En insectes et en oiseaux...

Rires hystérique, un autre chargeur tombe à terre tandis qu’il semble s’écouler une pluie de balle. Ces visages, toujours les mêmes, ceux de ses victimes, humains ou nains. Ce têtes, qui éclatent, souillent de pourpre l’immense pièce stérile encore et encore, et enfin, son reflet à elle, dans le liquide au sol, grimace inhumaine aux traits comme tirés par des fils, sadique et enfiévré, qui se met à pleurer à chaude larme. Vaguelette dans la flaque, son regard la quitte pour assister une fois de plus a ce spectacle macabre, celui de Pabinioff, mis en lambeau sous ses yeux impuissant. Stacy cauchemarde, encore. Et surement a-t-elle attiré l’attention d’un faune dans le monde du réel, car au loin, au fond de cette pièce imaginaire, se tenait maintenant une petite silhouette enfantine qui lui faisait signe de la suivre, avant de traverser l’un des murs. Elle l’avait prise en chasse, et rouvert les yeux en Arda, entourée de ses amis.

Cette capacité a « injecter du bon dans son esprit » comme elle le disait, elle l’avait vite remarquée. Chaque matin, depuis qu’ils avaient rejoint le sanctuaire, Trojan s’était appliquée à aller saluer son ami de l’ombre, ou lui rendre hommage, là, à l’orée du monde de cette forêt enchantée. Ce petit rituel avait pris plusieurs formes, l’une d’elle avait consisté à garder quelques fruits de la fête de la veille pour aller nourrir les créatures affiliées au démon, passer du temps avec eux, tenter une caresse ou une forme de communication adaptée à l’espèce présente… Et a chaque fois qu’elle s’était éloignée de cet épicentre de Faunes, elle avait progressivement retrouvé le cataclysme émotionnel qui résultait de l’attaque du labo. De la tristesse, beaucoup, mais également un profond état de choc : Les sens en ébullition, les muscles qui tressaillent au moindre sons, alterné avec une apathie totale, une sensation de vide… Si elle n’appréciait pas cet état, Trojan l’acceptait. Il fallait savoir danser avec ses démons, et faute de danser, il fallait surtout savoir vivre avec, leurs faire une petite place le temps qu’ils étaient là, apprendre à les connaitre, pour finalement trouver ce qui les retenaient ici… Une chanson qu’elle appréciait disait qu’on ne pouvait pas les noyer, qu’ils savaient nager.

Ambiance et l'une des chanson chantée:

Comme tous les matins, c’était un soleil timide qui filtrait en filet entre les arbres qui étaient venu lui caresser la joue. Le reste du corps, elle l’avais enveloppé dans cette grande cape blanche qu’on lui avait donnée, qui n’était pas restée immaculée longtemps d’ailleurs… Des petits yeux, qu’elle avait, qui clignaient plusieurs fois avant de s’habituer a la lumière ambiante. Reflets jaunes, chauds, entre les feuilles vertes et les écorces foncées. Une golden hours comme elle n’en avait jamais vues avant d’arriver en ce lieux de paix. Leurs réveils était toujours célébré, chaque matin, ils avaient été accueillis par l’une des créatures vivant ici. Et chaque interaction avec ces dernières avait été… Magique.

Ses collègues, ainsi vêtu de blanc, de longs vêtements amples, n’avaient plus l’air si durs. Bien sûr, on lisait sur leurs visage la rudesse de leurs vies, mais l’accoutrement leurs donnait un côté sage, comme des « anciens » avait dit Stacy, avant de se reprendre en leurs expliquant qu’elle ne les traitait pas de papys, mais d’hommes expérimentés, avec du savoir à partager. Dominik aussi était transformé, il ressemblait à ces personnages charismatiques d’animation asiatique, sujet sur lequel elle ne s’était pas retenue pour le charrier. Elle-même se trouvait drôle dans sa tenue, habituée aux vêtements près du corps, grunge et sombre, cet enchevêtrement flou et clair de tissus récupéré dans les villages abandonnés aux alentours lui donnait une toute autre allure. Elle avait l’air en paix, une version plus « pure » d’elle-même, en dépit des taches de boue qu’elle avait déjà un peu partout. Dans une autre vie, peut-être avait-elle été une Orque…

