l’y hacher menu.
Entre deux coups sur l’arrière de sa victime chancelante, il perçoit les cors de l’arrière, qui sonnent le repli. Au-travers de la rue, l’assaut reflue rapidement dans les couinements et les gémissements vagissants. Le Troll marquant la queue du repli, tenant les Hommes qui voudraient les pourchasser en respect.  
Pif rond revient vers lui à toutes pattes et hurle l’ordre de repli en rentrant dans la ruine. Il enjoint du bras l’enfant Orque à le suivre, qui ne termine même pas sa victime prostrée devant le trou.
« On se casse ! Hurle-t-il. Sortez ! Redescendez des étages, magnez-vous ! »

Ironiquement, Pif rond  fait tout l’inverse de ce qu’il ordonne. Pénètre en force à l’intérieur de la ruine en frappant à grands coups tout ce qui a une armure trop argent, une face trop rose, et souvent un visage trop apeuré. Pif rond perce à toutes jambes jusqu’à l’escalier, qu’il gravit à rudes enjambées en continuant de hurler son ordre de désengagement aux gars qui sont montés massacrer les archers dans les étages. L’enfant Orque s’efforce de suivre tant bien que mal. La ruine est plongée dans un brouillard de poussière, de la fumée noire qui émane de la boule de feu qui a atterri dans la large pièce. Entre les piliers ébréchés de la large salle, une mêlée confuse règne entre assaillants de Thurgix et Hommes qui déboulent par des issues intérieures. Beaucoup de prises à parti individuelles. L’enfant Orque marche au-travers de décombres et de gravats jonchés de cadavres.
Il atteint l’escalier qu’a gravi quatre à quatre Pif rond et continue d’enjamber des corps morts à l’étage, voyant des congénères massacrer en vitesse des défenseurs malmenés avant de tourner les talons pour sortir. Ses yeux le piquent. Il se couvre la bouche de sa manche pour s’efforcer de respirer dans la fumée, trottinant sur l’espèce de chemin de ronde que forme le sol antiquement éventré de la ruine. Il n’a pas parcouru la moitié de la longueur vers l’étage suivant, longeant les arches d’où pleuvaient les flèches ennemies de cette bâtisse, quand Thurgix redescend en trombe l’escalier en entraînant avec lui la poignée de gars.
« Qu’est-ce que tu comprends pas dans un ordre de repli, gamin ? » Lui souffle Thurgix en l’empoignant pour lui faire rebrousser chemin.

Les guerriers qu’est venu récupérer Pif rond ne les attendent même pas. Kraka, Garz, et une paire de jumeaux Gobelinoïdes de la Cohorte Disciplinaire revenue parmi eux, les doublent en courant tels de la racaille prise en flagrant délit. Descendent tous en vives bonds au-travers des escaliers. Ils détalent au-travers du foutoir de la pièce. Au rez-de-chaussée, deux Hommes fuient le courroux d’Amante en se faufilant par le trou latéral côté gondorien. Amante projette un coup de marteau titanesque dans la façade, qui saigne un effondrement de rocs et de pierres sur l’entrée. Les Hommes courent au-travers de la ruine sans arme, comme des poulets sans têtes...

« Repli !» Aboie une nouvelle fois Pif rond…
Deux autres Hommes, bien en armes ceux-là, tentent de leur barrer la fuite dans l’escalier, venant successivement à la rencontre de Pif rond. Pare et frappe de sa masse d’arme le premier dans la tempe, le fait chuter de l’escalier. Pare et rabat le second contre le mur, frappe deux fois, lui pliant la cuirasse  et broyant se poitrine au-dessous. Une autre boule frappe de plein fouet l’édifice, qui tremble et s’ébranle dans des volutes de poussière. Des effondrements commencent à survenir dans la ruine. Frénétique, Thurgix se jette sur le flot d’Hommes qui continuent de venir malgré tout des entrailles des lieux, les bourrant pour les repousser et protéger le repli. Alors que l’enfant Orque descend au rez-de-chaussée, toute une portion de l’avant éventré de la ruine s’ensevelit dans l’effondrement de la façade avant. Il ne subsiste que d'étroits goulots donnant sur les flammes des brasiers.
Pif rond ne pourra jamais sortir !
Dans la ruine, Pif rond grogne en continuant de se battre contre une nuée d’Hommes qu’il s’est efforcé de refouler dans les entrailles de la ruine pour couvrir le repli de ses gars.
L’enfant Orque tente de venir l’aider, mais un roc de catapulte cause un nouvel effondrement…
Pif rond va mourir...

Des mains puissante l’attrapent et le projettent en roulé boulé dans le ventre de la ruine fumante, le faisant rouler de profil sur les gravats et les morts. L’enfant Orque s’amortit à deux pas de la boule ardente qui enfume la ruine. Son dos, ses brûlures le torturent. L’Homme ramasse du sol une arme d’Orque, un imposant marteau de guerre qu’il élève à deux mains.
Il a une lueur folle dans le regard, des yeux injectés de sang. Au-travers d’une écharpe lui couvrant le visage, il meugle comme un Uruk. L’enfant Orque rampe en arrière face à son avancée et a tâtonne en quête de la première arme qui lui passerait sous la main.
Tâtonne sur la dépouille emplumée d’un corbeau mort…
La machinerie qu’il ramène en pointant devant lui claque, expédiant son projectile.




Dernière édition par Karess le Jeu 13 Juin - 22:57, édité 16 fois
Karess
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[An Orc Story - Univers Seigneur des Anneaux] - Premier Sang pour l'enfant Orque Empty Re: [An Orc Story - Univers Seigneur des Anneaux] - Premier Sang pour l'enfant Orque

Message par Karess Mer 15 Mai - 21:15

VII : Du sang pour du sang  




Pendant un long moment, Skulaï et la tête de groupe ennemie se lorgnent menaçants et hargneux, chacun de son côté de la grille, tenus mutuellement en respect par cet obstacle. Leurs deux opposants directs sont accroupis, piques tendues. Deux autres également accroupis derrière eux, échelonnant leurs piques. Quatre autres encore debout pointent leurs armes par-dessus leurs pairs selon le même schéma. Et d'autres, à leur suite dans l'obscurité du tunnel, en nombre, prêts à les relayer.

Deux javelots sabrent l'air depuis le dos de Skulaï, frappant de plein fouet deux Hommes en pleine poitrine. Skulaï charge sur la grille, Galgril à son côté. Boucliers à bouts de bras. Forcer le passage. Faire reculer l'ennemi.
Les piques frappent à l'unisson. L'une d'elles creuse son compagnon dans le bas ventre.
Galgril bascule sur la grille dans un râle de douleur.
Skulaï dévie les piques de son bouclier, de sa hache. Se jette à corps perdu sous les armes d'hast qui viennent relayer celles tombées.
Son flanc, son épaule lacérés par des pointes d'acier... L'Orque en a vu d’autres mais lâche quand même un grognement.
Bourre comme dans une mêlée pour faire reculer les Hommes de la grille.  Percute l'accroupi, qui roule en boule dans la crasse contre le mur. L'Orque fend le crâne de celui-de derrière, qu'il envoie s'effondrer dans ses compagnons.

Un autre javelot qui traverse l'espace. Un autre piquier qui tombe à la renverse. Ceux qui suivent en enjambant les cadavres de leurs semblables viennent pour l'embrocher en hurlant de fureur.

Le demi-Orque se désengage vivement. Isolé dans son sillage, la Némésis accroupie de Galgril ne parvient pas à décoincer sa pique, coincée sous le poids de l'Uruk à terre dans son ventre, et par Galgril qui emploie ses dernières forces et volonté à agripper la hampe de l'arme.
Hoquetant de surprise, l'Homme tente de tirer l'épée.
Skulaï se jette sur lui en grognant et lui empoigne la tête. Le cogne férocement contre le mur. Deux guerriers en armures, puis quatre, s'efforcent de passer sans trébucher au-dessus de la grille et partent à toutes jambes tenir tête aux piquiers à l'avant, laissant Skulaï besogner sur celui-ci. Ceux qui sont habiles à la lance n'hésitent pas à employer leurs armes d'hast grossières d'Orques comme javelots, aussi mal équilibrées en poids pour le rôle soient-elles, avant de revenir prendre les piques, plus longues. Plus dissuasives.

Parmi eux, Skulaï plaque l'Homme contre le mur et lui ôte l'épée du fourreau, l'envoyant se perdre dans la crasse du tunnel parmi la cohue de ses congénères.
Il ne veut pas juste le tuer en lui rompant le cou vite fait bien fait. Il veut qu’il souffre. Qu’il hurle pour ce que les Hommes leur ont fait à l’instant. Le Charnier. Ces fosses à feux de l'enfer ! Calant ses grosses mains vertes sur le visage sonné à l’intérieur du casque qu’il tient à bouts de bras, Skulaï lui laisse quelques secondes pour reprendre ses esprits et le regarder les yeux dans les yeux… Avant de lui enfoncer les pouces dans les siens pour les lui broyer. L’Homme hurle, gigote et est pris de spasmes à mesure que Crocs Blancs accentue la pression toujours plus. Il tape et agrippe plus par réflexe nerveux que par réelle tentative coordonnée les épaules massives du colosse vert dans le vain espoir de se libérer.
C’est presque comme des caresses sensuelles aux yeux du demi-Orque. Quelque chose de virulent et de puissant est en train de s’emparer de Skulaï, brûlant ses entrailles et faisant pulser ses veines en feu et ses tympans. Et il l’accueille à bras ouverts...
Les globes oculaires de l’Homme craquent comme des oeufs...   


Les Uruk-Haï de tête se mettent en postures boucliers dans un rugissement. Deux lignes se forment, main du compagnon de derrière sur l'épaule, les uns à la suite des autres. prêts à se relayer. Ils n’ont même pas attendu l’ordre de manoeuvre tonné par Yashnarz à travers le tunnel pour savoir ce qu’ils avaient à faire s’ils veulent se sortir de ce merdier.
Face à eux, les Hommes d'armes de Dol Amroth n'ont pas de boucliers, le truc qui les aurait condamnés pour de bon. Tout dans le piège cela dit, les longues lances de Dol Amroth, l'étroitesse du couloir où ils montent la garde, leur confère un avantage meurtrier sur les piégés. La seule chose qui joue en leur faveur, ce sont les préjugés sur la race Orque. Comme toujours, les Hommes, ceux qui ne font pas partie de la soldatesque qui a la véritable expérience des combats, se sont attendus à avoir face à eux des porcins qui chargeraient en hurlant sur leurs piques. Les princiers Hommes d'armes de Dol Amroth qui ont pris sur eux en ce jour pour descendre dans l'antique crasse ténébreuse des égouts sont surpris et pris au dépourvu de se retrouver face à des militaires qui opèrent de manière coordonnée et de sang froid, opposant leurs boucliers et leurs propres piques récupérées sur leurs morts, sans les charger, gagnant du terrain d'un pas à la fois, feintant parfois un passage à l'attaque avant de se raviser et de gagner encore du terrain. Quand les Hommes tentent de piquer, les Uruk-Haï gardent leur flegme, se contentant de dévier les attaques de leurs boucliers et de leurs armes levées. Aux coups de sifflet de Yashnarz, ils se désengagent pour laisser leurs compagnons de derrière prendre leur place, qui continuent la manoeuvre. L'horreur de ce à quoi ils ont échappé de justesse et de toutes leurs pertes n'a pas attendu pour se muer en une rage viscérale et froidement déterminée. La vingtaine d'Uruk-Haï en état de combattre fait front entre la Garde et ceux qui sont trop mal en point pour combattre.

Les fantassins Orques de l’Oeil Rouge survivants tentent de se faufiler parmi les Uruk-Haï pour les soutenir au combat, mais les Uruk-Haï les dégagent et les repoussent sans douceur en arrière.
«Vous dégagez les snagas ! Leur grognent Nenag, Unriirt et d’autres.
— Mais on n’est pas des snagas ! S’indigne l’un d’eux en cognant sur son marquage d’Orque des Légions...
— C’est ça ! Rien à foutre ! Aboie Unriirt. Traînez pas dans nos pattes ! Ne gênez pas la manœuvre, ça nous met autant en danger que vous ! Vous connaissez l’refrain !»
Bizarrement, aucun Uruk n’émet la moindre protestation tandis que le Chaman à tête de bouc descendu parmi eux se faufile entre leurs lignes, allant et venant sereinement.

Le coup de sifflet de Yashnarz retentit, entraînant un nouveau relai. Unriirt monte dans le rang sans même écouter les protestations aigües du Gobelin.
Et encore un autre.
Quguug le Commandant lui-même est dans la manœuvre comme n’importe lequel de ses gars. Quand  son tour arrive, son camarade d’épaule jette un javelot au-travers du couloir, abattant le gars d’en face. L’Uruk à la pique surgit des boucliers en confrontant son arme à une partie de celles d’en face. Tandis que le Commandant lui, s’élance à la rencontre de son adversaire, dévie les dernières piques face à lui et lui assène un coup de hache en plein cou, bourre le cadavre dans ses semblables en portant une autre attaque, avant de battre en retraite et de laisser ses compagnons remonter jusqu’à lui.
Un nouveau coup de sifflet de Yashnarz. Le Commandant revient en arrière, double le tour d’un guerrier lambda en lui disant d’aller voir à l’arrière si il y est.  
« Je peux me battre bordel ! Je vais bien ! » S’insurge Togreh.
— J’avais même pas vu que c’était toi, lui dit Quguug. Rien à foutre, c’est Yash, Skulaï et moi qui gèrent les offensives, alors prends ma place sur l’arrière, c’est un ordre soldat. Et trouvez-moi un javelot pour mon binôme !»

