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Carl Kave [Recueil de nouvelles]

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Carl Kave [Recueil de nouvelles] Empty Carl Kave [Recueil de nouvelles]

Message par Gordon K. Ven 14 Juin - 18:34

Présentation :

Salutation chers lecteurs et lectrices, je vous présente un de mes projets en cours d'élaboration, un ensemble de nouvelles se concentrant sur le personnage de "Carl Kave", un rôdeur, un mercenaire, un chasseur de prime et surtout un simple roturier. L'Histoire est typiquement du "Dark Heroic Fantasy" avec une petite touche de "réalisme" qui prend place au sein de l'univers de Terrea, (une Terre fantaisiste alternatif au nôtre). C'est dans ce sous-forum que les nouvelles et les chapitres des plus grosses nouvelles seront publiés au fil du temps, (les dates restent cependant imprécises et aléatoires). J'espère que l'histoire de ce personnage suscitera votre curiosité et votre envie de suivre l'aventure de cet "aventurier", sur-ce chers lecteurs et lectrices, je vous souhaite une bonne lecture ^^.

Synopsis :

Roturier et vagabond errant dans les ruines d'un Empire de l'Ouistreness plongé dans la guerre civile depuis plusieurs décennies. Carl Kave, n'est qu'un homme parmi tant d'autre en ces temps troublés, qui cherche avant tout à survivre. Ainsi, le roturier est prêt à accepter et accomplir n'importe quel travail pour subvenir à ses besoins. Au cours de ses aventures (ou plutôt mésaventures), il n’est pas rare qu’il joue à la fois les mercenaires, les chasseurs, les courtiers ou bien les contrebandiers. Même s'il n’est pas un mercenaire avec une grande renommée, ni même un farouche explorateur, c’est un vagabond, qui après dix ans d'errance à travers les terres de l'empire, a acquis une certaine expérience. Arrivant à parvenir à ses fins, là où d'autres échouent, que ça soit par la ruse, la stratégie, son endurance ou tout simplement par la force de sa persévérance. Tantôt solitaire, tantôt accompagné, tantôt un héros, tantôt un opportuniste, voici l'histoire d'un homme qui en ces temps troublés, survie malgré toute la crasse que ce monde bien hostile peut lui offrir ...


Dernière édition par Gordon K. le Dim 22 Sep - 23:38, édité 1 fois
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Carl Kave [Recueil de nouvelles] Empty Re: Carl Kave [Recueil de nouvelles]

Message par Gordon K. Ven 14 Juin - 18:38

Carl Kave

Chapitre I – La venue de Carl Kave

Loin à l’horizon, illuminant une dernière fois les plaines verdoyantes et les forêts noirs plongées dans l’obscurité. Le crépuscule dont la lumière vacillante frôlait la sime des arbres, le toit des habitations et les ombres des morts, annonçait la venue imminente de la lune et des ténèbres qui allait s’abattre sur ce simple hameau perché au milieu de nulle part.
Une étrange odeur de fumée flottait dans les airs, le vagabond solitaire qui avait alors parcouru de nombreuses contrées, pouvait aisément la sentir. Marchant depuis le lever du soleil, la chevelure au vent, ce petit homme plutôt chétif, drapé alors de noir et d’un grand chapeau, débarqua dans ce petit hameau. L’arme à la main, il comprit que cette odeur et cette fumée venaient tout simplement de ce pauvre village complètement saccagée et ravagée. Notre voyageur, observant distinctement les habitations brûlées et les corps mutilés gisant sans vie sur le sol, avança lentement, mais sûrement vers les portes de la palissade qui furent fracassés. Bien que surpris par l’état du hameau, il n’en fut néanmoins pas moins étonné par la crasse accumulée au niveau de ses bottes. Bien trop habitué à être le témoin de tels spectacles en cette ère troublée, le roturier paraissait impassible, voir même insensible à la vue et à l’odeur de l’effusion du sang.
Toujours la poignée sur sa lame, il progressa précautionneusement, s’efforçant de percer du regard les ténèbres épaisses qui régnaient sous les ruines fumantes des maisons en bois. Le vagabond solitaire arriva dans une contrée bien hostile, la mort y rôdait de partout, pas une rue n’était jonchée de cadavres sans vie. Marchant à travers ces décombres fumants, le roturier constata que parmi les corps, il n’y avait pas seulement les habitants victimes de cette attaque, mais également quelques individus armés et qui par leurs armures légères et leurs protections, semblaient transgresser par rapport au reste. Touchant minutieusement le cadavre de l’un de ces hommes-armes gisant au sol sans vie, l’aventurier chercha si cet homme portait une quelconque bannière ou un symbole, mais l’individu ne portait rien de cela :
- Des bandits, souffla-t-il à voix basse.

Se relevant immédiatement, l’étranger continua toujours son chemin tout en inspectant les environs et les décombres de ce pauvre hameau victime d’un raid de pillards. Néanmoins, alors qu’il marchait toujours à l’affut, ce dernier discernant d’étranges bruits, sortit aussitôt sa lame dans le fourreau et la pointa en direction du bruit :
- Ça ne sert à rien vous cacher, montrez-vous ! Déclara-t-il à haute voix d’une intonation qui se voulait menaçante.

Sortant timidement de cachette derrière une palissade, notre homme vit un jeune garçon d’un regard complètement apeuré :
- Un survivant ? S’interrogea notre héros.

Tandis qu’il venait à peine de discerner ce jeune garçon, notre héros se retourna brusquement en arrière. Pointant la lame sur la gorge de ce pauvre malheureux, il le regarda profondément dans les yeux pour le tester. L’homme la hache à la main complètement statique et paralysé par la peur, demanda à notre étranger d’une voix grave, mais tremblante :
- Vous êtes qui ?