«  Une fête ? » Avait-elle demandé d’une voix encore endormie, folle de joie. « Génial ! »

C'était la première fois depuis longtemps qu'il lui avait été donné l'occasion de fêter quelque chose, et de s'amuser. Brusquement, elle s’était relevée, maintenant en position assise sur un tapis de verdure qui lui avait fait office de lit. Les nuits étaient un peu fraiche et la rosée avait la fâcheuse tendance d’humidifier leurs vêtement, mais dormir à la belle étoile dans un cadre aussi onirique était une bénédiction, surtout quand les dernières images gravées dans vos rétines sont celle d’un magnifique feu autours duquel danse et chantent, toute espèce confondues, des dizaines et des dizaines d’êtres, comme la fresque dans cette chambre à Kiev, mais belle et bien réelle cette fois-ci.

« And all the people say : You can't wake up, this is not a dream. You're part of a machine, you are not a human being. With your face all made up, living on a screen, Low on self esteem, so you run on gasoline. Oh, I think there's a flaw in my code. Well my heart is gold, and my hands are cold. »

Souvenirs d’une des chansons qu’elle avait partagées hier soir, quelque chose d’amer, car c’était, a cet instant, tout ce qu’elle pensait connaitre. Plus tard cependant, elle avait chanté l’amour. Avec sa voix cassée et ses fausses notes, mais l’amour quand même, deux bras tendus comme un oiseau, tourbillonnant sur elle-même alors qu’elle faisait virevolter les pans de ses vêtements.

« Ooooh, Speak to me, speak to me ! With love in your words. Make for me, make for me ! A soft universe ! »

L’amour, ça avait été la grande question de cette soirée. Avait-elle eu des sentiments pour Joshua, plus jeune ? Ou pour Killian, bien qu’elle n’aurait eu aucune chance avec ce dernier pour lequel le corp mou d’une femme était rédhibitoire. D’une certaine manière pouvait-elle considérer que par un vicieux syndrome de Stockholm, elle ait pu aimer Zäler ?  Elle avait demandé a caresser les cheveux de Dominik, ceux-là même qui lui rappelaient tant ceux de ce monstre. Il avait accepté, dubitatif. Quelle nouvelle folie avait donc prit possession de la jeune femme ? Ça n’avait pas duré bien longtemps, ce petit manège, elle s’était vite lassée, l’expérience n’avais pas été très concluante. Rien, pas une émotion a ce sujet, juste peut-être, une légère jalousie. Avec son récent coup de tondeuse, l’homme avait les cheveux plus longs qu’elle, et en parfaite santé !

Elle revient au présent, se relevant maladroitement après avoir échangé un regard avec ses camarades et passé une main hésitante sur ses cheveux rasés. Resserrant sa cape autour d’elle pour se protéger de la fraicheur du matin, elle trépigne.

 « -Mère-la-forêt est bien trop bonne, et vous aussi ! Je serais très heureuse d’aller me joindre au cueilleurs ! Vous venez les gars ? »

Tout sourire, elle semble être redevenue une adolescente surexcitée, sans problèmes, encore plus a la mention des Orques.

« - Qui c’est qui t’a soufflé ça, Lex ? » Pouffe-t-elle. Evidemment qu’elle adorait les Orques, ils semblaient tous a ses yeux comme des petits frères maintenant. Une très grande famille. «  Je dois juste aller faire un petit quelque chose avant, on se retrouve un peu plus tard ? »

Elle avait ramassé un petit objet fait de bois, de crin et de pierre, fabriqué en compagnie d'un des faunes hier soir qu'elle était venu cacher dans sa manche, avant de prendre la route vers l'entrée de la foret pour retrouver son ami de l'ombre. 