Sur le devant, Yashnarz siffle, et passe en avant. Une fois encore, un Uruk armé d’une pique s’élance à son soutien, se faisant embrocher l’épaule dans un mugissement. Yashnarz s’élance à l’attaque. Son katana de Khand dévie les piques qui lui font face et fend les adversaires dans ses cris d'attaque rauques, sabrant des visages humains.
Skulaï revient juste après à la charge, piétinant les cadavres humains laissés dans le sillage du Lieutenant pour en faire des nouveaux. Il a ramené avec lui sa victime aux yeux broyés,, qu’il envoie se clouer en écran de chair sur les piques ennemies avant de s’élancer pour hacher les Hommes de tête.
Le sifflet de Yash doit retentir à plusieurs reprises, siffler frénétiquement pour faire remonter au colosse vert assez de discipline inculquée pour se désengager et se faire relayer.

Il recule parmi les siens pour se remettre dans le relai, respirant lourdement entre les deux lignes hargneuses… Toute la troupe s’est trouvée inspirée par son idée. Les gars font comme lui. Les morts de l’ennemi sont convoyés au-travers des lignes. Ils deviennent de véritables matelas à clouer sur les piques ennemis quand ils avancent. La fin justifie les moyens. Reste à déterminer si cette fin, c’est de se sortir vivants de ce traquenard, ou d'emporter avec eux un maximum d'ennemis avant de mourir.

***



Les légions du Mordor ont fui autour des fournaises de l’Orgie Rouge la queue entre les jambes sous les flèches et les jubilations moqueuses des archers ennemis. Hormis de leur côté où ils ont pu rendre la monnaie de leur pièce à leurs ennemis… Les cœurs battent encore à tout rompre, et les gars de la troupe composée en lambeaux halètent en reculant d’un pas traînant, la tête basse, repliés sur eux-mêmes et sans formation. La peur luit encore dans les yeux. Même Amante le Troll traîne de son lourd pas et a l’air blasée de faire partie de cette histoire.
Quelques gars de Yashnarz, Skarbög, Murtzen, Kronnen, Lugdurf, Dallug, et d’autres qui ont réussi à se hisser hors de la fosse leur collent au train, marchant parmi eux dans le silence parmi les blocs de ruines et de gravats qui flanquent la bordure sud de l’Orgie Rouge, qui ressemble plus à une termitière maintenant...
A moins de cent mètres, à la frontière de cet espacement absurde qui leur est laissé par la ligne disciplinaire des Hommes de la Tour, on frôle la mutinerie entre celle-ci et la vague d’Uruk-Haï en déroute, qui se voit aboyer des menaces d’exécutions sommaires. Comment osent ces sales schräk ? Grogne Ourykh. On ne menace pas d’exécution sommaire l'engeance Uruk des Légions ! Que va faire la Tour s’ils se révoltent ? Leur envoyer l’armée ? C’est eux, l’armée !

La moitié de leur troupe composée a été décimée… La colère noire alterne avec la démoralisation pure et simple qui donne envie de s’asseoir dans la poussière la tête entre les bras. Le sergent y est resté... Piégé par un effondrement aux prises avec un contingent ennemi ; Piégé par un effondrement aux prises avec un contingent ennemi ; Thurgix a dû se tailler en pièces… Martivyr se décide à venir à la rencontre du petit Adjudant Lerüg. Le gobelin trapu aux traits du naturellement malicieux est assis sur une fondation de maçonnerie et jure dans des murmures… Le Maître de Discipline n’a plus de cape et plus de casque. La première a pris feu alors qu’il a trébuché dans son repli aux abords de la fournaise. Il a perdu le second en se démenant pour arracher la première. Il passe mentalement sur le fait évident qu’aucun Orque n’allait et n’a essayé de lui venir en aide, le laissant à son sort, se dépêtrer tout seul des flammes sur son habit. Un Maître de Discipline qui y est resté ? Buvons pour fêter ça, Doivent se dire les troupiers à chaque fois que ça arrive !  
Après s’être extirpé du pont et de ses habits en feux, Martivyr a dû éviter un tir de scorpion, et maîtriser un ingénieur gobelin à la charge le temps de parvenir à leur faire comprendre qu’il était l’un des leurs...
« On pouvait rien faire là-bas, hein ? Murmure Lerüg…  Vous êtes témoin du merdier que c’était, hein Maître ? On pouvait rien faire là-bas…»  
Ils ne pouvaient rien faire là-bas. Martivyr et lui le savent aussi bien l’un que l’autre…
Le problème, c’est que ça n’est pas l’un- l’autre qu’ils doivent convaincre.
« Écoutez, Adjudant… Relevez la tête et écoutez-moi, Gobelin ! Le sergent n’est plus des nôtres. Sans mon habit, la troupe ne voit pas un Maître de Discipline mais un pauvre Homme aux joues toutes roses, comme ceux d’en face. Je ne peux pas les mener. Vous êtes le dernier gradé dans le coin, alors jusqu’à ce qu’on ait une nouvelle unité à laquelle se greffer, c’est à vous de le faire.

— Comme si les Uruk-Haï allaient me suivre… » Lâche-t-il résigné.

— Il suffit d’employer le ton qu’il faut et même un Maître de Discipline se pliera à vos ordres. C’est ce que votre ami Thurgix a fait tout le long de la soirée. Vos… "Gars", sont démoralisés. C’est une vraie saloperie la démoralisation, c’est une chape de faiblesse et de défaitisme croissant qui va tous vous écraser et vous rendre inaptes, vous devez lutter contre elle. Secouez vos Orques. Donnez-leur des ordres. Trouvez-leur des occupations, n’importe quoi, même balayer et lustrer cette maudite ruine si c’est tout ce que vous avez ! L’important, c’est qu’ils soient actifs et qu’ils ne ruminent pas sur leur échec. Sympa la bannière, au fait. Pas très règlementaire mais l’idée mérite d’être approfondie...

Lerüg a un début de sourire en dépit de l'amertume. Sur leurs arrières, les Uruk-Haï reviennent, eux-mêmes partagés entre l’aigreur et l’abattement...

— Eh schrak… » Peste Lerüg.  Bondissant de son arrière-train sur ses chausses, il prend une forte inspiration. Dresse le dos. Prend sa bannière avec lui. Lerüg se secoue et marche d’un pas ferme pour se mettre face à sa troupe, des gars qui sont prostrés à l’abri du mur de brique de leur ruine, certains qui se sont laissés tomber par terre dans la poussière…

« Oh les gars ! On va se secouer. La guerre n’est pas finie. On a un front à tenir. »

***

Le combat dans le tunnel, la manœuvre Uruk, les piquiers qui reculent pas à pas... Ca semble durer une éternité. Skulaï et ses deux supérieurs totalisent une douzaine d’Hommes à leurs tours. Ca ne met toujours pas en déroute les piquiers, qui peuvent aussi bien être vingt qu’ils peuvent être cent, mais Heh, pour leur rendre la monnaie de leur pièce, jusqu'ici, on peut dire qu'ils se débrouillent bien. Trois autres des guerriers Uruk-Haï se sont fait blesser par les piques. Quand cela arrive, les Uruk-Haï enchaînent le relai tandis que ceux de derrière les traînent à l’arrière. Nenag s’efforce de porter le massif Khuug, qui saigne abondamment de la cuisse.
Deux d’entre eux sont mourants. Leurs camarades déjà trop mal en point pour se battre suite à leur chute dans la fosse à poix les réconfortent dans les ténèbres à l'arrière, pour le temps qu’il leur reste à vivre.

Puis survient leur aubaine salvatrice, se présentant sous la forme d’un de leurs adversaires. Un jeune soldat fougueux qui troque sa pique contre une épée qu’il tire du fourreau, et s’élance à la rencontre de Skulaï à l’offensive. Celui-ci a un bref rictus de satisfaction et de mépris.
Parant la frappe d’estoc de son adversaire, il lui expédie son genou dans le ventre et le jette à terre devant les siens. Une bonne pièce de viande pour des fauves. Tandis que le malheureux émet des plaintes et hurle en se débattant, battant l’air de son épée dans une vaine tentative de ne pas se laisser emporter, les hommes face à Skulaï sont gagnés par une espèce d’affolement collectif qui les fait charger comme si c'étaient eux, les désespérés. Même massif gorille dans cet étroit tunnel, Skulaï se feinte des piques, des épées tirées qui frappent vers lui, avant de riposter brutalement. Un assaillant voit la hache du demi-Orque lui fendre la face. Skulaï bourre et plaque ses assaillants et abat un autre piquier de deux coups de haches au-travers de son armure pectorale. Pour ce que Skulaï en comprend dans le baragouin affolé des Hommes face à lui, ils ont chopé le fils du Commandant.
Vu comment celui-ci se démène pour venir implorer des demandes de pourparlers, il faut croire qu’il a vu juste. Tandis qu’il recule entre les lignes en progression, il voit Yashnarz ordonner à un Uruk de suspendre son geste, l’empêchant d’égorger l’Homme. Quguug remonte entre ses guerriers le tunnel pour venir faire face à son homologue adverse.
«Wolgu, s’arrête-t-il en chemin. Mon vilain petit indiscipliné… Toi et les tiens, vous avez encore ramené vos outres de grog en douce pour vous saouler, alors que vous savez bien que c’est interdit sur le terrain, pas vrai ?
Après une brève hésitation, Wolgu et deux-trois gars dévoilent leurs outres, coupables.
« Je l’avoue… » Reconnais Wolgu avec un rictus cruel. Quguug hoche la tête et part dialoguer.

Les deux groupes sont à l’arrêt et s’observent en chiens de faïence, chacun retranché de son côté. Une torche en main pour s’éclairer, Quguug s’avance en donnant mécaniquement nom et matricule. L’Homme lui-même porteur d'une torche, fait de même. Décline grade, nom et principal titre. Tous, même Quguug, l’ont oublié aussitôt, probablement son nom s'est-il échoué dans cette zone de pénombre opaque qui les sépare...  
Quguug s’assure que l’Homme comprenne distinctement son élocution, rendue désastreuse depuis qu’on lui a amputé les lèvres reconnaît-il. Si son homologue le souhaite, l’un de ses seconds peut faire l’interprète. L’Homme lui dit qu’il parvient à le comprendre.
« Vous ne sortirez pas d’ici vivants par la force, Orque. Vos tours n’y changeront rien, vous êtes face à un détachement complet de piquiers de Dol Amroth, donc pas les premiers guignols venus. On connaît notre office. Les javelots semblent vous manquer à présent, et le grand vert que vous avez avec vous finira par se faire gravement blesser. Le vieil Uruk au katana aussi. Vous aussi, sauf votre respect… »
Quguug se tient droit face à l’Ennemi, prend deux lourdes inspirations. Comme pour digérer l’information...
— Je sais, concède-t-il doucement… Mais votre troupe semble être une histoire de famille, à ce qu’on me rapporte…»
Le Commandant du Gondor acquiesce : « La seule carte que vous avez en main, c’est que vous avez mon fils. Relâchez-le, et je vous donne ma parole que nous vous laisserons le champ libre pour partir. Nous vous libèrerons la galerie qui mène à vos lignes.
Quguug regarde vers le sol, en détresse, manifestant qu’il commet en ce moment même un sacrilège de soumission…
— Chaque Uruk qui se tient ici est un fils et une fille pour moi, lâche-t-il en articulant difficile-ment avec ses lèvres amputées… C’est un marché honnête… Il y a eu tellement de morts, déplore-t-il dans une voix se réduisant à un murmure… J’ai… J’ai vu des bons gars à moi mourir brûlés vifs là-bas… Leurs cris vont me hanter à jamais… On a nos ordres, mais on est comme vous vous savez… On veut juste sortir en vie de ce merdier et rentrer chez nous dans nos antres... Mais je n’ai aucune garantie que je peux vous faire confiance...»
Le Commandant ennemi, « l’Ennemi », commence à se faire hésitant lui aussi. Un peu comme si ses acquis et sa vision du monde étaient en train d’être impactés. Un ennemi qu’on lui a toujours dé-peint comme un monstre sanguinaire est en train de faire part de son humanité, de son attachement pour les siens…
« Je vous donne ma parole de soldat, promet-il dans un souffle. Renvoyez-moi mon fils. Il y a un embranchement un peu plus loin. Mes hommes partiront de leur côté, et vous du vôtre… »
Quguug regarde avec hésitation vers ses guerriers, inflexibles.
« Je n’ai aucune garantie matérielle, pourtant je sens que vous êtes de bonne foi… Très bien… J’accepte… J’apprécie sincèrement que nous ayons pu régler cela de cette manière, Commandant…
L’autre ne répond pas mais semblerait presque ému.
« Ramenez le captif, les gars !» Appelle-t-il. Derrière lui les Uruk-Haï le font remonter sans le moindre ménagement. Quguug fait mine de le prendre paternellement et de le pousser en avant, dans l’espace neutre.
Il goutte abondamment de liquide. Wolgu et ses gars ont vidé leurs outres de grog aussi inflammable que de la poix sur le fils du Commandant tandis que Quguug discutait. Quguug lui caresse le dos de sa torche enflammée, le faisant s’embraser et brûler vif, comme ses Uruk-Haï un instant plus tôt.
« Sans rancune Commandant ! Ricane Quguug. Je vous savais sincère, mais en vérité, je m’en branle. Ca, ça  nous met à égalité. »

Derrière lui, toute la meute d’Uruk-Haï se gausse de la bonne comédie que leur a jouée leur Chef. Leur captif hurle et hurle encore, tourmenté par les flammes sous le regard impuissant de son père...
Il hurle et se consume encore lorsque les Uruk-Haï reprennent le combat en le poussant de l’avant en écran flamboyant aux piques, scandant comme ils le feraient lors d’une bataille rangée dans une plaine.
Ils passent à la vitesse supérieure, plus offensifs, plus de relais qui passent à l’attaque. Wolgu, Nenag, Unriirt… Togreh en dépit des ordres… Ils encaissent plus de blessures, et Ucli et Shurgi, deux solides femelles de la troupe de Yashnarz, ne verront pas la sortie des égouts.. Mais eux ils massacrent une douzaine d’Hommes de Dol Amroth en plus. Et quand le reste de leurs adversaires malmenés sont repoussés à la fameuse intersection, qui leur a été arrachée de forces, les Uruk-Haï ne s’engouffrent même pas dans "la bonne intersection" pour fuir. Ils continuent de les malmener à travers le tunnel, poussant des hurlements de loups et des hululements de canidés.