Abaissant sa lame, la rangeant dans son fourreau, le voyageur se contenta d’un simple soupir, avant de lâcher :
- Un simple voyageur qui passait par là.
- Vous êtes arrivé au mauvais moment, déclara le villageois.
- Vous êtes les seuls survivants ?
- Non … quelques-uns se sont … enfuis ou cachés.
- Combien vous êtes ?
- Peu …
- C’est votre fils ? Demanda l’étranger en pointant vers l’arrière en direction du petit garçon caché dans les décombres.
- Non, c’est … mon neveu.

Alors que les deux échangeaient respectivement l’un l’autre, d’autres personnes, des femmes et des enfants finirent par sortir de leurs cachettes sous les décombres des habitations ou bien de l’obscurité de la forêt. Sans grande surprise, le petit voyageur comprit que ces malheureux étaient tout simplement les rares rescapés du massacre. À première vue, ces derniers ne devaient sans doute pas excéder cinq ou six individus. Prenant une position plutôt passive, l’homme qui lui faisait face lui demanda toujours de cette intonation grave, mais tremblante :
- Vous … venez d’où ?
- Du sud.
- Pourquoi vous êtes venu ici ?
- Pour me reposer la nuit.
- Comment vous êtes arrivé jusqu’ici ?
- Un marchand itinérant m’a dit qu’un petit village se trouverait en prenant une bifurcation à l’ouest.
- Qu’est-ce que vous allez … faire maintenant ?
- Bonne question ! Sûrement reprendre mon chemin et me reposer quelque part dans la forêt.

À peine, il commença à rebrousser chemin qu’à nouveau, l’homme haussa la voix pour lui demander :
- Vous avez peut-être l’air chétif, mais je sais reconnaître un vrai guerrier.
- Ah oui ?! Se retourna le vagabond solitaire vers son interlocuteur avec un regard circonspect.
- Ecoutez ! Vous pouvez peut-être nous … aider, j’ai une proposition à vous …
- Ouais, je la vois venir, allez-y cracher le morceau, déclara le vagabond en tapotant les pieds avec un regard exténué.
- Quand, ils nous ont attaqué, on a tenté de se défendre, mais ils nous ont eu par surprise, ils ont pillé et massacré nos …
- Vous étiez combien ici avant le raid ?
- Huit familles.
- Et les bandits ?
- Une dizaine ou une douzaine.

L’étranger comprenait où son interlocuteur voulait en venir. Observant l’état du carnage autour de lui, il demanda après avoir lâché un long soupire :
- Pourquoi vous voulez faire appel à moi, je ne suis qu’un simple voyageur, un étranger.
- Un simple voyageur ne porte pas un tel accoutrement, ni même une cotte de maille ou encore un arc avec des flèches, déclara l’homme en le pointant du doigt.
- Vous avez l’œil affuté.
- Je suis forgeron, j’ai déjà prêté par le passé mes services à des soldats et des mercenaires.
- Okay, je suppose que vous voulez que je venge votre village ?
- Je n’ai pas et plus la force de me battre. Mais, je dois surtout veiller sur eux, s’exclama-t-il en pointant du doigt son neveu et les autres rescapés.
- J’en suis navré, mais je ne vais pouvoir vous aider. Si vous voulez trouver un lieu sûr, prenez la grande route et partez vers le sud, déclara le petit vagabond, avant de commencer à rebrousser chemin.
- Attendez ! Je peux offrir ce que vous voulez ! S’exclama au loin l’homme.
- N’insistez-pas, déclara le voyageur solitaire en s’éloignant petit à petit de son interlocuteur.
- Oui ! Mais … on a encore des provisions, je peux vous forger ce que …
- Pas la peine d’essayer, au revoir monsieur.
- Luwiding, le gobelin et ses bandits sont recherchés, vous pourrez …

Tournant immédiatement son regard à nouveau vers son interlocuteur, le forgeron vit soudainement et à son plus grand étonnement, le voyageur revenir vers lui d’un pas pressé. Le regardant droit dans les yeux, ce qui fit donner des sueurs froides à notre homme, le voyageur demanda :
- Vous avez dit Luwiding, le gobelin ? Demanda-t-il en montrant ses dents pointues presque inhumains.
- Oui, c’est lui et ses hommes qui ont attaqué notre village.
- Okay, vous savez quoi, changement de plan, je vais vous ramener les têtes de ses hommes, annonça le roturier à l’égard du forgeron.
- Pourquoi … pourquoi, vous avez soudainement changé d’avis ? Demanda le forgeron étonné du changement de tempérament du vagabond chétif.
- J’ai des comptes à régler avec ce Luwiding, je ne peux pas vous en dire plus. Bref ! Où se trouve sa cachette ?
- Ils sont partis vers le nord-est. Après où se trouve leur cachette, ça je n’en sais rien.
- Ne vous inquiétez-vous pas, je vais retrouver leurs traces.

Retournant vers la sortie du village, le forgeron lui demanda à haute voix :
- Avant que vous partiez, j’ai une requête à vous demander ?
- Bon, allez-y, déclara le roturier en s’arrêtant dans son pas de course.
- Ces ordures ont tué ma femme, mais ils retiennent ma fille en otage, Elie, une petite blonde. J’aimerais que vous la rameniez vivante ou … morte, s’il vous plaît ?
- Très bien, ce sera fait.

Alors que notre vagabond solitaire était sur le point de partir, celui-ci décida de se retourner une dernière fois en direction du forgeron :
- Quel est votre nom ?
- Gustave Forge ! Et vous ?! S’exclama le forgeron en retournant la question au vagabond solitaire.
- Carl Kave !