Ce que j'imagine être la limite du sanctuaire:

Le poids de ses pensées et regrets revenait peu à peu, comme à chaque fois qu'elle s'éloignait des Faunes pour rejoindre son ami de l'ombre. Mais ce matin-là, elles n'étaient plus si amères. Non. Ses idées noires, peu à peu remplacées par cette chaleur dans son ventre, cette rage de vaincre, rage de vivre. Si les images de ses actions précédentes reviendraient la hanter encore de long moment, elle avait maintenant la certitude qu'elle avait fait les bon choix. Certains devaient payer le prix de leurs actes, et ils avaient payés pour les leurs, tout comme elle paierait pour les siens, cauchemars après cauchemars, injonction de son esprit après injonctions ; Mais elle comptait bien le faire debout, combats après combats, pour sa survie, pour ce qui est juste.

La rosée faisait scintiller tout le sous-bois, enroulée dans sa cape, c'est une zone d'ombre qu'elle cherche, quelque chose qui échappes aux règles de la nature, à son fonctionnement normal. Et c'est sous de grands Pins que son ami semble avoir trouvé refuge. Invisible à ses yeux, mais elle l'aurait juré : Karess était là. Enjambant prudemment racines et fougères dont les spores viennent se coller à son pantalon, Trojan progresse lentement vers le bassin d'ombre pour venir s'asseoir sur une pierre couverte de toute sortes de mousses. Si les Orques avaient pris soins de ses blessures, il restait quelques zones un peu douloureuses qu’elle s’efforçait de ménager. De sa manche, elle sort le petit objet fabriqué avec les Faunes et l'étudie longuement du regard. A première vue, c'était proche d'un attrape rêve, avec du crin au milieu. Elle le dépose ensuite à côté d'elle, fermant les yeux. Les Faunes lui avaient appris à méditer, au début, elle avait eu du mal, sa pensée partait dans tous les sens, ses membres tremblotaient ou s'agitaient, mais voir faire ses camarades avait eu quelque chose de reposant et d'inspirant. Ce qu'elle cherchait ici, c'était à entrer en communion avec l'entité, lui envoyer ses pensées, ce qu'elle ressentait. Le chant des oiseaux avait quelque chose de d'envoutant, porté par le vent dans les feuilles. Il serait mentir de dire que Stacy était en état de paix intérieur, mais il y avait de ça, un début de lumière au bout du tunnel.

" - On a fabriqué ça, pour m'aider avec mes mauvais rêves, ils ont dit de le garder avec moi. Mais... J'ai envie de te l'offrir. Si c'est magique, tu dois surement pouvoir en tirer quelque chose, t'en... " Nourrir" ? C'est pour toutes les fois où tu as puisé dans tes ressources pour Snardat et pour moi. Acceptes-le, je t'en prie. "

Longue inspiration, tandis qu'elle se concentre sur une éventuelle réponse, une brise, un hurlement de loup, un bourdonnement d'insecte...

" -Ils donnent un fête en notre honneur, encore. Ce sont vraiment les meilleurs hôtes qui soient, je me sens... Comme l'ado insouciante que j'aurais dû être, avec eux. C'est pas mal, je veux dire, ça fait du bien, mais il me manque quelque chose... Ils essaient de m'apporter la paix, c'est tout à leurs honneurs, et je m'y laisserais bercer volontiers. Mais ça me fait l'effet de la Lamotrigine... On m'ampute d'un sentiment. Un sentiment désagréable, dont la plupart des gens voudraient se passer mais hey... Il faut savoir vivre avec ses démons et ses casseroles. "

Sourire enfantin, toujours les yeux clos. Elle ramène doucement ses jambes à elle, comme hésitante.

" - C'est pour ça que je t’aime bien. Je me sens complète en ta compagnie. Les émotions, je me les prends de pleins fouets, je vis. A en crever, mais je vis. "

Stacy...

Son nom resonne dans sa tête l'espace d'un instant. Sensation de chaleur, encore. La même que lorsque l'on retrouve un ami, qui irradie comme une petite flamme réconfortante au-dessus de ces braises ravageuse de la rage qui l'anime.

Un ami.