***


Les brasiers dans l’Orgie Rouge continuent de s’élever ardents au milieu de l’avenue, rougeoyant dans la nuit noire, causant des éclats de pierre et de nouveaux effondrements sporadiques, quand l’Ennemi lance une contre-attaque sur les flancs de la longue avenue. Derrière eux, la moitié des autres contingents sont envoyés soutenir les flancs. Lerüg et ses gars, eux, ils observent du sommet béant de leur ruine en briques les contingents d’argent progresser sur le nord et le sud pour prendre l’avant-garde de l’armée en tenailles, sans rien pouvoir faire d’autre qu’attendre, la pire occupation du soldat moyen…
Au bout d’un temps, quand les brasiers s’atténuent et laissent progressivement place à des chapes de fumées épaisses et opaques, funestes, un bataillon d’Hommes mené par des cavaliers aux habits bleus et arborant le cygne blanc de Dol Amroth commence à apparaître à l’opposée de l’Orgie Rouge, s’apprêtant à passer en force sur le pont de pavés qui subsiste entre les deux charniers fumants.
« Euh… Ils vont vraiment se risquer à traverser ce truc ?
Lerüg grogne. Les "renforts" promis se sont réduits à deux pauvres troupes de fantassins de l’Oeil meurtries comme la sienne par les escarmouches et les combats pour tenir tête aux prises de flancs de l’Ennemi, et par la nouvelle que l’ennemi est en train de les prendre salement en étau.
Lerüg aboie aux ingénieurs du scorpion de faire tirer leur machinerie. Un carreau part dans un lourd claquement ébranler la sortie ennemie. Et en face ils continuent malgré tout d’avancer.
« Nop ! Ils bluffent pas... Encaisse mentalement Lerüg en sentant les sueurs froides le gagner… Tenez-vous prêt ! »
Sur son ordre hoqueté, Amante vient se tenir au grand jour face aux Hommes pour les faire réfléchir à deux fois avant de les attaquer. Les petits Orques et Uruk-Haï s’élancent à découvert en serrant les dents. Se déploient aux côtés du monstre, qui grimace menaçant. Dans leur cul, les Hommes de la Tour ne bronchent pas, les regardant s’apprêter à crever sous leurs yeux dans une indifférence impériale. C’est à peine s’ils ne pique-niquent pas… Ils déploieraient une bannière injurieuse comme la sienne à leur attention, que ça serait pareil !

Et pendant c’temps là, la troupe de chevaliers ennemis qui vient s’aligner face à eux, brandissant les épées pour s’apprêter à charger et faire se ranger derrière eux leurs hommes qui suivent au pas de course cadencé dans leur sillage ! Mais quelle chance de s’en sortir est laissée au pauvre petit Lerüg ?
Ils voudraient tant que le pont s’écroule et emporte toute l’attaque dans la tombe comme leurs frères d’armes ; ça, ça égaierait bien leur soirée... Face à eux, le détachement ennemi compte au moins deux-cents Hommes à pied derrière trente chevaliers sur de lourds destriers. Jamais ils ne pourront tenir tête à un truc pareil !

Mais imité par les Uruk-Haï en tête, qui cognent sur leurs boucliers de leurs armes et aboient des injures et vulgarités peu flatteuses sur leurs génitrices, Ourykh les provoque : « Allez, arrêtez d'vous pavaner et v'nez, venez vous battre ! Lavettes ! » Au moins, les grands cons le sentent mieux que lui, ça le réconforte un peu dans son malheur... Puisqu'ils le sentent si bien, se dit Lerüg...

Appelant à le suivre la moitié arrière de sa troupe disparate, Lerüg tente de reculer pour aller quérir plus de renfort. L’espèce de barrage d’Hommes de la Tour, avec arcs, scorpions et piques qu’ils ont dans le cul depuis tout à l’heure se met à aboyer des sommations à leur approche…
« Halte ! » Leur aboie un Homme.
« Halte toi-même pauvre con ! Lui retourne Lerüg avec aigreur. L’Ennemi contre-attaque en force droit sur nous, on aurait grand besoin de toi à l’avant ! »
Toutes ces armes auraient tellement fort à faire si elles étaient déployées sur les ruines en bordure de l’Orgie Rouge, déversant leurs grêles de projectiles sur l’avancée ennemie, leurs haies de piques qui stopperaient net leur contre-attaque…
« J’ai dis Halte ! Au nom de la Tour, pas un pas de plus en arrière ! Retournez à vos postes ! »
Dans quelle langue doivent-ils parler à ces demeurés pour leur faire comprendre que quand l’Ennemi les aura piétinés et taillés en pièces, leur tour suivra aussitôt ?!
Martivyr, Maître de Discipline de son état et diplomate improvisé à ses heures, tente de s’avancer pour appuyer les dires de l’adjudant Gobelin. Lerüg tente de le retenir du bras.
Afin d’amoindrir les risques d’exploser sa jolie petite face toute rose d’Homme dans la mêlée en le prenant pour un ennemi dont il partage le teint, Lerüg a demandé aux fantassins de l’Oeil Rouge, qui trimballent toutes sortes de trucs et de machins sur eux, de lui barbouiller la figure avec des peintures de guerre, histoire qu’il fasse le plus "Orque" possible.
Le hic, c’est que là ils ont à faire à ses confrères, et lui n’a plus du tout l’air d’un Maître de Discipline. Sans sa cape et son casque, il passe pour un troupier benêt.  
L'Homme le coupe en énumérant à voix haute la violation flagrante d'un article du code militaire, ponctuant d'un geste autoritaire de la main à l'attention de l'un de ses subordonnés archers, qui décoche un trait. Martivyr se tétanise, l’expression figée comme si l’autre lui avait sorti une blague pas drôle.  
Une blague sous la forme d’un trait dans le ventre qui fait ruisseler son sang pourpre hors de sa cuirasse. Le Maître de Discipline s’écroule à terre en succombant aux pieds d’un Lerüg atterré.

Des grondements commencent à remonter dans les gosiers des Uruk-Haï présents.
Ils viennent d’empoigner leurs armes et s’apprêtent à faire éclater pour de bon cette mutinerie qui plane dans l’air depuis un moment, rapidement imités du reste de la troupe composée et de Lerüg, quand la Tour lui-même apparaît derrière sa suite. Tous geignent et se soumettent craintivement, pris de sueurs froides, regardant la terre. Certains laissent même choir leurs armes à terre. Non ! Ils ne veulent pas reculer ! Ils vont avancer, oui ! Ils vont avancer, selon son commandement ! Ils vont retourner en avant et payer leur affront de leur mort en combattant pour Lui jusqu’à la mort ! Son aura est si terrible…

***

La troupe dans le tunnel s’époumone dans une louange rauque qui la parcourt de tout son long sur ses deux lignes de combattants. Les hommes d’armes abandonnent leurs piques encombrantes et tournent les talons, fuyant au-travers du réseau souterrain la queue entre les jambes. Quguug leur crie son nom, pour que le Commandant toujours en vie ne l’oublie jamais…
« Il est temps de faire ton choix, "Crocs Blancs" Skulaï, lui souffle le Chaman avec une douceur paternelle.  
«Quoi ? »
Le Chaman pointe le doigt vers l’intersection momentanément délaissée par leur groupe.
« Par ici, la retraite, le bon sens et le repos. Les combats que toi et les tiens mènerez jusqu’à la fin de la nuit ne seront plus que pure formalité. Mais dans ton sommeil, tu entendras tes ennemis rire de cette mort atroce et humiliante qu’ils ont fait subir aux tiens…»
Son doigt se réoriente pour pointer l’avant, le combat…
« Et par là, la voie du Berserker. Des carnages, des possibilités de vengeance. Et la conclusion de l’Ordalie orchestrée par le Grand Karess entre ses champions…
— "Ses" champions ? Skulaï empoigne le Chaman par la gorge, le plaquant contre la paroi du mur entre ses camarades, qui couinent et le contournent en le laissant à ses querelles.
« Vous nous dîtes sans arrêt que Moi, que Nous, la 18ème Légion, Nous sommes "Ses" élus ! Qu’est-ce que tu me chantes ? Que le Grand Karess a désigné des élus parmi nos ennemis ? »
Le Chaman part d’un ricanement étouffé derrière son masque de bouc.
«Evidemment ! Que le Grand Karess a marqué des élus au Gondor ! Comment orchestre-t-il l’Ordalie, sinon ? Tu n’as pas été très attentif jusqu’à présent si tu as cru que te choisir pour Élu signifiait qu’il soutenait ton camp... Karess ne soutient aucun camp ! Karess se fout de qui l’emporte en cette nuit ! Le Mordor… Le Gondor… Tout ce qui l’intéresse, lui, c’est l’Ordalie ! Reconnaître lequel de ses élus est le plus méritant pour recevoir ses faveurs ! Et Malheur  aux vaincus…
— Je devrais te broyer les yeux, comme je l’ai fais pour cet Homme !
— Je t’y invite ! C’est Lui qui me les broiera ! A travers toi !»
Skulaï relâche la gorge du Chaman et monte à grands pas au-travers des lignes triomphales.  

Jette un regard à Yashnarz et à Quguug pour avoir leur assentiment. Quguug acquiesce d’un hochement prononcé de sa grosse tête.
« Fais-les souffrir pour ce qu’ils ont fait, Crocs Blancs. » Lui dit Yashnarz.

Jetant son bouclier pour le troquer contre une épée en plus de sa hache, Skulaï s’élance au-travers du tunnel, sur les talons des survivants de la soldatesque aux cygnes, rattrapant et massacrant un par un les traînards…

« Cinq gars, plus les snagas pour rapatrier les blessés. Les autres, en avant ! Crocs Blancs leur sonne les cloches, et nous on marche sur ses pas pour les achever ! » Lance Quguug.


Dernière édition par Karess le Sam 15 Juin - 17:10, édité 12 fois
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[An Orc Story - Univers Seigneur des Anneaux] - Premier Sang pour l'enfant Orque Empty Re: [An Orc Story - Univers Seigneur des Anneaux] - Premier Sang pour l'enfant Orque

Message par Karess Dim 19 Mai - 15:32

VIII : L’arbalète  


Il l’a arraché à la main de son propriétaire calciné et broyé sous la boule ardente. Une arme semblable à la machinerie d’Amante, mais plus en adéquation de sa taille. Quoique caricaturalement trop grande entre ses jeunes mains.
Instinctif néanmoins.
L’enfant Orque a su comment l’actionner. Tirant un carreau en plein ventre de son adversaire, qui s’est plié sur place en grognant, lâchant son grand marteau. Son voile facial s’est rougi et s’est mis à goutter. Il a tenté de continuer à avancer sur l’enfant Orque, d’un pas boiteux et chancelant, tendant ses mains vers lui, avant de s’écrouler dans les cendres en rendant son dernier souffle. Son otite battait d’une puissance déchainée dans ses oreilles ; comme une jubilation rugissante pour la sacralisation de l’arme. L’enfant Orque s’est relevé d’un bond vif et alerte...
Piégé dans cette ruine enfumée, il tousse fortement en portant sa main en écran devant sa bouche et en plissant des yeux.

Il est entouré de morts-vivants. Ceux qui se sont battus et ont été grièvement blessés dans cette ruine, Orques et Hommes, ne sont pas morts sur le coup pour la plupart, comme il le croyait. Ils sont aux trois-quarts encore animés d’une subsistance de vie, se tordant de douleur et rampant, geignant et pleurant ou produisant des râles… Certains parfois recouvrent un élan de vigueur haineux et portent un ultime coup de lutte contre les mourants du camp opposés, retombant avec eux.
La plupart veulent juste se traîner à quelque distance des foyers de flammèches omniprésents, qui les accablent et menacent de leur grimper dessus pour les consumer au moindre faux mouvement…
Ce constat ravive la douleur de ses brûlures sur l’épaule et le cou, qui le tourmentent particulièrement, en dépit de l’effet soulageant des baumes du vieil Uruk Vargach ; la bandoulière du carquois à carreaux qu’il a ramassé lui râpe les blessures.