S’éloignant petit à petit du village, Gustave vit ce mystérieux aventurier du nom de Carl Kave disparaître au fil du temps vers l’obscurité de la forêt et les ténèbres de la sime des arbres …


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Carl Kave [Recueil de nouvelles] Empty Re: Carl Kave [Recueil de nouvelles]

Message par Gordon K. Ven 14 Juin - 18:39

Chapitre II – La Tanière des crocs

La lune blanche
Luisait dans les bois ;
De chaque branche
Partait une voix aigüe
Sous la ramée du soir.
S’exclamant de joie,
Et accompagnant sa douce dulciné,
Le petit prince déclara :

« Oh ! Ma bien aimée ! »

L'étang reflétait
Tel un profond miroir,
Les silhouettes obscures
Depuis le sol noir
Du Prince et de la Princesse.
Grondant à haute voix,
Au soir de cette pleine lune,
Le petit homme déclara :

« Rêvons, c'est l'heure ! »

Un vaste et tendre
Apaisement lourd
Semblait descendre
Du firmament profond
De la forêt noire.
Traçant son chemin
Avec ses compagnons,
Le gobelin déclara :

« C'est l'heure de l’exquise ! »

Avant, de s’enfoncer
Rapidement, précipitamment,
Profondément dans
La noirceur et profondeur
Tanière des crocs.
Avec sa douce
Et belle dulciné
En guise de gibier.

Le crépuscule finit par s’éteindre, loin à l’horizon. Ses derniers éclats laissèrent place aux ténèbres de la nuit et à la timide lumière de la pleine lune. Malgré, l’obscurité, les cris sauvages et le hurlement du vent sur les branches et la cime des arbres, provoquant une symphonie particulièrement glaçante, le rôdeur, bien que traversant un environnement dangereux pour l’homme, savait pertinemment que le temps et la météo se rangeait à ses côtés. Au milieu de la nuit, en ce temps plutôt glacial et particulièrement humide de ce mois d’Octobre, même un clampin de la ville qui n’a que très rarement posé les pieds dans une forêt quelconque, pouvait aisément repérer les diverses traces laissées sur le sol.
S’aventurant de plus en plus dans les profondeurs de la gorge de la bête, Carl Kave qui traversait les feuillages et la broussaille de la forêt noir, scrutait, regardait et observait à chaque pas, la moindre trace qui aurait pu été laissé sur le sol. Sans même observer attentivement le sol ou faire appel à ses sens de pisteurs, le rôdeur sût reconnaître les traces animales de ceux des hommes qu’il recherchait.  Ce fut facile, car ces derniers avaient laissé un long sillage derrière eux comme s’ils avaient trainé quelque chose.
Suivant ce sillage et continuant son long chemin, toujours la main posée sur la lame, l’étranger constata qu’il n’y avait pas seulement des traces de pas. Au milieu de la crasse qui aux yeux du rôdeur représentait bien l’état du monde auquel il fut habitué, celui-ci trouva un étrange fluide qui sans grande surprise n’était d’autre que du sang. Soudain, un cri fit ressurgir son instinct de chasseur, levant immédiatement sa lame de son fourreau, Carl Kave restait à l’affut du moindre bruit. Restant sur ses gardes, jetant de rapide coup d’œil partout, même sur la cime des arbres. Le rôdeur prit la décision d’avancer discrètement, mais sûrement vers ce cri empli de râlement et d’agoni. Se faufilant discrètement à travers les feuillages, éclairé faiblement par la lumière bleutée de la pleine lune, notre homme vit tout simplement une pauvre silhouette allongée et complètement agonisante près d’un arbre.
Toujours sur ses gardes, à la limite de la paranoïa, en pensant que ceci n’était qu’une vulgaire mise en scène, Carl Kave observa longuement les environs. Finalement, il ne sortit que lorsqu’il jeta une pierre sur le sol, constatant qu’aucun mécanisme de piège s’activa. Une fois certain qu’il n’y avait point de danger, il décida de se rapprocher de la silhouette mourante, silhouette qui n’était d’autre que celle d’une pauvre demoiselle. Regardant l’étranger avec un air exténué, la victime, une pucelle de seize ans, demanda d’une voix faible :
- Vous êtes … qui ?
- Un simple voyageur, déclara Carl Kave en s’abaissant à son niveau.
- Qu’est-ce … que … vous me voulez ?
- Je suis à la recherche de vos tortionnaires.
- Que le Dieu-Dragon soit loué …

Cette voix étrangement calme semblait incongrue de la part de cet homme qui au vu de l’apparence n’inspirait habituellement point la confiance. Il posa la main sur sa poitrine, non point pour la toucher, mais pour observer son état qui au vu de ses habilles humides tâchés de rouge, semblait malheureusement dévoiler une triste réalité glaçante :
- Je suis désolé … mais, je crains …
- Ce n’est rien, je sais, répondit la jeune brune fatiguée, malgré un petit sourire au bout de son village.
- Bon, racontez-moi tout. Combien sont-ils ?
- Une dizaine.
- Où vont-ils ?
- Vers le nord dans leur repère à l’intérieur d’une …
La jeune crispa pendant quelques instants, Carl la retenait du mieux qu’il pouvait. Il savait parfaitement qu’elle allait bientôt partir, mais il ne voulait pas avant qu’elle ait tout dévoilé au rôdeur :
- Vous pouvez reprendre ?
- Oui … Les … pillards, ils … retournent dans leur repère … dans une grotte.
- Ils ont capturé d’autres filles ?
- Oui
- Combien ?
- Cinq, mais ils m’ont abandonné en cours de route au vu de mon état.
- Il y avait une blonde, la fille d’un forgeron ?
- Vous parlez … d’Elie ?
- Oui
- Elle était leur otage, le gobelin l’a pris comme son … gibier, déclare-t-elle en ne pouvant pas s’empêcher de verser une dernière larme.

Regardant dans les yeux la jeune adolescente, le rôdeur chétif se leva de nouveau, alors qu’il regardait les environs, jetant le moindre coup d’œil dans les parages. Agonisante et gémissante, la demoiselle demanda avec ses dernières forces à l’étranger :
- Puis-je vous demander de mettre fin à mes … jours ? Je ne veux pas attendre … longtemps.