C'est ce qu'elle suppose en lui, entité mystérieuse, insaisissable, mais qui l'accompagne dans chacune de ses péripéties, en semblant lui vouloir plus de bien que de mal. Chose fait d'immatériel, de rage, avec qui déjà, elle se remémore de beaux moments de communions, d'échange. Un camarade de l'ombre... Dont elle s'était habituée avec une facilité déconcertante à la présence, sans vraiment jamais la comprendre. Qu'était-il ? La question semblait partagée.

Elle était restée là quelques minutes, concentrée sur ses émotions, son ressentit, envoyant de bonnes pensées et de bons sentiments à l'entité, puis s'était relevée doucement de son perchoir, époussetant ses vêtements pour supprimer les éventuelles saletés qui seraient venues se coincer entres les fibres du tissus.

" -Aujourd'hui, on va voir d'autres Orques. " Elle sourit. " Lex à remarqué que je les aimaient bien. J'ai hâte. Mais.... Je n'ai pas revu Snardat depuis que je me suis réveillée. Ni les autres frangins et frangines, d'ailleurs. "

Stacy marque une petite pause.  Elle n'avait pas tout saisi, cette nuit. Leur arrivée n'était qu’un autre rêve ? Contrôlé, mais une machination de son subconscient quand même ?

" - Je ne sais pas ce que j'espérais... C'était chouette en tout cas. "

Soupir. Elle adresse un petit signe de sa main saine dans une direction au hasard et lance un dernier regard sur l'objet qu'elle avait déposé, avant de reprendre doucement la route pour rentrer au sanctuaire. Les garçons de la Meute n'avaient déjà plus leurs petites mines fatiguées, ça avait quelque chose d'attendrissant, de voir leurs visages de grand gaillard abimés par la vie avec de petit yeux tout brillants.

" - Qu'est-ce que j'ai loupé ? " Avait-elle lancé en donnant un petit coup d'épaule à Dominik.

Grand yeux noisettes qui s'illumine. Elle s'était tortillée sur place alors que Dominik était venu lui pincer la taille. Chatouilleuse, la hackeuse. Une petite tape sur la main de l'homme plus tard, elle se tenait de nouveau droite, balayant l'horizon du regard, émerveillée. Des Orques, pleins d'Orques avec la même allure qu'elle. Sa famille ? Et de petits Faunes, tous plus adorables les uns que les autres, mais surtout, les autres têtes connues du labos. Elle pose une main sur l'épaule de Dominik qu'elle presse légèrement en signe d'affection, et elle s'eclipse pour aller saluer celui qui avait été son ennemi, plus tôt lors de l'assaut.

" -Mangua ! Je suis heureuse de te voir de retour ! Comment vont tes blessures ?" Avait-elle lancé avec bienveillance et considération, elle découvre ensuite son bras pour montrer la peau brulée, mais dépourvue de cloques ou autres signes de complications. " Les Orques font vraiment des miracles. "

Au fond, elle avait de la compassion pour ce Faune, mais aussi beaucoup de peine. Il croyait bien faire, après tout. Elle l'avait ensuite quitté le pour aller voir si elle parvenait à trouver Yuri au millieu de ce joyeux petit groupe, saluant quelques personnes dont elle croisait le regard d'un signe de main amical. Stacy se sentait d'humeur joyeuse, légère, avec l'envie de prendre du monde dans ses bras. Ce qu'elle fait doucement en arrivant dans le dos de Mozbig, le soulevant légèrement pour l'embêter.

" - Salut toi ! Et... Toi ! " Avait-elle ajouté, tout sourire. " Tu es Longues oreilles, je suppose, l'ami de Mozbig ? "

Sensation de chaud dans le cœur alors qu'elle découvres qu'il a été épargné. Elle redépose doucement le petit Orque pour venir s'agenouiller près du Faune.

" - Tu es la première personne dont Mozbig m'a parlée quand on s'est connu. J'suis heureuse de te rencontrer ! Vous n'auriez pas vu un dénommé Yuri par hasard ?"

Il était là, assis dans son coin près de cette petite maisonnette sur pilotis qui avaient été leur refuge. Trojan avait tenu à le rejoindre, pour prendre de ses nouvelles, savoir ce qui était advenu de lui après qu’elle n’aie plongé dans la flaque… Frisson qui lui secoue l’épine dorsale alors qu’elle se le remémore. Volontairement, elle toussote pour annoncer sa présence, appuyée sur l’une des imposantes poutres.