Il n’a même pas réalisé avoir eu le réflexe de se munir du carquois étrangement préservé sur le côté de la main de l’Homme. Comme un cadeau du sort pour son neuvième anniversaire, alors que minuit est passée durant l’attaque, même si l’enfant Orque ne le sait pas. Au-dessus de lui dans les étages, une profusion de Corbeaux, qui l’observent d’un même regard juge…

Parmi les mourants, il en repère au moins quatre qui se relèvent en s’appuyant contre les murs noircis et ténébreux, sur les dévastations. Aucun Orque. Que des Hommes. L’un d’entre eux a encore une épée, mais en longeant les décombres en haletant, complètement hagard. Il a perdu son casque et ses cheveux châtain foncés, coupés court en bol, sont décoiffés et maculés de cendre blanche. Le visage et le cuir de ses gants noirs lacérés par des éclats de maçonnerie. Du sang s’écoulant au niveau de ses yeux.
Un autre s’abaisse pour empoigner une épée, et l’enfant Orque s’empresse de remettre un carreau dans son arme, paré à prendre pour cibles d’entraînement les différents zombies humains qui errent dans la pièce.
Il bondit vers l’Homme en pointant sa machinerie d’Amante chargée vers son poitrail…
Non, Charir. On vaut mieux que ça…
Pourtant il ne tire pas, se contentant de garder l’Homme en joue. Celui-ci, figé dans son élan boiteux, finit par lâcher l’épée en se reculant, geignant et implorant. L’enfant Orque bondit d’un Homme sur l’autre, les pointant de son arme et les faisant couiner de supplication à tour de rôle pour bien se faire comprendre : A la moindre tentative, je n’hésite pas.
Il pointe son arbalète sur un Homme qui en soutient un autre, son bras passé par-dessus son épaule. Celui-ci fait halte à trois pas de lui et tous deux se dévisagent un moment. Le regard de l’Homme est intense et ferme, sans toutefois tourner au mépris ou à la défiance...
Après un instant, l’enfant Orque relève son arme et lui laisse le champ libre pour qu’il mène son compagnon mourant à l’escalier…

***

Il a pourchassé les piquiers sur toute une galerie souterraine, tuant lentement ou infirmant et laissant à la merci de ses compagnons qui le suivent de loin chaque homme jusqu’au dernier. A l’exception du Commandant. Il le talonne en grondant au-travers d’un tournant de briques jaunies, puis au-travers d’un escalier circulaire qui monte vers une issue sur l’extérieur.
Au dit extérieur, sur une antique cour intérieure d’un forum fantôme aux tuiles en ardoises noires, un espèce de peloton de dix hommes d’armes alignés attend face à l’issue, avec un noble en simple cotte de maille perché sur un cheval. Probablement un représentant qui attendait le retour victorieux du Commandant et de ses hommes pour les féliciter formellement.
Le Commandant surgit de l’issue plongée dans la pénombre en hurlant aigüe et en courant parmi eux, détalant hors du forum sous les regards déconfits du peloton et du noble. Trois battements de cœur plus tard, Crocs Blancs émerge, cuirassé et une arme dans chaque main.
Le temps que les Hommes comprennent ce qui leur tombe dessus et tirent les épées, un premier s’est fait arracher la gorge d’un coup d’épée dans un dédain brutal, et son compagnon de droite a vu sa cache thoracique être réduite à l’état de pulpes sanguinolentes au-travers de sa cuirasse fendue à deux reprises. Le noble tente de fuir à cheval, mais une épée tournoie dans l’air et le traverse par le dos, sa pointe ensanglantée jaillissant de sa poitrine.

Crocs Blancs Skulaï abat ses adversaires confus qui l’assaillent un par un, puis deux par deux à mesure qu'ils lui foncent dessus les uns après les autres. Il est cerné de cadavres saignants quand la troupe émerge à son tour de l’issue des souterrains d’Osgiliath…

***



Une étrange et silencieuse trêve s’installe entre eux. L’enfant Orque les laisse porter les leurs en qui perdure un souffle de vie dans les étages afin qu’ils ne crèvent pas comme des rats dans l’asphyxie de fumée qui règne en bas, et l’enfant Orque fait de même avec les siens, chaque race d’agonisants prenant un côté de la ruine. Sa seule condition sur laquelle il est vigilant, c’est que chacun jette son épée au diable dans les décombres calcinés du premier niveau. Le seul qui a le droit d’avoir des armes ici, c’est Lui. Un moment, l’enfant Orque a vraiment pitié de l’Homme aveugle en le voyant longer les effondrements droit vers un foyer. Vient l’arrêter et le prendre avec lui pour le guider. Aveugle appelle faiblement et tousse, croyant avoir à faire à l’un de ses semblables. Il semble apeuré alors qu’il tâte brièvement son oreille poilue et pointue, alors l’enfant Orque tente de l’apaiser doucement en le menant jusqu’aux siens…
Comme il vient d’aider l’un des leurs et qu’il n’a pas la capacité de porter tous les siens à lui tout seul sur ses petites épaules, Regard-Fort vient l’aider à les extirper, suivi d’un autre.

Sur la dépouille d’un Uruk du Bras Disciplinaire, il trouve une outre de pellucide servant à gaver les Cohortes Disciplinaires pour les rendre aptes à plusieurs jours de marches forcées sans dormir, au détriment de la santé mentale. Comme c’est du liquide et qu’il a terriblement soif, il boit goulument. Culpabilise ensuite un instant de ne pas avoir fait tourner avec les copains et peut-être avec "l’Ennemi", tous les blessés des deux camps émettant fréquemment des plaintes implorantes qu’on leur donne à boire… Parfois, entre deux extirpés, l’enfant Orque tend l’oreille vers l’issue qui a gobé Pif rond… Il lui semble percevoir les échos de la voix braillarde et grincheuse du Sergent, et celles d’autres Hommes. Un baragouin inintelligible, mais le ton est clairement à couteaux tirés dans les deux sens...

Puis il finit par entendre plus distinctement des Hommes, qui parlent de l’autre côté du mur. Des bruits de pierres déplacées. Ils sont en train de déblayer l’accès... Dans le but de porter assistance à leurs blessés, sans doute...
L’enfant Orque cherche comment s’en aller. Au bas, il tente de se faufiler par les goulots au milieu des débris, mais ceux-ci sont trop minces pour lui permettre de s’y glisser, et l’enfant Orque s’y retrouve coincé et gigotant vivement, battant des jambes derrière lui pour s’en extirper…
Trop pressé par le temps pour s’indigner de son échec, il monte l’escalier deux à deux en se glissant près des blessés Hommes, puis Orques. Son cœur cogne dans sa poitrine. Il se colle à ce qu’il reste des arches de fenêtres de la façade avant éventrée de l’étage, dont le sol n'est littéralement plus là, réduit à une pauvre bande de pierre accolée en rebord déchiré à la façade extérieure, et qui se réduit encore en bordure sur sa partie centrale. L’enfant Orque peste.

En bas devant l’édifice, il aurait pu aisément se laisser tomber à l’extérieur, et tenter un sprint sur le pont de pavés entre les fosses à feux, dont les flammes se sont considérablement atténuées pour se muer en des chapes de fumées noirâtres qui s’élèvent dans une nuit ocre rouge entre les deux lignes de front. Mais le temps de remonter tous les mourants et les blessés des deux camps, les soldats ennemis sont venus le cerner dans ce mouroir. Malgré eux. Leur attention est rivée tout à l’opposé. Ils sont tout un contingent de fantassins d’argents et d'Hommes perchés sur des bêtes puissantes à venir s’aligner sur leur bordure de la zone dévastée, lui barrant l’accès au pont. A l’opposé de la rue, Amante le Troll se campe à découvert, battant de la masse dans ses grosses mains, une grimace malveillante (un peu comique) défiant l’Ennemi d’approcher. Les petits Orques et Uruk-Haï qui constituaient la troupe composée de Pif rond viennent se déployer avec d'autres sur les flancs d’Amante, formant une pointe. Derrière eux, des cris d’alerte à la tension palpable se font entendre. Une bataille est imminente et l’enfant Orque est isolé derrière les lignes ennemies.
Et l’ennemi est en train de déblayer les issues qui mènent à sa cachette. La peur commence à accélérer sa respiration. Il s’adosse à couvert à l’intérieur et inspire en prenant en élevant sa machinerie. Joue de ses mains sur le bois poli, voir la pointe d’acier du projectile meurtrier, lui confère le sentiment de conserver un certain contrôle, d’avoir encore des cartes en mains. La nuée de Corbeaux a déjà gagné les étages, continuant de le scruter...

Oh oui, nous avons le contrôle. Tant que nous l'avons entre tes mains, ne sommes-nous pas libre-maitres de notre fin ? Ou de celle de nos ennemis ?

Puisant dans l’adrénaline de sa peur, il revient vers le groupe d’Hommes blessés à grands pas. Regard-Fort vient se tenir en protecteur, mais l’attitude vive et hargneuse de l’enfant Orque lui fait comprendre que cette fois, il n’y a pas d’entente. L’enfant Orque le dégage sous la menace de son arme et vient saisir le bras de l’aveugle. Presse le bout de l’arme contre sa mâchoire pour la lui faire sentir et lui faire comprendre : s’il n’obtempère pas, il meurt. Regard-Fort adresse quelques mots dans une langue que l’enfant Orque ne comprend pas à son camarade, qui prend peur et se fait réticent à marcher. L’enfant Orque le tire par la main, le forçant à le suivre. Lui fait longer les arches en le gardant de son bras d’une mauvaise chute dans le vide, d’un côté comme de l’autre. Tandis qu’il le mène dans l’escalier menant au dernier étage, il jette un regard à Regard-Fort pour lui faire comprendre les nouvelles règles : Si toi ou tes amis venez pour me tuer, je ne serai pas le seul à mourir.
A son côté, l’Homme se met à baragouiner à son attention, d’une voix noyée dans son sang, entrecoupée de reniflements. L’enfant-Orque devine au ton que son otage tente de le raisonner pour le pousser à se rendre gentiment. Pour se faire ensuite torturer à mort ou exécuter dans les conditions les plus sordides ? Ou dans le meilleur des cas, passer tout le reste de sa misérable existence enchaîné dans des oubliettes ?

Les Uruk-Haï crèvent mais ne se rendent pas !



Il mène l’Homme à l’étage. Le pousse dans un coin où il le fait se tasser, et vient se poster aux arches et aux brèches de ce dernier niveau sans toit, sans issue. Là dehors, il assiste à un face à face entre les deux forces en présence. Pointant leurs longues lances en avant, l’enfant Orque voit les cavaliers ennemis s’élancer à la charge de la Bête. Amante le Troll s’avance d’un pas à leur rencontre et balaie la tête de charge de son marteau. Trois des Hommes et leurs animaux hennissants font leur baptême de l’air et leurs adieux à l’intégrité de leur ossature.

Sur leurs côtés, les cavaliers lourds chargent de plein fouet les flancs d’Orques, piétinant les rangs qui les assaillent d’épieux, de vifs cris et de tentatives de freiner les bêtes et d’en agripper les cavaliers de toutes parts. Ils galèrent vainement dans la plupart des cas, les cavaliers se taillant des passages en force dans la troupe, en y abattant leurs longues épées sur les têtes.
Mais Amante a tenu bon et s’est encore avancée, dissuadant les troupiers ennemis de charger dans le sillage de leurs chevaliers, qui se retrouvent isolés derrière les lignes Orques où ils se font submerger par toujours plus de snagas hurlants.

Entre temps, les Hommes ont ramené une machinerie et toute une ligne d’archers près des fosses à feu. Ils pointent leurs armes sur Amante le Troll, qui marche seule sur les troupiers ennemis, les dominant sur le pont de pavés. Mais alors qu'ils vont pour abattre la Bête, une volée de flèches Orques s’abat parmi les tireurs, semant la mort dans des cris de douleur.
Au milieu de la pluie de mort, personne n'a perçu le claquement de l’arme de l’enfant Orque, ni la provenance du carreau qui a frappé en pleine nuque l’un des servants de la baliste à répétition. L’otite bat dans ses oreilles, comme une acclamation rugissante.
L’un des autres servants de baliste tente de prendre la place de son camarade pour tirer, mais le javelot du scorpion Orque qui leur fait face frappe l’arme de plein fouet, l’éparpillant en pièces détachées. Là, des torrents d’Orques se déversent une nouvelle fois au-travers des ouvertures du pâté de ruines qui borde en largeur la longue rue. Dans le sillage d’Amante, les Orques et les Uruk-Haï montent à l’assaut, venant pousser le Troll au cul au-travers du pont de pavés.

Les gros pas du Troll déforment et font s’affaisser le pont de pavés, qui s’écrase sous son poids, menaçant de s’effondrer. Face à Amante, un grand nombre de piques, qui tentent de la contenir.
L’enfant Orque recharge sa machinerie avec méthode, une maîtrise innée. Il sait comment faire et rapidement le faire. Son cœur tambourine dans sa poitrine, mais pas de peur. Son premier tué à distance lui procure un sentiment de contrôle absolu sur son monde.