Sans même dire un mot, Carl se pencha une dernière fois vers la jeune adolescente. Projetant son regard profondément dans sa pupille, il sortit aussitôt sa dague. Cependant, avant même qu’il plonge sa lame dans sa gorge, il lui demanda une dernière fois en guise d’adieu :
- Quel est ton nom ?
- Rose Vernal, fille d’un simple paysan d’un village quelconque. Maintenant, enfin … je vais pouvoir rejoindre papa, maman et grand-frère.

Une âme quitta ce monde sereinement. Une âme comme il en existe parmi tant d’autre, une simple paysanne, une oubliée dans le tumulte des flots du temps, dont ni l’histoire, ni les comtes-légendes, ni même aucun registre ne notifiera son nom à travers les âges et les générations.

Carl Kave reprenait son chemin, résolu à trouver cette grotte et la tanière de son ennemi. Traquant et pistant ses proies tel un loup flairant l’odeur d’un troupeau de cerfs, le rôdeur, après quelques marches à travers la forêt, affrontant et balayant aisément les éléments et les ténèbres de la nuit, finit par trouver une étrange ouverture au sein d’un grand roc de pierre. Des lumières en jaillissaient dans les profondeurs, il y avait une odeur de décomposition et de pourriture qui en dégageait, le vagabond solitaire cachant à peine son dégoût, pouvait la sentir.
Profitant de sa petite taille, le rôdeur eut le reflexe immédiat de se cacher dissimuler dans la broussaille et les feuillages. De sa position à une dizaine de mètre de l’entrée de la bête, Carl voyait que deux hommes, deux individus en gardaient l’accès. Enfin, en gardaient l’accès, car ces derniers semblaient être à moitié assoupis. La puanteur qu’ils dégageaient et l’élixir qui s’échappait de cette bouteille de verre, dévoilait sans surprise que les deux gardes étaient souls. Ces derniers avaient sûrement fait la fête après la réussite de leur raid.
Se faufilant derrière eux, l’un d’entre eux, le plus grand et le plus maigrichon des deux, se réveilla, ouvrant à peine ses pupilles, une soudaine frayeur parcourut son corps, lorsqu’un visage aux dents pointus pointa une lame au niveau de sa gorge. Jetant un rapide coup d’œil vers sa gauche, il fut terrorisé lorsqu’il constata que son collègue était allongé à terre complètement sans vie avec un grand filet de sang s’échappant de sa gorge. Le malheureux n’eut guère le temps d’agir, ni même de pousser un gémissement, car l’étranger trancha aussi vite sa gorge.
Débarrassé des deux gardes, le rôdeur avec une grande prudence pénétra à l’intérieur de la « caverne des crocs », dont la présence des pics sur le plafond et certaines parois, formait une bien étrange formation, dont les yeux les moins attentifs, pourraient les confondre à la gueule d’une bête enragée. Ainsi, profitant de sa petite taille et de ses vêtements sombres pour s’infiltrer telle une ombre. Carl Kave eut une certaine difficulté à traverser la grotte, car la cavité de celle-ci était particulièrement étroite, mais en avançant pas à pas, petit à petit et un peu plus, il vit une mystérieuse lueur brillée au loin telle une bougie dans une chambre plongée dans le noir. Tandis qu’il s’en rapprochait, il vit et sentit une ombre sifflée non loin d’ici. Immédiatement, faisant appel à nouveau à ses instincts de chasseur et profitant de la cavité étroite, tel un écureuil cherchant son gland accroché à la branche d’un arbre, il grimpa aussitôt à la surface avec la plus grande discrétion. Perché sur le plafond, il vit un jeune homme ou plutôt un bandit se diriger vers la porte d’entrée. Alors que celui-ci voulait sortir, histoire d’aller faire ses besoins dans la forêt, à peine il perçut les cadavres sans vie de ses compagnons, un étrange poids lourd et une sensation froide s’écrasa soudainement sur lui. Complètement immobile sur le sol, le jeune rôdeur décrocha sa dague depuis le crâne de ce pauvre type.
Continuant son périple, laissant le corps sans vie du jeune homme derrière lui, il avança lentement, mais sûrement. Aveuglé pendant un bref instant par cette lueur, il vit au bout de sa route, après avoir longé les cavités étroites, telle une fourmi à travers ses galeries, un feu de camp dont les fumées s’échappant d’une ouverture depuis le plafond, un spectacle macabre qui fit frissonner tout de même son corps endurcit par des années de combats et de calvaires.
Observant la salle légèrement en hauteur, sept bandits, dont au moins cinq petits êtres chétifs, verts et gris, dents crochues aux yeux perçants, semblaient s’amuser dans une mascarade à faire presque vomir Carl. Lâchant leurs pulsions et libérant leurs libidos incontrôlables, les cinq gobelins et leurs deux camarades humains jouaient avec leurs proies. Carl ne put s’empêcher de serrer les dents, car au milieu de cette infamie, il vit un être transpirant le mépris et le dégoût.
Tandis qu’en bas, on jacassait, on criait, le chef de cette bande, un gobelin à la peau grise, mais bien plus imposant que ses congénères, demanda à haute voix à ses compagnons :
- Hey les gars ! Le petit n’est encore revenu.
- Il va revenir, il a juste la chiasse ! Déclara un autre à la peau verte en ne pouvant s’empêcher de rire.

Soudain, tandis que celui-ci était plongé dans un fou rire presque incontrôlable, une flèche transperça son cou. Se retournant, un autre, bien plus petit cria :
- Qu’est-ce que ?

Mais, à peine, il termina sa phrase qu’il fut lui aussi transpercer à l’œil par une nouvelle flèche. Les autres virent avec la plus grande stupéfaction, un étranger maigrichon et plutôt chétif, habillé en noir, se tenir légèrement en hauteur devant eux. Hurlant, criant et s’exclamant, le chef ordonna à ses clampins :
- Tuez-le ! Butez-le !