«- Salut, tu… » Elle se frotte doucement l’avant-bras, se doutant qu’arriver comme une fleur et faire comme si de rien n’était ne servait à rien. « T’a envie d’en parler ? »

«- T'es la hacker de... "la Meute", hein... »

 «- Ou Sorcière d'Internet, comme disent les Faunes... On s'est aperçu la semaine dernière dans le hangar. Toi t'es le type qui nous a fournis les accès, merci beaucoup. Sincèrement. Tu m'a vraiment évité du sale boulot. »

«- J'ai tué tous mes collègues, là-bas... »

Grimace de la part de la jeune femme qui partage son ressenti. Elle lui adresse un regard attristé. Elle même avait du mal à faire le deuil de l'évènement. Alors lui, qui y avait passé du temps et lié des relation avec ces gens ? Il devait vraiment en pâtir. 

« -J'peux m'asseoir vers toi pour qu'on en parle ? »

« -Toute ma vie que je m'efforçais de construire... Je l'ai mise en morceaux en un éclair, avec une telle... Fièvre... Qu'est-ce que je vais devenir maintenant... Où est-ce que je vais... Je suis un homme mort... Déjà mort... »

N'ayant pas eu son accord, elle reste un petit peu en retrait. Ainsi, il avait remarqué l'influence de Karess... "Un homme mort"... Les mots resonnent dans sa tête, font écho à quelque chose de bien familier.

« - Tu va devoir faire preuve de résilience, Yuri. De beaucoup de force aussi. Mais as-tu vu les Faunes et le Sanctuaire ? N'as tu pas eu l'occasion de mesurer à quel point ce que tu à fait était juste ?  Tu es un bienfaiteur. »

« -C'était juste, c'est vrai... » souffle-t-il... « Mais la vie ce n'est pas juste. Je ne suis pas un animal ou un de ces... Faunes, moi, je suis un Homme et je vis dans une piaule, avec des chiottes, une cuisinière, un lit, une routine... J'ai fais un bras à tout ça, à ma mère aussi, en faisant ça... J'ai... Je ne sais plus où j'en suis... »

Elle vient finalement s'asseoir doucement à ses côtés, silencieuse pendant quelques minutes, avant de reprendre.

« -Cette fièvre... Tu sais ce que c'est ? »

A demi intrigué, il relève le regard sur elle.

« - C'est la promesse de quelque chose de nouveau. Et ce renouveau, y'a que toi qui peux choisir ce que ce sera. Faut juste que tu t'accroche, parce qu'elle sera toujours la maintenant. Dans les bons comme dans les mauvais moments. Et si tu t'en donne les moyens, elle te donnera la force de faire tout ce que tu n'aurais jamais imaginé. »

Elle marque une petite pause, avant de tenter un sourire à l’égard de l’homme. Sa voix s’est faite douce, réconfortante.
 
« -Comme sauver un peuple fantastique. C'est pas complètement fou ? »

« -Si... Si j'imagine, mais... Je ne me sens pas du tout de taille, maintenant que j'y pense à tête refroidie... Seulement c'est trop tard... »

« - Yuri, tu te rend compte de quoi tu as réchappé ? Tu sais ce qui rôdait là-bas, bien moins mignon et inoffensif que les Faunes... »

« - Je savais que le complexe renfermait des genres de spécimens ultra véloces mais... J'étais loin d'imaginer... Ça. »

Son regard se porte vers le marais infesté de l'Huileux.

« - Et tu vas me dire que tu vas te laisser impressionner par des bon à rien en chemisette bleue après ça ? Tu m'dira... »

Elle soupire doucement, appuyant son menton sur la paume de ses mains.

« - J'ai eu peur aussi. Longtemps j'ai été terrorisée même. Mais plus aujourd'hui. Je te promets que si tu ne lâche rien, les choses vont s'arranger. Te laisse juste pas consumer par la fièvre. »

Il regarde vers le lointain, l'air hagard...