Il pointe son arme, en quête d’une nouvelle cible. Au niveau d’Amante et des piquiers ennemis qui ne cèdent pas un pouce de terrain, il aperçoit le Gobelin jaune que Pif rond a nommé Lerüg, et Erkû et Muzgaach les jumeaux Gobelinoïdes de la cohorte de snagas, et d’autres petits qui se glissent avec vigueur et indécence entre les membres d’Amante et même directement sous son pagne pour venir faucher de bas les piquiers de tête par les mentons, et tenter de bourrer la formation ennemie.
Parmi celle-ci, l’enfant Orque distingue des Hommes qui s’époumonent à l’attention de leurs hommes, l’épée brandie haut, les encourageant à tenir les rangs et à repousser l’engeance Orque.

Sympa à eux de se désigner distinctement à notre visée, se dit l’enfant Orque dans un rictus.

Alignant un Capitaine Homme, l'enfant Orque l'abat d’un tir en pleine gorge.

Il s’adosse à l’intérieur pour recharger. Le rugissement de triomphe de l’otite dans ses oreilles.

Sur le côté, l’Homme aveugle se tient prostré dans son angle en pleurant et en reniflant du sang, de la salive qui s’écoule de ses souffles lourds entre ses dents. L’enfant Orque le garde à l’œil, garde à l’œil le bas de la ruine. Pas encore entrés les Hommes. Les blessés des deux camps se tiennent sagement à leur place. Certains ont fini de rendre l’âme et se sont écroulés de côté.

Il vise à nouveau.
En bas, c’est le bordel. Des corps d’archers Orques se sont eux-mêmes déployés de leur côté des fosses à feux. Chacun des deux camps protège ses archers d’une ligne précaire de guerriers aux boucliers, mais ça a quand même des allures de pelotons d'exécutions superposés. L’échange anarchique de flèches au-travers des brouillards fumants produit un massacre à double sens. Parmi les archers Orques, des troupiers légers se laissent tomber dans les charniers fumants, afin de les gravir et d’attaquer en longueur les Hommes. Une manœuvre de folie suicidaire. Les piquiers continuent de tenir tête à Amante, mais perdent progressivement du terrain. L’enfant Orque repère et flingue un autre Capitaine Homme de première ligne. Amante pose son gros pied droit de l’autre côté du pont de pavés, parmi un cercle de piques et la petite rivière d’Orques de ses compagnons qui bataillent frénétiquement en première ligne pour désorganiser le mur de piques.

Il recharge prestement. A chaque nouvelle victime, l’otite acclame avec toujours plus de vigueur. Elle est comme le grondement montant d’un dragon qui rugit toute sa puissance. Une détermination étonnamment stoïque guide sa visée.
Il cherche une nouvelle cible. Des flèches pleuvent en salves sur le pont de pavés, depuis les hauteurs de ruines adjacentes à la sienne. L’enfant Orque abandonne son poste de tir et se rue au-travers de l’étage pour gagner un demi-cadre de fenêtre dont la moitié supérieure a été arrachée et est ouverte sur le ciel. Face à lui, des Hommes encapuchonnés vêtus de vert, que Pif rond et les siens ont appelé "Rangers", encochent des flèches pour tirer à l’unisson. Visent.
L’enfant Orque a repéré l’Homme parmi eux qui commande aux tirs. Pousse un cri bestial à son attention, faisant se tourner tous les regards ennemis vers lui. Il lève son arme et tire un carreau en pleine poitrine du chef, avant de détaler à toutes jambes, fuyant la volée qui riposte à l'unanimité sur sa position. L’enfant Orque regagne son poste de tir initial en invectivant d’aboiements Aveugle, qui avait osé se décoller de son coin crasseux et parsemé de gravats.

En bas, Amante a encaissé une blessure sale au niveau gauche des intestins. Le Troll recule en chancelant au-travers du pont de pavés,  la gueule grande ouverte. La cohorte d’Uruk-Haï a déjà pris le relai au cœur de l’affrontement, fer de lance au milieu des prises à parties et des bourrages de flancs que font les fantassins légers et les snagas menés par le petit Lerüg…  
C’est là qu’il réalise que derrière les siens, aux embouchures du pâté de ruines, les Hommes en livrées noires de la Tour et les Maîtres de Discipline les plus zélés sont en train d’interdire toute retraite.

Ils claquent du fouet, ils brandissent des brûleurs chauffés à blanc vers les Orques de l’arrière, même sur les corps d’archers, qui ne comprennent pas tout de suite ce qui leur tombe dessus. L’enfant Orque voit deux Hommes noirs dégager les servants Orques du scorpion pour les envoyer crever en premières lignes, tandis que leurs semblables s’approprient l’arme.
Quelque chose de puissant et de révolté tonne en lui. L’enfant Orque lève plus haut l'arme et la fait claquer. L’un des fouettards menaçants tombe à la renverse, frappé d’un carreau.
Des rugissements de dragon dans ses oreilles... Qu'ils paient pour leur arrogance ! Tues-les tous !  

Il recharge avec des gestes experts. Prend un nouveau Maître de Discipline pour cible... Tire... L’Homme tournoie dans sa chute et son râle de douleur porte jusqu’à l’enfant Orque... Ses tympans lui donnent l’impression qu’ils vont exploser d’une seconde à l’autre...
Devant lui, une espèce de troisième bataille, une mutinerie, éclate sur les arrières entre Légionnaires et snagas Orques d'un côté, et Maîtres de Disciplines de la Tour de l'autre, qui se font prendre à parti parmi les lignes qu’ils poussaient à l’abattoir...
Aveugle à son côté pousse un juron de stupéfaction horrifiée qui le distrait de sa visée, lui faisant lui jeter un regard. Aveugle est en train de le dévisager avec une expression étrange, baragouinant d’effroi… Il entrouvre l’œil gauche sanguinolent, et a recouvré la vue de l’autre. Un œil écarquillé d’horreur.

«… T’es enfant, Orque ! Tu rienn que môme ! » Baragouine-t-il en langage commun.
 
En bas dans la ruine, il perçoit les voix d’Hommes qui rentrent, qui montent dans les étages...
Plus rien à foutre…
Une nouvelle cible se présente à sa visée. L’enfant Orque le met en joue, sa respiration sifflant de haine entre ses crocs. « Comment osez-vous ?! » L’entend-il tonner… « Traîtres ! » « Sauron l’apprendra ! Sauron le sait déjà ! Il voit au-travers de mes yeux !»
Les mutins se soumettent docilement face à lui pour la plupart. Certains tiennent tête, mais n’osent guère passer à l’attaque…
Sauron voit au-travers des yeux de la Tour ? Qu’il voie ça alors, se dit l’enfant Orque en lâchant un tir. Le projectile file jusqu’au poitrail du suivant à la droite du cheval de la Tour, qui tombe à terre. Son maître hoquette d’effroi et sa monture apeurée le fait tourner sur lui-même tandis qu’il s’efforce d’en reprendre le contrôle.
« Où est votre combativité ?! » Continue de siffler la voix « Où est votre conviction ?! »

L’enfant Orque ne comprend pas pourquoi les siens éprouvent une telle crainte viscérale et soumise face à lui… Ils viennent d’oser tuer plusieurs de ses suivants qui étaient d’authentiques soldats.
Lui, ce n’est qu’un Homme… Un Homme vieux et essoufflé perché sur un cheval maltraité, qui cache ses faiblesses maladives dues à l’âge derrière des artifices vulgaires. Sauron n’aurait jamais pris pour avatar une misérable loque comme lui... L’enfant Orque a rechargé. Il remet en joue, prend son inspiration. Isole son esprit des cris d’alerte qui remontent des étages inférieurs de la ruine, les émissaires de sa Mort imminente qu’il salue, sans redouter son joug froid…

Le carreau part de la ruine et vient frapper dans la poussière dans le dos de la Tour à sa vue. Le Seigneur noir fait tourner bride à son cheval, décampant au triple galop.

L’ironie veut qu’en cavalant pour fuir, la Tour se soit fait flécher par une troupe de rangers du Gondor venue pour décapiter l’armée ennemie, là où un instant auparavant son second avait fait exécuter un Homme aux côtés des Orques...


« Calme ! Calme, enfant-Orque ! » Lui souffle la voix noyée dans son sang de l’Homme. L’enfant Orque geint, proteste et frappe en tentant de se débattre. Il doit abattre la Tour. Il doit en finir avec cette vaste blague qu’est la Tour !

Faux-aveugle s’est rué sur lui dans le bruit de casseroles de son armure, lui a fait perdre son tir au diable et l’a immobilisé au sol... Les Hommes en armures, en habits verts, viennent se tenir face à la scène...
C’est fini…
L’Homme faussement aveugle échange des paroles alarmées avec eux. L’enfant-Orque leur jette un regard ; il les voit hocher la tête sans vraiment écouter, leur attention malveillante rivée dans ses yeux. Bon nombre des leurs contournent le spectacle misérable qu’il offre pour venir s’aligner sur les postes de tirs qui s’offrent de nouveau à eux sur la bataille en contrebas...    



Trois des hommes relèvent l’enfant-Orque en le prenant des bras de Faux-aveugle, qui continue de baragouiner avec une détresse manifeste, lui valant des répliques de différents tons. Sifflements catégoriques empreints de mépris de celui qui empoigne l’enfant-Orque sans ménagement, garanties apaisantes d’un autre, et une indifférence meurtrière du troisième en habits verts, qui vient ramasser la machinerie tombée à terre. Celui-ci suit en gardant ses yeux rivés dans ceux de l’enfant Orque au-dessus de l’écharpe qui lui cache le faciès.

Dans l’étage intermédiaire, tous ses camarades agonisants ont déjà rendu l’âme. Leurs visages en paix pour la première fois sous leurs casques...
Alors qu’il longe les arches, il jette un regard au-dehors et constate une débâcle générale du genre Orque. L’auto-sabotage de leurs forces arrières engrené par la Tour et ses suivants les ont conduit à une déroute que les Hommes sont en train de prendre en chasse, une contre-attaque qu’une Amante blessée tient en respect tant bien que mal en reculant un pas à la fois sans tourner le dos à l’Ennemi.
L’Homme qui l’empoigne fermement, et ceux qu’il lui fait croiser lui interdisent de regarder, le forcent à baisser la tête en avançant.

Il longe les blessés humains avec qui il a cohabité. En passant, il revoit Regard-Fort, avec qui ils échangent un nouveau regard. Il se fait immobiliser contre le mur le temps de laisser les blessés et les mourants être convoyés en bas de l’escalier. Une certaine indifférence résignée l’habite. Il se sent écrasé par tous ces regards hostiles et froids, cette agitation d’hommes en armes autour de lui. Son otite n’est plus qu’un faible battement, un murmure…
En quête du seul soutien éventuel qu’il a en ce moment, il cherche le regard d’un des blessés ennemis avec lesquels il a cohabitait un bref instant… Cela lui vaut les vociférations en langage commun du Ranger qui tient la machinerie :
« Tu baisse les yeux, toi ! Ta mère a p’têtre pas fait ton éducation, mais nous on va la faire ! » Grogne-t-il en s’avançant d’un pas menaçant vers lui, l’épée levée…  
L’enfant Orque se soumet docilement. Un air de déjà entendu dans ces menaces. Il obtempère, restant seul face à lui-même. Se prépare mentalement à ce qui l’attend…

***

Il progresse au-travers d’allées grises et glacées découpant un champ de décombres et de vieilles ruines fantômes. Osgiliath. Quand ses ancêtres ont pris la ville une première fois, on ne peut pas dire qu’ils n’aient fait les choses à moitié. Skulaï progresse à la fois furtif et rapide, sûr de lui. Les oreilles pointues dressées comme celles d’un chien. Tous les sens en alerte. Ils ne sont pas très loin au sud-ouest de l’Orgie rouge, de ses fosses à feux. Ses environs immédiats sont déserts, laissés à l’abandon et aux nuées de Corbeaux dont les dépouilles emplumées jonchent les lieux. Les forces ennemies sont toutes concentrées à la tenue de ses fronts multiples et n’ont pas ou très peu laissé de patrouilles d’arrière-gardes, n’envisageant pas que ceux qui seraient tombés dans leur piège survivraient pour certains à la fois à la poix incendiée, et aux piquiers, et auraient en prime encore assez de zèle pour venir les prendre par derrière...
Néanmoins, il est à l’affût de messagers, de réapprovisionnements qui passeraient par ici, de mouvements de troupes ennemies qui opèrent des redéploiements… Le genre de proies faciles pour le chasseur de têtes qu’il est.
Les sabots d’un cheval au pas se font entendre au croisement en T au bout de la rue qu’il remonte, et il se colle dans les ombres des bâtisses en observant, prêt à découvrir sa nouvelle proie humaine immédiate.
L’Homme est déjà mort.