Lorsque ceux-ci sortirent à peine leurs armes, l’étranger disparut comme il est venu, dans la profonde galerie de la grotte. Comme prévu dans son plan, les larbins le suivirent sans réfléchir à l’intérieur de la galerie étroite de cette grotte, malgré les avertissements de leur chef qui criait à ses subordonnés :
- Non ! Bande de crétins ! Revenez !

Les quatre, dans leur élan de furie incontrôlable, foncèrent vers le rôdeur. Malheureusement, gêné par leur nombre, leur taille, la charge frénétique des bandits laissa finalement place à un véritable bouchon dans les étroites cavités. Tentant de se dégager l’un de l’autre, le premier en tête de ligne, un homme plutôt costaud, vit au loin le rôdeur qui étrangement s’était arrêté dans sa course vers la sortie de la grotte. Poussant un cri de rage, l’homme qui chargea avec toute sa force et son endurance, trébucha soudainement à terre. Derrière lui, ces compagnons qui le suivirent, firent également de même. Reprenant son souffle, le bandit constata que ce fut une rangée de pierre, placée méticuleusement qui fut la cause de son échec. Echec qui allait désormais lui coûter très cher lui et ses compagnons puisque profitant de cette opportunité, le rôdeur en profita pour décoller quelques flèches qui se longèrent aussitôt sur les corps sans défense des bandits. Presque tous périrent suite à cette simple ruse, le dernier survivant, un simple gobelin, tenta de se relever sous les cadavres de ses compagnons, mais à peine il se dégagea des corps de ses compagnons que le rôdeur en profita de son inattention pour trancher aussitôt sa gorge d’un coup net avec sa dague.
Marchant sur les cadavres sans vie des bandits, Carl Kave faisait enfin face à l’ennemi qu’il cherchait temps, la principale, si ce n’est l’unique raison qu’il l’avait mené jusqu’ici. Depuis, les cavités de la grotte, les deux hommes s’échangèrent des regards chacun empli d’un profond dégoût et d’une haine intense. Regardant droit dans les yeux de son adversaire, ce malgré l’obscurité, le gobelin gris, telle une chouette au milieu de l’obscurité, put grâce à ses yeux longtemps habitués à l’obscurité, reconnaître des traits qui lui semblaient bien familiers. Cessant de serrer les dents avec la rage au ventre, son visage laissa paradoxalement place à un étrange rictus au bout du visage :
- Carl ! ça faisait longtemps ! T’as grandi gamin ! S’exclama le bandit à haute voix.

Alors qu’il venait de déclarer ses quelques mots, le chef des pillards eut le réflexe et l’intelligence de parer au bon moment la flèche décrocher par son vieil ami. Se repliant à nouveau vers la salle unique. Carl Kave toujours sur ses gardes, ne le suivit point, s’attendant sûrement à un piège ou une ruse de sa part, ce dernier préférait avec la plus grande patience rester en arrière. Abaissant son arc, le rôdeur toujours à l’affut, patientait et restait prêt de sa proie, tel le félin guettant le rat depuis sa tanière. Criant avec rage et détermination, il lança :
- Aller Luwiding ! ça ne sert à rien te cacher !
- T’es aussi têtu qu’était ton daron !
- Me parle pas de lui !
- Quand il avait une obsession, il y allait à fond ! Tu lui ressemble sur ce point !
- Tu sais pourquoi, je suis venu ici ! Arrête te la jouer !
- T’y veux venger ta grognasse qu’était ta mère ?! Une paysanne que ton daron a capturée, puis s’est amusé avec elle. Pourquoi t’en veux à moi et à ton père ? Sans nous, tu n’aurais jamais vu le jour sur cette terre. Un semi-gobelin, on ne voit pas ça tous les jours !
- C’est pour ça que je veux te buter !
- Ouaip, ce ne serait pas demain la veille ! Sale bâtard !

Sortant précipitamment de sa cachette pour jeter une lance au fond de la galerie. Le bandit fut surpris et complètement abasourdis, lorsqu’il constata que son arme de jet se planta dans le sol. Mais, à peine il fut plongé dans la confusion et l’incompréhension, il n’eut guère le temps de ne serait-ce bouger le petit doigt lorsqu’une ombre le percuta lourdement depuis le plafond. Tombant, roulant et trainant lourdement vers la salle avec son ennemi, le gobelin qui ne doit son salut que par son armure en cuir, reprit très vite les esprits. Le crâne ensanglanté, les membres presque contorsionnés et le bras gauche fêlé, le vieux gobelin constatait que son adversaire, se relevant lui aussi avec une certaine difficulté, était face à lui.
Tournant autour du campement au milieu des corps séquestrés des villageoises, Kave et Luwiding se regardaient l’un et autre, échangeant des intentions mêlées à la fois, dans un mélange explosif, de haine, de mépris et de rancœur. Comprenant qu’il était le moins favorisé et le moins avantagé dans ce duel de par les blessures profondes dans sa chaire et son égo. Serrant à nouveau ses dents crochues, le bandit, l’épée à la main et constamment à l’affut, jetait de rapide coup d’œil dans l’espoir de prendre la fuite et ses jambes à son cou. Alors que la tension était palpable, au beau milieu de ce tête à tête, Luwiding lâcha à la plus grande surprise à son vieil ami :
- Tu veux que je te dise un truc ! C’est moi à la fin qui ai égorgé cette truie qu’a été ta mère ! Et j’en ai pris beaucoup plaisir !

S’attendant à ce que son adversaire tombe fou de rage et charge inconsciemment contre lui, consumé par sa propre haine. Ne pouvant dissimuler sa satisfaction derrière son grand sourire, le gobelin profita sans surprise de sa négligence pour lui foutre un violent croche patte. Cependant, l’adversaire auquel, il faisait face, était déterminé à lui ôter la vie coûte que coûte. Effectuant ainsi, une roulade pour se relever immédiatement, le gobelin comprit que le jeu n’en valait plus la chandelle. Profitant de la distance avec son adversaire, le vieux chétif, malgré son âge plutôt avancé, détala tel un lapin à travers les cavités étroites de la grotte :
- Adios ! Sale bâtard ! S’exclama une dernière fois le chef des bandits en prenant la fuite.