« -Je vais au moins essayer... La Meute m'a promis qu'elle m'aiderait à passer sous les radars, alors, j'ai plus qu'à vous faire confiance... Merci en tout cas. »

 Elle pose une main affectueuse sur son épaule, venant la serrer doucement.

« -C'est des gens bien, tu peux me croire. Allez, reviens dans le sanctuaire avec nous, je te promets que ça te fera du bien.»

Lentement elle se tourne et désigne du menton les deux jeunes qui l’avaient guidé.


Insouciance et légèreté. Tous autours de ce grand feu, la fête avait prit des airs de cette peinture dans la chambre qu’elle avait occupé a Kiev. Virevoltant autours des flammes, chantant, une joyeuse congrégation constituée d’Orques, de Faunes, et d’autres créatures tout aussi féeriques. Stacy chantonnait elle aussi, sautillant autours de Sasha en tournant sur elle-même, essayant de le faire rire en faisant le pitre. Elle avait confié à la meute son inquiétude pour Yuri, à qui elle avait proposé une embrassade pendant la fête, afin de lui mettre du baume au cœur. Elle était soulagée qu’il soit revenu, même si elle se doutait que tout n’allait pas bien pour lui. Ultime tentative de grimace a l’égard de son camarade avant de le menacer de le chatouiller, deux mains tendues devant elle. Elle aimait voir ces grands gaillards rire, enlever cet air grave de leurs visage, faire ressortir l'adolescent caché au fond de ces militaires.

Ses yeux noisette s’étaient emplis de larmes à la vue de la petite créature. Sourire triste alors qu’elle fait quelques pas pour la rejoindre, tendant deux paumes tournée vers le ciel devant elle, l’invitant à les saisir. Elle ne savait pas s’ils pouvaient se toucher, a vrai dire, elle n’avait aucune idée de comment cette scène pouvait être possible. Mordillant sa lèvre inferieur pour contenir un sanglot, elle parvient finalement à articuler :

« -Je suis tellement désolée… Tellement désolée de ce qu’il t’est arrivé, j’aurais voulu pouvoir empêcher ça… "

Deux pattes timides s’avancent pour venir se poser au creux des mains de la hackeuse. Caresse immatérielle, doux frissons proches de ces picotements significatifs de l’étreinte de son ami de l’ombre, avec quelque chose de profondément rassurant et bienveillant.


"-Je ne voudrais pas que tu t'en veuilles trop, humaine... C'est vrai que j'aurais voulu vivre et revoir mes amis, mais... Je me souviens moins d'avoir eu mal que de ma vie ici..."

Ses mains font mines de se refermer sur celles du petit être.

"-Tu peux m'appeler Stacy. Et toi c'est Pabinioff, c'est ça ? Est ce que... Est ce que tu as la possibilité de rester, je veux dire, sous cette forme ?"

''-Comme le Seigneur Noir ? Ça pourrait être amusant mais, je sens les forces qui m'attirent. Qui me disent de venir. J'ai envie de les écouter. Je ne me suis détourné de leur appel que pour te dire de ne pas être triste.''

Nouveau sourire triste tandis qu'elle tente de lui effleurer la joue.
 
" -J'apprécie, merci à toi."
 
Elle se recule ensuite, larmes aux yeux pour ne pas le retenir plus longtemps. Pinçant les lèvres, elle lui adresse un petit signe de la main.
 
" - Je te souhaite que l'après soit plus beau, Pabinioff. "


La magie et la féerie avait laissé place a quelque chose de plus tribal. Quelque chose de viscérale, qui prenait aux tripes. Sous sa cape, les mains de Stacy fourmillaient. Une douce chaleur irradiait dans son corps, tandis que ses yeux noisette, plongés dans les flammes au centre de ce cercle d’êtres, semblaient luire dans les tons chauds. Fiévreuse, elle semblait vibrer aux sons produits par ses congénère, avant d’être tirée de sa transe par la vision de son ami et de sa bande.

" - Snardat, les copains ! " Avait-elle hurlé en se jetant vers eux, accroupie pour être à leurs hauteur.