Animal innocent et inconscient de la guerre dans laquelle l’Homme l’a plongé, le Cheval caparaçonné et vêtu d’une étoffe bleu roi descend la rue au pas. Marche jusqu’à longer la cachette de Crocs Blancs Skulaï, qui en sort sans brutalité et vient à sa rencontre avec la plus grande douceur dont il ait jamais fait preuve...
L’animal traîne avec lui son cavalier, un chevalier au cygne de Dol Amroth engoncé dans une lourde armure d’argent, mort. Son pied droit chaussé de fer coincé dans l’étrier qui le garde lié à son destrier.  
Skulaï vient tenir le cheval par la bride en l’apaisant.
« T’es à des années lumières de toutes ces conneries toi, pas vrai mon beau ? »
Rationnellement, il a toutes les raisons d’abattre un destrier de guerre de l’Ennemi, comme il l’a déjà fait par le passé sans honte ni remord. Pourtant cette fois, l’attitude de neutralité absolue de l’animal lui donne une autre idée.
Skulaï déleste le cheval du boulet de viande qu’il traîne à son côté…


Dernière édition par Karess le Lun 17 Juin - 23:06, édité 2 fois
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[An Orc Story - Univers Seigneur des Anneaux] - Premier Sang pour l'enfant Orque Empty Re: [An Orc Story - Univers Seigneur des Anneaux] - Premier Sang pour l'enfant Orque

Message par Karess Dim 19 Mai - 16:08

IX : Des yeux injectés de sang




L’enfant-Orque est mené dans les entrailles de la ruine où les Hommes de passage le toisent avec haine. Hagard de la retombée de sa frénésie, il ne soutient pas leurs regards et ne serre pas les dents.
Il aurait dû.
Plusieurs d’entre eux lui envoient des poings gantés, des coudes de métal dans le visage. Dans son maigre ventre... L’enfant Orque est sonné et nauséeux, l’arcade sous l’œil prise de fourmillement. Sa vue est encore brouillée de petites étoiles quand on le mène hors de la ruine et qu’on le met à genoux parmi une demi-douzaine d’Uruk-Haï tenus en ligne et soumis, dont Pif rond… Son ton hargneux et provoquant est la première chose qui lui revient distinctement...

«… alors la dame Elfe s’est tournée, a relevé ses robes et s’est laissée baiser par l’Orque comme une bête, et c’est comme ça que tous deux ont donné naissance à cette sale race que sont les Hommes, cette engeance qui couple la grossièreté et la vulgarité Orocuenne à ce tempérament arrogant de pourris-gâtés Elfiques qui considèrent que chaque putain de chose en ce monde leur revient de droit et qui taxent de "maléfiques" quiconque a le cran de leur dire leur tenir tête. Et les Hommes ont fondé le Gondor, le Rohan, et toutes ces autres tâches de merde qui ne cessent de croître en superficie sur notre bonne Terre que sont les royaumes… "Libres", des Hommes, où tout n’est toujours fait qu’à moitié, dans une médiocrité latente. Vous cumulez les pires défauts et les pires traits –physiques notamment, j’entends- des deux races ennemies jurées, sans aucune de leurs qualités. Vous êtes la race qui est littéralement le "cul entre deux chaises"…»

Ils sont tenus en respect juste derrière les ruines du long flanc ouest de la longue rue que les siens nomment l’Orgie Rouge, face à un large parallèle pavé bien dégagé et découvert, les séparant d’édifices arborant de nombreuses colonnes abattues. Une activité lointaine s’y perçoit. Des blessés y sont menés à l’écart des combats du front. Un front d’où commence à s’élever des clameurs victorieuses. Des clameurs humaines. La seconde vague d’assaut a été repoussée…

— Dieu tout-puissant, soupire un homme élancé en armure vêtu d’une cape noire qui se tient face à Pif rond… Il est aussi pénible de converser avec vous que je le craignais… D’autres vous auraient déjà coupé la langue, mais j’ai conscience de votre valeur marchande auprès de votre général. Une chance pour vous que les loups de la dix-huitième légion ne me soient pas inconnus. Quand j’ai vu vos insignes de sergent alors que l’on me vantait la capture d’un indomptable capitaine Orque, au vu du massacre que vous avez perpétré dans mes défenses, j’ai été à deux doigts d’accéder à la requête de mes hommes de vous faire pendre aux défenses…»
L’enfant Orque trouve du réconfort à revoir Pif rond encore vivant. Lui et le seigneur des Hommes tournent tous deux la tête vers lui. Ce dernier échange des mots dans sa langue fluette avec son soudard qui a emprise sur l’enfant Orque. L’Homme le moins hostiles du trio se permet une intervention pondérée, mais il est très vite coupé par le Ranger qui parle en levant en évidence l’arbalète…
« T’as fais ça, toi ? T’as flingué du nobliau avec ce joujou ? » Rigole Pif rond à son attention. Mais alors que le Ranger déblatère avec haine, l’insolence sur le visage de Pif rond vient de se tarir d’une appréhension craintive…
« Non il l’a pas fait, nie Pif rond. C’était un tir de catapulte. » Le Ranger le toise d’un regard de pure noirceur, sans cesser de blâmer l’enfant Orque, répétant ses dires en le pointant d’un doigt raide. Un autre Homme intervient dans la discussion, Regard-Fort, qui a émané de la ruine et s’est tenu en retrait, écoutant la conversation. Il parle avec une voix toute aussi forte et assurée que son regard quand l’enfant Orque l’avait tenu en joue.
« T’as vu que dalle de ton étage inférieur, pauvre schrak ! Enrage Pif rond, avant de s’efforcer d’être conciliant… Monseigneur, votre cousin était déjà crevé sous sa boule de feu quand l’gamin est rentré là-dedans. Allez donc voir ! Vos gars vous racontent des purs bobards !»

« Vous… Le seigneur est pris de malaise, tremblant et se détournant, regardant le sol… Il se fait soutenir par le Ranger alors que ses jambes cèdent… Cette vermine a-t-elle une quelconque valeur marchande aux yeux de votre général, Sergent ? »
Moment de silence… Pif rond jette un regard nerveux aux hommes malveillants qui les cernent. Il fait tourner sa langue entre ses dents, gêné, s’efforce de parler clairement…
« En principe : non. Les snagas comme lui, le Mordor les a envoyés pour alléger le nombre de bouches dans ses infrastructures. Mais si vous prenez la peine d’en faire une description sommaire en bas de liste et que vous mentionnez qu’il s’agit d’une requête de Thurgix, avec mon grade et mon matricule, le vieux Ruayyh vous renverra l’un de vos hommes d’armes en échange du gamin.
— Et depuis quand un Uruk se soucie-t-il du sort d’un snaga ?! S’emporte le nobliau contre Pif rond, qui encaisse en prenant sur lui.
On sent que ça lui coûte.
— Deux de mes hommes les plus fiables me disent que c’est cette… Cette racaille qui a tué mon cousin ! Cette racaille qui emploie l’arbalète familiale de mon cousin sur mes lieutenants ! Des Hommes de haute naissance !
Le noble continue de trembler, d’enfouir la tête entre ses épaules. Comme pour lutter contre cette montée de colère…
« Je… Je dois me retirer un instant, avant de céder à une décision qui condamnerait l’un des miens à finir entre vos griffes… »

Il s’éloigne d’un pas chancelant, confié à Moins Hostile par le Ranger, qui regarde son maître s’éloigner. Comme pour s’en assurer en fait.
Puis il se retourne vers eux. Lui et tous ses camarades présents les toisent. Leurs regards sont d’une noirceur que l’enfant Orque, que Pif rond, qu’aucun Uruk de la ligne de prisonnier n’a jamais vu posé sur eux, pas même chez leurs Maîtres.

***

Le colosse vert s’est hissé sur le cheval en remplaçant le pied chaussé de fer du chevalier mort par son propre pied à l’étrier, et a hissé sa carrure sur le dos de l’animal.
Il se serait bien vu donner pour premier aperçu à ses compagnons qui suivaient une image conquérante de lui cabrant sur l’animal, ses deux armes brandies haut au-dessus de sa tête, un éclair dans le dos pour le cliché... A la place, son amateurisme en matière d’équitation et l’absence d’écuyer pour tenir l’animal par la bride a suscité un bref élan de protestation de l’équidé, qui a fait mine de partir au galop et qui a tourné sur lui-même en se heurtant aux divers encombrements de la rue, suscitant l’hilarité plus ou moins étouffée des camarades de Skulaï à leur arrivée, tandis que celui-ci s’efforçait de prendre humblement le contrôle des rennes pour faire faire demi-tour à l’animal.
Indifférent à l’amusement des siens, il a ensuite fait s’élancer au galop –volontairement cette fois- le cheval au-travers de la rue. Il a manqué de basculer au début, mais il apprend vite…

Il cavale au-travers des petites rues qui longent le parallèle de l’Orgie Rouge sans croiser ni patrouilles ni soldats isolés. La clameur victorieuse qui s’élève des lignes gondoriennes lui permet de se dresser un tableau concret de la situation. Arrivé aux abords du réseau de ruines qui flanquent l’ouest de l’Orgie Rouge à la hauteur du Charnier, il fait obliquer vivement sa monture et débouche sur le parallèle, où les rares passages ne le remarquent pas.
En fait si, certains loin de lui et isolés hors de son sillage le repèrent et crient en le pointant du doigt. Ils n'alertent jamais que d’autres gars tout aussi isolés et paumés qu’eux, impuissants à l’arrêter et sans grande valeur à abattre. Crocs Blancs les laisse crier dans le vent sans rien pouvoir faire de concret. Qu'ils le poursuivent donc, leur tour viendra une fois qu'ils l'auront rattrapé ! En attendant, lui chevauche à la charge vers l’arrière des positions ennemies, les armes brandies…

***



Toutes leurs interactions se font en échange de regards, complices de noirceurs. Des yeux injectés de sang. Possédés de la fièvre des corbeaux. Quelques murmures échangés, parfois. Les clés de bras et autres prises sur les prisonniers liés et à genoux, se sont accentuées. Ils ont amené deux barils d’un genre d’huile de friture, dont ils commencent à imbiber les Uruk-Haï un par un.
« Quoi alors ? Vous voulez nous faire cuire ? Se moque Pif rond en continuant d’employer la langue commune. Allez-y, lâchez-vous ! Les nôtres feront la même chose sur les vôtres, mais en plus ils les écorcheront avant, quand ils apprendront ça. »
Certains Hommes lui jettent un bref regard en coin, à peine distraits. Continuent. Des captifs dans la ligne commencent à tenter de se débattre. La terreur de ce qu’on s’apprête à leur faire leur fait perdre le contrôle de leurs entrailles.
Le porteur du baril vient faire face à Pif rond, qui le regarde les yeux dans les yeux.
« J’vais pas supplier. » Grogne l’Uruk.
Il se fait baigner méticuleusement par l’Homme.
L’enfant Orque commence à respirer difficilement. L’Homme au baril arrive à son tour et cette fois, l’enfant Orque craque et pleure en fixant le sol… Tout son conditionnement guerrier qu’il a bâti quand il était fort aux côtés de Pif rond s’effondre. Les tremblements de peur de sa mort imminente s’emparent de lui. Il voudrait juste fermer les yeux et se coucher par terre, mais l’Emprise l’immobilise fermement sur ses bras et sa nuque, le maintenant à genoux en proie aux crampes...
C’est là que le noble revient et s’atterre de la scène qu’il découvre, suivi de Moins-Hostile.
Il commence à débouler en beuglant sur ses hommes, mas se fait couper net par le Ranger qui revient l’accueillir en lui collant son poing dans la gueule, l’assommant dans la poussière. Le traîne à l’écart du barbecue en perspective… Ses camarades ont eu un sursaut de stupeur et s’agitent avec hésitation, mais le Ranger leur lâche des propos secs. Du genre, « ayez les couilles d’aller jusqu’au bout »… D’un claquement de doigt, il fait se ranger Moins-Hostile à leurs côtés, à pas hésitants.
Ils continuent de les imbiber, arrachant à l’enfant Orque des geignements de terreur. Le premier baril, alors ils vont tranquillement chercher le second, qu’ils déversent sur le sol et sur les deux derniers captifs qui bredouillent des supplications étranglées. Les Hommes ont une torche toute prête sur chaque côté.
Faux-aveugle passe à ce moment là, porté par ses camarades hors de la ruine, et s’insurge en voyant la scène. Il implore ses camarades, mais ceux-ci le congédient fermement… L’échange est dans leur langue…


« Non ! Ne faites pas ça mes frères, je vous en prie !
— On aura autant de pitié qu’ils en auraient pour nos familles sans défense, l’ami ! On donne une bonne leçon à ces créatures. Ils viennent parce qu’ils ont moins peur de nous que de leurs Maîtres, mais on va changer cet état de fait.
— Epargnez l’gosse au moins ! Il nous a épargné, il a porté nos blessés hors des flammes ! C’est monstrueux, ne faites pas ça ! C’est qu’un môme ! Plaide le blessé. Le Ranger hausse les épaules en regardant l’enfant Orque avec dédain...
— Quelle importance qu’il soit enfant ou mature ? Un gobelin reste un gobelin. »
Comprenant leur échange, Thurgix se penche et crache directement sur l’habit du Ranger, qui lui expédie sa botte boueuse en pleine tête. Le sergent Uruk crache son sang noir.
« Ouais, un gobelin reste un gobelin, c’est ça… » Reprend-il avec mépris. Dans le dos des Hommes qui sont accaparés sur lui, une cavalcade de destrier lourd, un bruit qui les indiffère car ne pouvant être que celui de l’un des leurs...
« Et un bon Homme, c’est un Homme mort, retourne Thurgix. Au fait, j’crois qu’y en a un qui a encore un ou deux arguments en faveur de l’enfant, juste derrière vous… »

***



Il aurait jeté son dévolu sur le premier objectif savoureux qu’il aurait trouvé : infirmerie, position de tir ennemi, approvisionnement, état-major… Le colosse vert charge sur des Hommes qui brutalisent des frères de Légion prisonniers en bordure du parallèle.
La voie du Grand Karess est étonnamment solidaire en cette nuit…
Il charge droit sur l’un des porteurs de torche, qui ne se retourne que pour voir l’épée de son propre peuple le faucher en plein dans le visage, en pleine course…
Il tombe à la renverse défiguré à vie et sombre dans l’inconscience. Alors que les Hommes en sont encore à comprendre ce qui leur tombe dessus, Crocs Blancs fait virevolter son cheval. Se dresse sur sa selle, l’épée élevée à la manière d’un javelot, qu’il jette telle quel vers le second porteur de torches, l’empalant sur place.
Pif rond et ses Uruk-Haï ont les mains liées dans le dos, mais ça n’empêche pas le premier de se relever d’un bon en dégageant l’Homme qui a emprise sur l’enfant Orque, qui perd son épée dans l’impact. Puis de percuter le Ranger.
La plupart des Uruk-Haï ne peuvent pas faire grand-chose à part se relever en se dégageant, et venir se réfugier dans le sillon protecteur de Crocs Blancs. L’enfant Orque qui n’a pas été attaché lui, a encore les larmes aux yeux et des tremblements de peur lorsque sa vivacité instinctive lui fait agripper l’épée tombée sous son nez. Comme guidé par une force qui en commande à son corps sans attendre que son esprit même ait récupéré, il empale par le ventre son geôlier.
Moins-Hostile, celui du trio qui avait plaidé en sa faveur face à son seigneur, le voit faire. L’injuriant, il tente de tirer lui-même l’épée pour l’abattre à présent..