Carl Kave, malgré toute sa persévérance et sa force gonflée par la rage, dont le filet de bave s’échappant de ses crocs, faisait penser à un véritable loup enragé, ne put rattraper son vieil ennemi dont la seule chose qui put lui offrir en guise d’adieu, n’était que le sifflement du vent accompagnés par les vagues lugubres des branches et le goût amer de la défaite.
Gordon K.
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Message par Gordon K. Dim 22 Sep - 23:37

Chapitre III – Autour d’un feu de camp

- Souvent, elle me disait qu’elle voulait être aventurière et parcourir le monde, déclara le forgeron avec le regard vide de vie et une petite larme coulant au niveau de sa joue.  
- J’espère que dans l’au-delà, elle vit des aventures passionnantes, loin des horreurs de notre monde, répondit calmement Carl Kave au vieux père.

Dissimulé à travers les feuillages obscurs de la forêt, le village sans nom de la communauté paysanne, n’était plus qu’un tas de décombres, dont les toits furent affaissés et les murs, pour la plupart, furent consumés. Peu d’habitations se tenaient encore debout, l’odeur de la mort et de la désolation était toujours et particulièrement présente entre ses murs. Le sang était encore frais sur les décombres des palissades, malgré que tous les cadavres fussent enterrés au cimetière, à proximité de l’église en ruine.  
Carle Kave était revenu au village avec le corps de la fille du forgeron à la main. Sans grande surprise, le père en fut dévasté. Son corps, celles des autres filles qui succombèrent aussi aux supplices de Luwiding et de sa bande, ainsi que les victimes du massacre, reçurent de grandes funérailles plus ou moins improvisés, car aucun survivant, ni même notre vagabond solitaire, ne connaissaient les litanies nécessaires pour le repos des âmes défuntes.
Achevant les funérailles avec quelques prières personnelles et un long silence, tous finirent par quitter les lieux. Les derniers à partir ne furent que le forgeron qui restait immobile devant la tombe de sa fille, ainsi que celui de sa femme morte au cours de l’assaut et du pillage du village. Le rôdeur était aussi présent, il restait au côté de notre pauvre homme, lui qui pourtant voulut, au début, s’éloigner des villageois, indifférent à leurs souffrances. Maintenant, le voilà au côté du forgeron, silencieux et muet comme une ombre.
Le soleil n’allait pas tardé à se lever, autour d’un feu de camps avec les autres survivants complément assoupis, Carl et le vieux père furent les seuls à ne pas avoir fermer l’œil de la nuit. Au début, muet et silencieux, nos deux compères finirent par s’échanger quelques regards, puis petit à petit quelques mots comme :
- Tu viens d’où à l’origine ? Demanda Gustave, le forgeron.
- De nulle part, déclara sèchement Karl Cave.
- Tu n’as pas de chez-toi ?
- Non, je passe ma vie à voyager, d’aller un endroit à un autre sans vraiment m’y attarder.
- La vie classique d’un roturier.
- C’est ça.

Par la suite, ça enchaîna avec des questions de plus en plus précises et avec, par conséquent, des réponses de plus en plus longues :
- Tu fais quoi habituellement ? Interrogea de nouveau le forgeron à notre aventurier.
- Je chasse, je marchande, je piste, je cogne quelques bouches et si nécessaire, je tranche quelques gorges.
- Pas doute, t’es un mercenaire.
- Oui et … non.
- Alors, qu’est-ce que t’es ?
- Je suis et je peux être un peu tout et n’importe quoi en fonction de l’employeur.
- Du genre ?
- Je peux tout autant jouer le courtier pour livrer une lettre ou un colis, m’enrôler comme mercenaire pour n’importe quel seigneur ou commandant, marchander ou intimider quelqu’un, voir même, voler ou faire de la contrebande, si ça peut m’apporter un peu butin.
- On t’as déjà payé pour tuer ?
- Pour faire les chasseurs de primes et apporter des têtes de bandits, oui et même plusieurs fois.
- Non, je voulais dire … on t’as déjà payé pour tuer quelqu’un … qui était un … innocent ?
- N’ayez pas peur des mots vieil homme. Si vous parlez des contrats d’assassinats, ça remonte assez loin, mais oui, j’en ai déjà fait.
- Vos cibles, c’était … quel genre de personne ?
- Jamais de petits paysans, car je n’avais aucun intérêt à toucher une faible solde pour la mort d’un pauvre bougre. Ni de grands aristocrates, ces types étant bien trop puissants pour que je m’attaque à eux. Non, c’était souvent des officiers d’armées ou des nobles de petites maisons.
- Tu faisais souvent ça ?
- Quand, on naît dans un pays en guerre. Ce genre de contrats, ça pullule, surtout que ça arrange les belligérants et les maisons nobles, vu que ça évite qu’ils se salissent les mains, qu’ils risquent leurs vies ou encore celles leurs pions. Pour répondre à ta question, ouais j’en ai fait et souvent.
- Tu as travaillé souvent pour quel camp ? Les Reyessiens ou plus les Wilsons ? Demanda à nouveau le forgeron à son interlocuteur.
- Tout autant les deux, mais ça variait en fonction des saisons et de l’employeur.
- Typiquement le portrait d’un mercenaire.
- Appelles ça comme tu veux, mercenaire, roturier, aventurier, je préfère le terme « hommes-arme à louer », même si ça parait long.