Eclat de rire tandis qu’elle caresse leurs têtes et leurs joues, comme pour s’assurer qu’ils étaient bien réels.

" -C’est vrai ? Mais c’est formidable ! Depuis combien de temps vous êtes là ? Je ne vous aient pas trouvé à mon réveil ! " 

Elle vient ensuite les enlacer un a un, en leurs laissant le choix d’accepter ou non l’étreinte, bien trop heureuse de les retrouver.

«  -Vous avez déjà rencontré Dominik et les autres ? C’est ma Meute à moi, les gens aux côtés de qui j’ai combattu. »

Comme revenue d'ailleurs... L'échange avec Daria la laisse avec plus de questions que de réponses, la majeure partie du temps, elle s'était contentée de produire des petits sons d'approbation et de hocher la tête, elle n'avait pas réellement construit une seule phrase depuis son réveil, encore sous le choc. 
 
Daria quitte la pièce, aussitôt, l'américaine envoie voler la couverture moite de sueurs froides au travers de la chambre pour étudier ses jambes. Pas de présence de morsure. Un coup d'œil plus haut lui révèle l'absence de brûlures sur ses bras. Longues inspirations tandis qu'elle enfoui son visage au creux de ses mains, secouée par quelques flashs de l'attaque. Il lui faut de longues minutes avant que son cœur ne reprenne un rythme normal. 
 
Un rêve, juste un rêve. 
 
Avec un semblant de vertige, elle étudie à nouveau la fresque au mur, scène macabre, qui lui donne un sentiment d'échec, mais surtout, de terreur. Soudain, elle réalise, Snardat, les autres... Ils avaient voyagé d'un rêve a un autre, rien de plus. Sa main vient saisir la dent autours de son cou, pincement au cœur, alors qu'elle tente d'accepter que tout ceci n'avait été que le fruit de son imagination. Ou celui de quelque chose de bien plus puissant : Karess. 
 
Pour l'heure, faute d'avoir des réponses, elle avait besoin d'une bonne douche et de laver ses draps. Dans son dos, une large tache de sueur acide était venue faire coller le vêtement a sa peau. Ses cheveux, eux, s'accrochaient de manière chaotique sur son front et ses tempes. Elle se secoue, défait précipitamment le lit et emmène avec elle les interminables rectangles de tissus. Peu à peu, elle reprend contact avec la réalité, la boule dans son estomac disparait, et elle retrouve sans trop de difficulté le chemin de la salle de bain, déjà occupée par Sylwia, visiblement affairée à dominer sa chevelure folle. Echange de regard surpris entre les deux jeunes femmes. Stacy s'excuse a trois reprises, de peur d'avoir envahi son intimité, tandis que Sylwia regarde avec surprise les drap dans ses mains. Finalement, elle lance sur le ton de la plaisanterie : 
 
"- T'a rêvé de toilettes ? " 
 
Haussement de sourcils de la part de la hackeuse qui ne saisit pas tout de suite, avant qu'elle ne change subtilement de couleur, comprenant qu'on venait de lui demander si elle avait mouillé son lit...
 
"- Sueurs froides, cauchemars... "
 
Pink pince les lèves et semble reporter son attention vers le miroir, remontant ses boucles roses et ses dreads en un imposant chignon au sommet de son crâne.
 
"- Ça arrive à Black aussi parfois... " Elle désigne du doigt un bloc de savon sur l'étagère en bois de palette. " Ici on lave à la main. Tu pourras l'étendre dehors, il fait beau aujourd'hui. "
 
 
Comme une toile céruléenne au-dessus de sa tête, plus un seul nuage à l'horizon. Une légère brise animait les draps fraichement pendus, tandis qu'elle, cheveux encore humides lissés vers l'arrière, regardait le ciel avec inquiétude, comme si à tout moment, d'autres hélicos allaient débarquer. Aujourd'hui, elle comptait sortir, Pink lui avait proposé de lui montrer le quartier afin qu'elle se familiarise avec son nouvel environnement, tout en évitant de trop l'exposer, de peur qu'elle ne soit reconnue.