Autour de lui, Pif rond recule en esquivant les assauts du Ranger, les mains toujours liées dans son dos.
Sur leur côté, le Colosse à peaux vertes a fait se retourner sa monture et combat comme sur un Warg face à la multitude d’assaillants. Se tenant cabré, accroupi sur la selle, il dégage ses adversaires qui l’assaillent en frappant et en fauchant, avant de faire charger le destrier dans la scène confuse en en sautant pour combattre sur ses propres pieds. Moins-Hostile qui allait tuer l’enfant Orque est percuté dans son élan par le destrier de guerre et se fera tuer par la suite sans que l’enfant Orque ne le revoie plus.
Pour l’heure, celui-ci se rue dans le dos du Ranger qui s’acharne furieusement à tenter de pourfendre Pif rond. L’enfant Orque lui plante son épée dans le mollet gauche, lui embrochant la cheville. Le Ranger hurle derrière son écharpe avant que Pif rond ne revienne le percuter pour le faire tomber à terre. Le Ranger porte des coups rageurs à terre autour de lui, vers ses ennemis, tandis qu’il est laissé sur place. L’enfant Orque n’a pas attendu qu’il tombe pour lui reprendre la machinerie. Sa machinerie !


Il voit Regard-Fort avec qui il avait établi la brève trêve et cohabitation l’épée tirée, de même que Faux-aveugle, qui s’efforce même boiteux de venir prendre part au combat. Prenant parti pour ses semblables, aussi monstrueux soient-ils…
Il voit des Hommes qui courent du parallèle, qui sortent de la ruine en trombe pour venir se battre. Et pourtant, le colosse vert venu à leur secours règne au cœur de l’affrontement, pourfendant de l’épée, de la hache, quiconque vient à sa rencontre, tenant sa multitude d’adversaires au respect dans un demi-cercle d’authentique no man’s land. L’enfant Orque, lui, est venu se tenir derrière lui, aux côtés de Pif rond et des autres captifs. L’épée levée pour les protéger.
Puis toute une troupe d’Uruk-Haï en armes déboule alors dans l’affrontement, inversant le rapport de forces.


Ils ont avancé dans le sillage de Crocs Blancs en couvrant ses arrières. La clameur victorieuse des Hommes tourne toute l'attention de ces derniers dans la mauvaise direction, affairés qu’ils sont à lancer leurs contre-attaques. Le temps que ceux qui les ont repérés fassent comprendre aux leurs qu’ils ont une bande de guerre Orque dans leur dos, il sera trop tard. Quguug et Yashnarz se répartissent leurs forces. Dix gars chacun. Une section de ruines frontalières chacun. Manœuvre rapide. Raid éclair. Ils entrent, ils tuent tout ce qu’ils peuvent de paumé dans les positions ennemies, brûlent ce qu’ils peuvent en chopant les omniprésentes torches, puis ils se replient alors que l’Ennemi s'efforce encore de comprendre ce qui vient de lui tomber sur la gueule. S’ils veulent être vraiment sales, ils pourraient faire un petit détour par les infirmeries qu’ils ont repéré de l’autre côté du parallèle dans un antique lieu saint.
Wolgu, Togreh, Nenag, Unriirt et ses gars, rappliquent aux côtés de Quguug pour venir en renforts à Skulaï. Leur ruée ébranle le groupe d’Hommes confus et malmenés bien avant leur arrivée par le grand demi-Orque vert. A quelques pas du carnage, le destrier lourd s’éclipse discrètement.
Dans la poussière, le noble rampe, revenant à lui. Il se fait immobiliser par le genou cuirassé du Commandant Quguug.
« Je vous salue, Monseigneur… » Lui susurre celui-ci en le tenant en respect, les fers de ses haches se calant en tenaille sur sa gorge…


L’enfant Orque contemple un instant Faux-aveugle qui agonise du coup qu’il vient de lui porter sous sa garde vacillante...
Il essaie de lui faire comprendre dans le regard qu’il regrette que les choses finissent ainsi entre eux, qu’en tirant épée l’Homme est redevenu un ennemi et l’a obligé à faire un choix : les soldats prétendument "Ennemis" avec lesquels il a presque fraternisé, et ses frères d’armes. S’il avait pu avoir un autre choix, du genre enfermer dans une même cage les seigneurs généraux des deux camps pour les laisser s’entretuer sans pourrir la vie de tout le monde, Hommes comme Orques, il aurait opté pour cette option.
A défaut, il a choisi ses frères d’armes.

Pif rond presse les gars survenus dans le sillage du colosse vert de couper ses liens. Une fois libéré, il récupère la première arme à portée de griffes et est le premier à s’élancer dans le sillage de Crocs Blancs, qui part donner l’assaut dans la ruine où ils ont été pris.
« De rien, mon pote… » Lui retourne ironiquement Nenag, planté sur place par le gros Orque aussitôt qu'il l'a détaché...
Dans leur sillage, l’enfant Orque s’élance également, sa machinerie rechargée, s’efforçant de suivre le mouvement malgré le choc mental de ce qu’il a frôlé ces derniers instants. Alors que Pif rond revient dans cette même ruine enfumée et folle, regagne le même escalier et part nettoyer une fois encore les mêmes putains d’étages dévastés dans le sillage du colosse vert des archers qui les occupent, l’enfant Orque fait claquer son arme sur un fantassin hurlant au rez-de-chaussée qu’ils ont laissé "pour les copains".
C’est à nouveau facile avec celui-ci. Il ne le connaît pas, n’a pas eu d’échanges avec lui. Les Hommes dans cette ruine sont à nouveau ces silhouettes malveillantes encagées dans du métal, indistinctes.
Faux-aveugle le hante encore avec son regard sanguinolent dans ses rétines.
D’autres Uruk-Haï à sa suite plongent eux-aussi dans la ruine, le jetant par terre hors de leur charge.

Togreh se rue sur un opposant en le percutant et le jetant à terre en dépit de son bouclier. Dans son élan, elle le plaque au sol dans les gravats en posant un genou sur son bras armé, et lui ouvre la gorge dans un rugissement. Derrière elle, Nenag s’est élancé sur l’autre issue à l’autre bout du rez-de-chaussée dans un mugissement aux côtés de Togreh. Le premier Homme alerté dans la rue à tenter de rentrer en force reçoit un grand coup de gourdin clouté qui lui broie le visage en le faisant tomber à la renverse. Dégagé par Togreh qui se met en position bouclier face aux suivants, le vif Nenag attrape tout un fatras de lourdes poutres et de débris qui venaient d’être minutieusement dégagés de l’issue, et les bazarde à nouveau dans la brèche, obstruant l’accès pour de précieuses secondes.
Un meuglement de douleur canin leur parvient de l’étage, suivi d’un râle de douleur humain.
Wolgu redescend l’escalier en se trainant, du sang lui ruisselant de l’aine sous le pagne…
« Ils t’ont pas…
— Nan, ça va ! Meugle Wolgu. Mais putain, ça fait quand même foutrement mal… »

Quand ils redescendent en exhortant leurs gars au repli, le Colosse vert s’attarde quelques battements de cœur au rez-de-chaussée, sur les restes calcinés de l’ex-propriétaire de la machinerie. Il peste entre ses crocs…
« C’est moi qui devait me le faire, ce sale… »
Pour la première fois, il aperçoit véritablement l’enfant Orque. La machinerie qu’il a entre les mains, que celui-ci serre contre sa poitrine…
Ils ressortent de la ruine et rallient la bande de guerre sur le repli, qui tient en respect toute une cohorte de soldats d’argents et de Rangers vêtus de vert en tenant le seigneur ennemi lame sous la gorge. Alors qu’ils reculent au-travers des venelles enténébrées du champ-de-décombres, suivis en bloc par toute la cohorte ennemie, le grand Orque vert prend le temps de venir au côté de l’enfant, lui souffler un mot en pointant du doigt l’arme :
« C’était Mon adversaire, Mon Ordalie. Je te la confie, mais elle est à Moi, cette arbalète. »
« Ar-ba-lè-teuh… » Récite l’enfant Orque. Un bien joli mot…


Dernière édition par Karess le Jeu 20 Juin - 21:54, édité 11 fois
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[An Orc Story - Univers Seigneur des Anneaux] - Premier Sang pour l'enfant Orque Empty Re: [An Orc Story - Univers Seigneur des Anneaux] - Premier Sang pour l'enfant Orque

Message par Karess Dim 19 Mai - 16:25

X : Une autre vie…




Un festin pour mes corbeaux… Une digne offrande de cendres et de sang.

Les Hommes contre-attaquent en force. Parviennent à repousser le torrent d’Orques de moitié au-travers de la rive orientale. Au coeur de la nuit, les combats se poursuivent mais les fronts stagnent jusqu’à l’aube.
Les réserves de Ruayyh ont permis de rompre en partie l’étau des renforts gondoriens sur le côté sud, et les cohortes d’Orques qui avaient percé au-travers de la cité déchue en son centre disposent d’un cou-loir de repli face aux contre-attaques qui les repoussent de toutes parts. De toute manière, la nouvelle de la Tour abattue par une troupe derrière la ligne de front se répand rapidement et offre une superbe justification de retraite aux contingents du Mordor, à leurs généraux de légions qui en sont maintenant les meneurs. On rapporte une trahison de masse de la suite en livrées noires de la Tour, ses numénoréens noirs qui se seraient retournés contre les Uruk-Haï au cœur même de la bataille, piégeant la seconde vague d’assaut qui a dû batailler pour percer ses propres lignes afin de se sortir d’un massacre…
C’est la version de l’Histoire que Ruayyh et ses légionnaires rapporteront au Mordor.
Un peu avant l’aube, profitant d’une accalmie dans les combats sur le front ouest, une discrète entrevue a lieu entre un général Uruk borgne de la 18ème légion Mordorienne et un officier du Gondor de haute naissance, l’un des derniers encore en vie... Un échange de prisonniers est entendu, Uruk-Haï et Orques des Légions, et même quelques snagas, contre chevaliers et hommes d’armes captifs.  
Au vue des pertes, il est clair qu’ils ne prendront pas le champ-de-décombres d’Osgiliath cette nuit, cette guerre. L’aube le met clairement en évidence tandis qu’elle amène avec elle de nouvelles légions de renforts ennemis sur la rive occidentale…

Ils auraient pu prendre Osgiliath. Avec un général qui voulait la prendre, qui voulait vraiment la prendre, qui n’auto-sabotait pas son propre camp, ils auraient pris Osgiliath la Putain… Les Orques des Légions ont donné un petit surnom à la Tour dans son dos. « Sir Incompétus ». Une part de lui sent toutefois que la Tour n’était ni incompétent ni stupide… Bon, certes, stupide, il l’était bien pour venir se tenir en première ligne à portée d’arcs ennemis. Mais incompétent… Non. Il faisait ce que l’on attendait de lui. Pas prendre Osgiliath. Pas gagner la guerre, dont l’issue était totalement secondaire. Simplement alléger le nombre de bouches inutiles dans la population Orque du Mordor. Et peut-être même que les Uruk-Haï faisaient partie de cette "charge à alléger" à ses yeux… La caste des Légions Uruk-Haï est une force dangereusement croissante au Mordor. Une force politique dont elle n’a pas conscience, trop focalisés qu'ils sont sur l'Ennemi extérieur, ne voyant pas les Traîtres, les Corrompus… Ruayyh se jure de prendre les choses en mains au Mordor et de ne jamais plus jouer les pires jeux, jamais plus se plier docilement aux ordres les plus stupides et les plus aberrants de ses "Maîtres"…