Tout le long de la nuit, enchaînant les échanges et les questions, les deux finirent par se rapprocher, ce malgré la méfiance qu’il y avait au début entre les deux hommes :
- Tu es déjà parti dans les royaumes voisins ? Demanda de nouveau Gustave.
- Oui, même si ça remonte à longtemps, répondit le rôdeur.
- T’es êtes allés où ?
- J’ai fait quelques escales à l’est dans le Saint-Empire, je suis parti pendant un long moment au sud vers les Républiques Lebinoises et je suis même resté pas mal de temps vers les côtes Maures au-delà de la mer du sud.
- Tu es allé chez les Maures, en Lybie ? on dit que les habitants ont le teint mâte, voir sombre.
- C’est vrai, si on va plus loin dans le sud du désert de Tiniri, la couleur de peau des habitants est de plus en plus sombre.
- Vous êtes allé jusqu’au désert ?
- Non, mais vers les ports d’Oren et Al-Numis, de nombreux nomades y viennent pour commercer, beaucoup ont le teint noir ou sombre.
- On dit qu’il faut chaud là-bas ?
- Très, à tel point que ça en devient insupportable surtout en été. Là-bas, l’automne et l’hiver sont les meilleures saisons.
- J’imagine bien, c’était comment là-bas.
- Mise à part, la chaleur. Honnêtement, je préfère aller vivre là-bas que rester ici. Là-bas, il y a la paix et les gens ne veulent pas t’étriper dès que tu les croises. La guerre a rendu les hommes de ce pays fous, avides de pouvoir et de sang.
- Si je le pouvais, je partirais m’installer là-bas ou même ne serait-ce dans un royaume ou une région en paix, mais on n’a plus rien, ça risque d’être compliqué avec tous ces bandits et ces soldats voguant sur les routes …

Au fil de ces échanges qui permit l’installation d’un certain respect mutuel entre les deux hommes, le forgeron put désormais poser des questions un poil plus personnels et dérangeantes :
- Tu m’as l’air …
- Accoucher, rétorqua Carl.
- Comment ça se fait que vous avez les …
- Les ? Demanda le rôdeur en fronçant des sourcils, agacé par la tonalité du forgeron.
- Comment ça se fait que vous avez les dents et les oreilles pointus ? Ça va t’énerver, mais ça me fait penser à un …
- À un gobelin, oui on me le dit souvent ça.
- Enfin, à te regarder de plus près, il y a des trucs qui sautent à l’œil, mais tu n’as pas la peau verte ou grisâtre. Mais, en vrai, tu sembles humain.
- Normal, je suis un bâtard.

Ces quelques mots balancés par le rôdeur, laissèrent pendant un bref instant à un silence de gène et de malaise. Le forgeron ne préféra pas s’avancer davantage sur cette question, il savait que c’était un sujet assez houleux et tendu. Cependant, à la surprise de Gustave, le concerné décida de reprendre le sujet, en prenant une intonation étrangement calme :
- Ma mère était humaine et mon père était un gobelin. Je suis né à l’origine …

Hésitant quelques instants, Carl avait pour habitude de parler très peu ou rarement de son passé à des inconnus et des étrangers. Néanmoins, en cette soirée autour d’un feu de camp, au milieu de nulle part, le rôdeur pouvait se permettre à cette règle qu’il s’était pourtant fixé :
- Le fruit de cette union n’est rien d’un amour, mon père était à la base un bandit, un voleur et un tueur. Il était autrefois le chef d’un groupe de pillards, il a ravagé des villages entiers, tué et massacré des dizaines de personnes. L’un des villages qu’il a attaqué avec son groupe, fut celui où vivait ma mère, elle n’était encore qu’une adolescente …
- Je suppose que … Luwiding en faisait partie ? L’interrogea-t-il en serrant ses poings et ses dents.
- Oui, c’était même l’un de ces lieutenants, il fait parti des personnes sur ma liste de chasse.  

Observant les flammes avec quelques pensées et souvenirs qui vinrent lui troubler l’esprit, en faisant ressurgir faiblement au fond de lui, la flamme de haine qui l’avait tant refoulé, il reprit par la suite, après s’être quelque peu calmé, d’une ponctualité bien plus basse :
- Il a massacré tous ces proches, ses voisins, ses amis, sa famille. Puis, il l’a emmené dans une grotte et lui a fait subir les pires outrages … Voilà, c’est comme ça que je suis né.
- Désolé, dit le forgeron.
- T’as pas à l’être, t’as pas à l’être …

Alors qu’il était plongé dans ses souvenirs d’enfance, en repensant notamment à sa mère qui était la seule personne qui lui portait un amour, malgré sa naissance fortuite et indigérable. Il fut sorti très vite de sa torpeur, lorsque Gustave lui demanda par la suite :
- Qu’est-ce que tu vais désormais ?
- Je vais partir vers les montagnes Alpinaens, s’il y a un endroit où Luwiding se cacherait, ce serait sûrement là-bas. De nombreuses communautés orques et gobelins y sont établis depuis des générations, suite à la grande migration.
- Tu penses sérieusement qu’il partirait là-bas ?
- Sans aucun doute, il a sûrement des connaissances qui accepteront de l’héberger, mais j’ai aussi mes contacts.

Reprenant à nouveau son souffle, Carl se lança de nouveau avec une expression bien plus énergétique :
- Je te promets de retrouver ce type et lui faire payer tous les crimes qu’il a pu commettre. Je t’en fais le serment devant l’Empereur-Dragon en personne.
- Merci, merci beaucoup …

Si l’essentiel des peuples du monde connu vénérait le Dieu Elohim, surnommé l’Empereur Dragon, sauveur et saint-martyr des êtres peuplant ce bas-monde. Carl ne croyait pas ou plutôt ne prêtait que peu d’attention à tout ce qui touchait au sacré et à la spiritualité. Se moquant ou plutôt se fichant des prêches des clercs des différentes églises et cultes dédiés en son nom. Jamais, il ne l’a prié ou appelé à son aide, ayant appris depuis son plus jeune âge, à se débrouiller seul face à la fatalité de la vie. Pourtant, voilà qu’il a juré en son nom, ce qui était plutôt étrange. Néanmoins, on pouvait s’en douter, cet acte n’avait rien d’une quelconque exaltation ou foi qui abritait en lui, mais plutôt d’un geste pour montrer à Gustave Forge, sa volonté et sa promesse de traquer Luwiding, en vengeant en parallèle, toutes les victimes qui ont subis ou pu subir ses supplices, comme l’épouse et la fille de ce pauvre forgeron.

Observant le feu en silence pendant un long moment, Carl tourna son regard vers celui du forgeron qui était complètement capté par les flammes. Ce regard, ces yeux vides de substances, c’était typiquement celle d’un homme ayant tout perdu. Il n’y avait même plus de larmes qui se reflétaient, toutes avaient coulé depuis. Quelque peu inquiet pour le pauvre homme, le rôdeur demanda au forgeron d’une voix bien plus calme et détendue :  
- Tu vas faire quoi maintenant ?
- Je ne sais pas, je n’ai plus de maison, plus de foyer, plus de famille, dit Gustave en continuant d’observer les flammes du feu de camp.
- T’as encore quelques proches.
- Oui, j’ai bien mon neveu et ma sœur, mais où pourrions-nous aller ? On n’a plus de sous, plus rien désormais …
- T’as dit que tu voulais partir dans une région épargnée par la guerre.
- Je ne sais pas, à quoi bon lutter quand on a …

L’homme voulut terminer sa phrase, mais il vit son neveu, le premier survivant que Carl rencontra, se réveiller :
- Vous pouvez parler moins fort, déclara le gamin en se frottant les yeux.
- Je suis désolé, retourne maintenant te coucher.
- Dit tonton, qu’est-ce qu’on va faire maintenant ?
- Je ne sais petit, je ne sais pas …
- Est-ce que le voyageur va nous aider ? Dit-il en regardant innocemment Carl.

Ce que Carl craignait, était devenu réalité. Il était maintenant grandement préoccupé du sort du pauvre homme et de ses proches survivants. Lui qui voulut partir le plus vite possible d’ici, maintenant le voilà obligé de rester au risque d’être hanté à jamais d’avoir laissé ces pauvres malheureux. Dans un pays en proie à la guerre, l’empathie et l’attachement étaient aux yeux de Carl des points faibles et des poids lourds à transporter. Pourtant, allait-il laisser ces pauvres malheureux dans la misère ?
Finalement, il se leva en regardant droit dans les yeux de ce jeune garçon :
- Oui, je vais vous aider, je vais vous aider à vous trouver une nouvelle maison.
- Merci beaucoup … ’sieur, dit le jeune garçon avec un bref petit sourire timide.

Se levant également à son tour, Gustave Forge demanda au rôdeur circonspect :
- T’es sérieux ?
- Oui, rétorqua Carl Cave.
- Pour … allez où ?! Répondit le forgeron quelque peu fatigué et troublé.
- Au flanc des massifs d’Alpinae, il y a une région épargnée par la guerre, c’est le comté de Dalecy, le seigneur de ses terres n’a pris le parti d’aucun des camps et se tient éloigné de la guerre. La région est riche, il profite du commerce avec les cités naines établis sous le massif d’Alpinae.
- Mais, comment on va pouvoir s’y installer ? Et les autorités dans tout ça ? Qu’est-ce qu’elles vont en penser ?
- Tu es forgeron, tes compétences seront la bienvenue là-bas. On partira vers la ville de Dalecy, la capitale du comté. De là, il faudra juste se présenter et discuter avec l’intendant qui garantira votre protection.
- Le voyage risque d’être long.
- Je serais là pour être votre … guide, qu’est-ce t’en dis ?

Réfléchissant quelques instants, Gustave Forge regarda quelque instants son village. Sa famille, ses ancêtres et toute sa vie fut dans ce petit hameau perdu au milieu de nulle part. Néanmoins, lorsque le forgeron observa l’état de la forge, il avait le cœur serrer, tout n’était que ruine, cendre et désolation. Toute sa vie s’était effondrée, à quoi bon lutter contre le destin, se demandait Gustave au fin fond de sa pensée. Néanmoins, il tourna son regard vers son petit neuveu, ainsi que les autres survivants. Il était au moins le seul homme valide ayant survécu au massacre, il avait un devoir, il ne pouvait laisser tomber ses femmes, ses vieillards et ses enfants, dont son neveu. Finalement, lâchant un long soupire, le forgeron déclara :
- Et dire qu’au début, tu voulais nous laisser seul …
- Les choses ont … quelque peu changé, répondit le rôdeur.
- Très bien, j’accepte, emmenez-nous là-bas.

Le lendemain, après que tout le monde ait été réveillé, Gustave leur annonça que les choses allaient maintenant changé et qu’un avenir plus radieux les attendait à l’est. Les survivants quelque peu dépités, acceptèrent l’offre sans pour autant afficher une grande joie. C’est avec une certaine nostalgie et une profonde tristesse que Gustave et ses compagnons regardèrent leur village natal désolée, toutes leurs vies, tous leurs souvenirs, leurs héritages étaient partis en fumée. Ils visitèrent une dernière fois les tombes de leurs proches, morts le jour de l’attaque des bandits, en faisant un dernier hommage, avant de faire leurs adieux. Le groupe de survivants composée à peine de sept individus, dont trois enfants, deux jeunes femmes, un vieillard et notre ami le forgeron, suivirent leur guide, le rôdeur noir qui décida de les emmener vers l’est. Avant de quitter les lieux, Carl regarda également une dernière fois le village en ruine, lui qui ne voulait pas jouer les héros et qui disait que la pitié était une faiblesse en ces temps troubles, le voilà en charge d’un petit groupe de pauvres paysans. Mais, bon il faut bien un peu d’espoir dans ce monde brute sans pitié, se disait Carl, avant de partir avec le groupe de paysans vers l’est …
Gordon K.
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