Au moins, ils ont les effectifs suffisants pour se retirer en bon ordre de la ville, puis au-travers d’Ithilien où une armée semblable à la leur bataille sur les rives entre Osgiliath et l’île fortifiée de Cair Andros, assiégée par près de six-mille Orques également. C’est mieux qu’une débâcle, pourchassés par la cavalerie et les rangers qui les extermine jusqu’au dernier…

Ca, du moins, c’est ce qu’ils avaient espéré…

***

Ils ont regagné les galeries des égouts dont ils ont martelé l’issue à coups de masse pour en condamner l’accès dans leur sillage. Le temps que la cohorte d’Hommes qui les collait au cul déblaie, ils seront rentrés au Mordor. En train de picoler jusqu’à sombrer dans l’inconscience. Ils reviennent sur leur pas pour gagner le bon tunnel que leur avait promis le Commandant des piquiers en échange de son fils. Ils marchent dans un silence exténué. Le repos du guerrier…
Dans la pénombre des lieux, l’échange entre Quguug et le seigneur est presque comme une confession : « Ca n’était pas sous mon ordre…
— Je sais, le rassure Quguug en regardant devant lui, le guidant dans le noir. Ne vous inquiétez pas, on vous connaît, on sait que vous êtes un interlocuteur réglo pour les échanges de prisonniers. C’est la seule raison pour laquelle je ne vous ai pas laminé sur place, d’ailleurs… Ruayyh m’a dit un jour qu’il me confierait sa propre vie, mais certainement pas celles de ses prisonniers… Vous allez lui montrer qu’il se fait une fausse image de moi… »
Souvenir du fils du Commandant qu’il a fait brûler vif…
« Enfin, à demie fausse… » Rectifie-t-il. Il aurait étiré un rictus carnassier s’il avait encore des lèvres et des joues fonctionnelles.
— Mon cousin et mes Hommes n’étaient plus les mêmes depuis la fièvre… Ces maudits corbeaux… Ils ont quelque chose en eux qui leur ont donné des visions de feu et des obsessions de vengeance… C’est votre Maître qui en est à l’origine, pas vrai ?
Quguug ne répond pas, laissant planer le silence des lieux. Le seigneur des Hommes finit par pouffer amèrement...  
« L’influence de votre Seigneur des Ténèbres a fait brûler vifs des dizaines de vos guerriers. Peut-être qu’avant d’envahir des terres dans la barbarie, vous devriez vous demander qui sont réellement vos ennemis : un peuple qui ne vous a rien demandé, ou vos Maîtres, ceux qui vous tyrannisent, qui vous emploient comme de la chair à pique pour leurs desseins égoïstes ?
— Comment on dit chez vous déjà ? "Les voies du Seigneur sont impénétrables", ou quelque chose comme ça, réplique tranquillement Quguug en récitant. Ca marche aussi pour le Seigneur des Ténèbres… Pour le reste, ce que vos gars nous ont fait, entre nous, c’était de bonne guerre. En revanche, si vous voulez débattre de qui a raison dans nos querelles, on ne manque pas de bons casus belli pour légitimer la chute du Gondor, et de tous vos Peuples "Libres". A commencer par ce que vos ancêtres, les Elfes et leurs Valars ont fait de nous et de notre patrie. On n’a pas attendu un quelconque Seigneur des Ténèbres pour avoir des raisons de vous tenir tête, nous…»

Wolgu suit le mouvement en grimaçant et en soufflant lourdement de douleur…
« C’est qui, qui disait que j’étais pas en état de me battre et qui a besoin qu’on le rapatrie au pays maintenant ? Chochotte va ! Le taquine Togreh… Le gros Orque noir chahute sa sœur d’épée en représailles.
Devant eux, Thurgix lorgne Crocs Blancs Skulaï de son regard noir coutumier. Il voue une rivalité hostile au grand vert, et un jour il aura peut-être à le tuer de ses mains pour faire valoir ses droits aux plus hauts rangs de la Légion. Mais d’ici là, il ne peut pas nier qu’en matière de tuerie et de porter ses couilles, le grand vert est bien doté, et pour cela, il a tout son respect.
Les remerciements et la poigne qu’il vient lui échanger fraternellement dans l’obscurité du tunnel sont on ne peut plus sincères. La seule chose qui l’agace, c’est que quand il regarde dans les yeux de Crocs Blancs, Thurgix n’y perçoit aucune lueur de rivalité réciproque… Mais peut-être est-ce dû à l’obscurité. On perçoit mieux les lueurs de l’âme que recèlent les yeux dans la lumière du jour…

Le colosse de pierre à la chevelure et à la barbe de cendres marque une halte, le temps d’envoyer la moitié de la troupe dans le cul-de-sac menant à la fosse à feux.
« Prenez vos lames et allez récupérer les têtes dans le couloir.
— Seulement les nôtres*, ou même celles des Hommes ? Demande un Uruk élancé et robuste au teint brun comme le sien, vêtu d’un vert-gris terne...
— Si tu veux un ou deux trophées Nenag, fais-toi plaisir, et les autres aussi. Sinon, seulement les nôtres, on n’a pas toute la nuit. »

*:

L’enfant Orque suit silencieusement les colosses en armures. La quiétude funeste, le silence obscur de ces tunnels souterrains sont comme une chape de fatigue qui s’effondre sur ses frêles épaules meurtries. Toute cette demie-nuit d’horreur lui revient par flashs subliminaux dans ses yeux quand il cligne des paupières, somnole contre une paroi du tunnel. La fureur. La brutalité bestiale. Les hurlements… Il entend, il perçoit, il sent encore tout. Ses lèvres tremblent. Ses dents claquent. Des spasmes et soubresauts nerveux l’animent parfois. Pourtant, ici, les ténèbres et la quiétude l’apaisent. Telle la douce étreinte de cette mort avec laquelle il a communié en cette nuit...
Nenag, comme le Commandant a appelé cet Uruk élancé, marque un arrêt devant lui :

« Eh. Sans rancune pour tout à l'heure, pour t'avoir fait bouffer le sol. Tu vas l'entendre souvent avec nous : ne reste pas dans nos pattes, ne gêne pas la manoeuvre. »

L'enfant Orque hoche la tête, exténué. Nenag poursuit son chemin. Derrière sa silhouette robuste, il voit un être étrange qui se tient sereinement parmi eux dans l’ombre, masqué d’un crâne de bouc, dans son espèce de toge chamanique déchirée. Des crânes qui pendent ficelés à ses mains. Un Corbeau noir posé sur son épaule.
L’être le regarde intensément au-travers du néant de ses orbites crâniennes d’animal…
Une lance dans le ventre au cœur de la forêt…



L'enfant Orque est parcouru d'un frisson d'angoisse infantile... Il est encore en vie ? Vraiment ? Avec tout ce qu’il a traversé, pris dans la gueule ? Tous ces Uruk-Haï, imbibés de ce liquide noir huileux qui flambe. Ils viennent tous des fosses à feux… Des fantômes, comme lui…
Peut-être que son jeune esprit, voulant fuir la réalité et la mort atroce par les flammes, s’est monté un refuge. Une illusion... Un autre monde dans lequel il se croit toujours en vie, croit que tout s’est bien passé pour eux...
Un monde dans lequel tu aurais eu une chance de montrer de quoi tu étais capable. Été Maître de ton propre destin…

La sueur lui coule sur le front et sur le corps sous ce regard néant, alors il courbe la tête en fixant le sol, comme quand les Hommes allaient l’exécuter… Une fois sortis d’ici, la fin des combats, combien de temps encore ces guerriers vont-ils le laisser leur courir dans les pattes ? Au pays, les Uruk-Haï sont réputés pour être une caste imbue d'elle-même qui tient fermement la barrière entre leur engeance et les engeances snagas / ouvrières, comme lui. Et comme on le lui a clairement mis dans le crâne toute sa vie, au Mordor, "tu es né snaga, tu restes snaga."
Il devrait profiter qu’il a encore l’ar-ba-lè-teuh et une bonne dizaine d’arguments persuasifs dans son carquois pour déserter… Sauf que lui, ce qu’il veut, c’est rester avec les Uruk-Haï…
« Tu as un nom ? Vient lui demander le colosse de cendres en venant se camper face à lui dans le tunnel, lui relevant le menton de la griffe.

Avec ses lèvres amputées, son élocution est désastreuse, et sa dentition exposée au grand-jour intimidante. Pourtant ses yeux de glace étrécis sont dépourvus de malveillance. Du moins à son égard. A son côté, Pif rond se tient les bras croisés en retrait. Et le grand colosse vert que les autres nomment « Crocs Blancs » aussi l’observe. Distraitement, plus en retrait encore. Son sort ne l'intéresse sans doute pas.
L’enfant Orque reste sans mot dire, ses yeux las et craintifs, encore empreints d'innocence... Les lèvres qui tremblent de ses flashs subliminaux qui le replongent dans la bataille…
« Ils t’ont pas donné de nom dans ta fonderie… On va t’en trouver un, t’inquiète. C’est pas les noms et les matricules qui manquent à reprendre, cette nuit… Je suis le Commandant du Bras Disciplinaire au sein de la 18ème Légion, alors je fais c’que j’veux avec ma paperasse… Tu sais parler au moins ? Ils t’ont appris ça dans ta fonderie ?
— … Un… Un peu, bafouille l’enfant Orque en se sentant écrasé…
— On va t’apprendre à le faire pour de bon, ça aussi. D’ici quelques mois, on saura plus comment te la fermer tellement tu l’ouvriras. Ca fait toujours ça avec les p’tits gars comme toi qu’on enrôle à qui on fait l’éducation, ils étalent le moindre de leurs acquis... Tu veux rester avec nous p’tit gars ? Devenir l’un des nôtres ? Devenir un soldat de l’Oeil Rouge ?
— O… Oui, mais…
— Mais que dalle !
— … Je suis snaga…
— T’es un guerrier, un survivant, et un de nos frères d’armes, p’tit gars. On va pas laisser des scribouillards comme la Tour nous dire ce qu’on doit faire ou n’pas faire de nos camarades. Bienvenue dans la 18ème Légion du Mordor, p’tit gars. Moi c’est Quguug. Je suis ton Commandant. Et ça c’est le Sergent Thurgix, qu’on appelle le Mignon pour le faire râler. Et l’autre là-bas, c’est le Sergent-chef Skulaï, ou Crocs Blancs pour les intimes. Quand tu t’adresses à eux, tu leur fais du "Sergent", "Sergent-chef ", et moi, tu me fais du  "Commandant". T’as compris ?
— O… Oui. "Commandant"…
— Bien… » Alors que "Commandant" va pour s’en aller, son lourd pied botté produit un craquement osseux : « Eh schräk… Y a des corbeaux crevés, même ici…»

***



Jouant de la carrure et de ses nouveaux galons pour se frayer un passage, le Lieutenant Thurgix se fraye un passage jusqu’au flanc du chariot de blessés où récupère Eggha le Gras.
« Franchement, Capitaine, lui reproche Thurgix, vous pouviez pas avoir les couilles de mourir ? Vous bloquez le grade là ! »  
Eggha produit un gloussement sec et pris de toux, grimaçant péniblement.
« J’sais même pas si tu plaisantes ou pas… Rien qu’pour t’emmerder, j’vais m’efforcer de vivre encore très longtemps, mon p’tit Mignon… »
Après une nuit comme celle-là, les officiers de terrain de l’armée sont une espèce en voie d’extinction. Il y a des promotions dans l’air, pour lui comme pour ses rivaux...

Il marche au cœur d’une des quatre colonnes torrentielles de silhouettes noires de soldats qui sont sorties du champ-de-décombres et se retirent pour regagner la forêt d’où ils étaient venus au coucher du soleil. Derrière eux, c’est un vaste charnier puant, un festin pour les charognards qui emplissent le ciel et qui viennent se repaître des morts des deux camps…
Qui continuent de pleuvoir mourants, des fois…
L’armée convoie des wagons entiers de blessés. Parmi eux, il retrouve Yazho, son premier compagnon de légion. Toujours en vie, mais à demi-comateux. Il ouvre et referme faiblement les yeux, couché dans son chariot. L’écharpe qu’il employait pour se couvrir les voies respiratoires des poussières et des fumées cache maintenant une mutilation d’une horreur éprouvante… Pourtant il est en vie. Il a choisi de vivre, comme l’enfant Orque. Et l’enfant Orque se réjouit d’être encore en vie, ou du moins que les Uruk-Haï lui aient permis de croire qu’il est toujours en vie, parmi eux...
Non loin, le colosse de cendres, le vieux guerrier à la longue lame, le colosse vert qui les a sauvés et leurs guerriers viennent flanquer l'un des grands Trolls en armure. Battent une fois encore solennellement sur ses flancs cuirassés. Pif rond et sa troupe composée qu'il n'a toujours pas éparpillée viennent affluer autour d'Amante, blessée, entourant ses pas lourds en la remerciant du même rite. A travers les colonnes des légions du Mordor, le rite des poings battant sur les flancs des monstres et des machines de guerre s’élève encore une fois en un roulement métallique clairsemé dans les collines.

Au-travers du voile de fumée dans le ciel lancé par leur Maître, le soleil commence à percer, jetant un blâme aveuglant sur le retrait des Orques...




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[An Orc Story - Univers Seigneur des Anneaux] - Premier Sang pour l'enfant Orque Empty Re: [An Orc Story - Univers Seigneur des Anneaux] - Premier Sang pour l'enfant Orque

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